Le Tombeau De Jésus
latérale amyotrophique. Depuis lors, il prend soin d’elle. Il fume la pipe, et ses dents en sont noircies. Celles de devant manquent, mais comme il consacre tout son argent aux soins de sa femme, il n’a pas les moyens de s’offrir une prothèse. Avec son chapeau à la Indiana Jones et sa bedaine de plusieurs dizaines de kilos, c’est un personnage hors du commun. Responsable du service recherches de notre société de production, il est avant tout mon ami.
Quand je suis revenu de Jérusalem à l’automne 2003, j’avais emporté avec moi le rapport de Kloner sur la découverte du tombeau de Talpiot-Est. J’ai laissé tomber le dossier sur le bureau de Ron en lui disant :
— En 1980, on a découvert un tombeau au sud de Jérusalem.
— On a découvert de nombreux tombeaux, dit Ron. Qu’est-ce que ça a à voir avec l’ossuaire de Jacques ?
— Les archéologues ont retrouvé dix ossuaires dans le tombeau de Talpiot. Six d’entre eux portaient des inscriptions, dont un « Matthieu », un « Joseph », deux « Marie » et un « Jésus, fils de Joseph ».
Ron parut intrigué :
— Et ça n’a pas fait de bruit ?
— En fait, la deuxième Marie s’appelait…
— Madeleine ? me coupa-t-il en riant.
— Non, justement… Mariamne.
— Jamais entendu ce nom-là. Dommage, gloussa-t-il avant de retourner à son travail.
— Peux-tu effectuer une recherche sur ce nom, dis-je, pour voir s’il y a un lien entre les noms Mariamne et Madeleine ?
Il consulta aussitôt Google puis se tourna vers moi, légèrement pâle.
— Regarde, Simcha, s’exclama-t-il.
Par-dessus de son épaule, je scrutai l’écran.
— Selon des études récentes, lut Ron à voix haute, le véritable nom de Marie Madeleine était… Mariamne.
— Chapitre 3 –
LE TOMBEAU PERDU
Simcha Jacobovici
Le moins que l’on puisse dire, c’est qu’Oded Golan n’a pas bonne réputation. J’ai rencontré cet Israélien, collectionneur d’antiquités, en octobre 2002, après qu’Hershel Shanks m’eut donné les droits exclusifs sur l’histoire qu’il était sur le point de révéler dans la Biblical Archaeology Review (BAR) concernant la découverte de l’ossuaire de Jacques. À l’époque, personne parmi le peu de gens au courant de cette affaire ne mettait en doute son authenticité.
Je pris l’avion pour Tel-Aviv afin de filmer le dernier examen de l’ossuaire avant la publication de l’article du BAR. Le monde ignorait encore l’existence de ce qui était, selon toute vraisemblance, le premier artefact attestant l’existence de Jésus de Nazareth. Hershel m’avait averti qu’après cet ultime examen le propriétaire, qui désirait rester anonyme, pourrait interdire tout accès à l’ossuaire. Il me fallait absolument profiter de cette opportunité car il n’y aurait peut-être pas d’autre séance de prises de vue.
Le jour dit, je quittai l’hôtel Carlton en front de mer et pris la direction du centre de Tel-Aviv. Le propriétaire donnait des instructions par téléphone portable à mon chauffeur. Je m’étais imaginé une belle balade le long de la côte méditerranéenne jusqu’à une villa isolée perchée sur une colline. Au lieu de cela, nous avons à peine dépassé deux ou trois pâtés de maisons pour nous arrêter devant un petit immeuble des plus banals. Mon équipe de tournage israélienne et moi-même avons emprunté un ascenseur jusqu’au deuxième étage, et nous nous sommes retrouvés dans une sorte d’appartement de célibataire, accueilli par un homme de taille moyenne, d’une quarantaine d’années, au visage assez juvénile.
Oded Golan est un garçon de bonne famille. Sa mère est professeur d’agriculture à la retraite, son père ingénieur. Son frère possède une maison d’édition spécialisée dans les ouvrages éducatifs. Lui-même a été officier dans l’armée israélienne, puis entrepreneur. Il éprouve une passion pour les femmes asiatiques, l’architecture moderne et la musique classique. En pénétrant dans cette garçonnière, la seule chose que je remarquai fut le piano quart de queue blanc. L’appartement était un peu sale mais relativement en ordre pour un célibataire. Jamais je n’aurais imaginé que l’un des plus grands collectionneurs d’antiquités bibliques puisse vivre dans un tel cadre. Le richissime Shlomo Moussaieff, probablement son plus célèbre homologue au monde, possède des résidences somptueuses en Israël,
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