Le Tombeau De Jésus

sous le nom de Marie de Magdala, mais par son prénom, celui-là même qui est gravé sur une paroi de l’ossuaire IAA 80/500 : Mariamne. Selon vous, quelles sont les probabilités d’une telle correspondance ? Les archéologues affectés au site de Talpiot, en 1980, ignoraient le lien entre Mariamne et Marie Madeleine. Réciproquement, aucun spécialiste des écrits néotestamentaires et gnostiques n’était au courant de l’existence du tombeau de Talpiot ou des neuf ossuaires de l’entrepôt de l’AAI.
    L’argument était troublant, mais non pas concluant. La preuve du caractère exceptionnel de la présence conjointe des noms Marie, Joseph, Matthieu, Jésus, Mariamne et Judas à l’intérieur d’un seul et même tombeau ne pouvait être fournie que par une analyse statistique. L’idée était de comparer systématiquement leurs occurrences sur l’ensemble des ossuaires répertoriés.
    Simcha évoqua ensuite la possibilité d’une analyse ADN. À l’Autorité des antiquités israéliennes, l’usage est de rassembler les ossements découverts puis de les inhumer dans des fosses communes. Toutefois, une sorte de boue ou de sédiment minéralisé a constitué une fine couche dure au fond de plusieurs ossuaires du site IAA 80/500-509. De petits éclats d’os ont été piégés dans ce dépôt minéral et les fragments de deux des ossuaires ont été envoyés dans des laboratoires aux États-Unis et au Canada. Simcha avait été informé, plus tôt dans la semaine, que grâce à la patine, ce « cocon » protecteur, l’ADN avait été préservé et était apparemment extractible.
    — Et de quels ossuaires s’agit-il ? demandai-je.
    — De ceux de Jésus et de Mariamne, répondit Simcha.
    L’ADN de Jésus ? En un pareil moment, le réflexe normal était de tenter de mettre un peu d’ordre dans ce chaos.
    — Imaginons, dis-je, que mes analyses statistiques suggèrent qu’il s’agit bien du tombeau de famille de Jésus. Mais l’ossuaire de Jésus ressuscité ne devrait-il pas être vide ?
    — Pourquoi devrait-il l’être ? Ceux qui croient en la résurrection ne devraient pas être affectés par la découverte de l’ossuaire de Jésus. Dans les écrits gnostiques, Jésus se présente devant les apôtres comme une sorte de fantôme qui apparaît et disparaît à sa guise. Et il continue à se manifester de cette manière pendant presque deux ans après sa mort. En outre, dans les quatre Évangiles canoniques, il est rare que Jésus apparaisse sous sa forme physique. Certes, Thomas l’incrédule touche les cinq blessures de Jésus, mais celui-ci apparaît aux apôtres alors que les portes de la maison sont fermées (Jean 20,25-31). Les auteurs ont presque l’air de s’excuser, indiquant dès le départ que leur récit paraîtra étrange aux lecteurs. Relisez Luc et Jean, et vous comprendrez ce que je veux dire. Le Nouveau Testament ne nous dit pas que Jésus est monté au ciel dans son intégrité physique. Si l’on croit en une ascension physique, l’idée d’un tombeau de Jésus est dérangeante, mais pas si l’on croit en une ascension spirituelle.
    Selon le chapitre 27 de Matthieu, Jésus mourut sur la croix, au moment où le Shabbat était sur le point de commencer. Un disciple riche et influent, Joseph d’Arimathie, alla voir Pilate, le gouverneur romain, et reçut l’autorisation de descendre le corps de la croix et de l’inhumer avant le coucher du soleil, en accord avec la loi juive 1 . Étant donné que le début du Shabbat était imminent et que les enterrements étaient interdits ce jour-là, Joseph d’Arimathie dut agir très vite : « Il prit le corps, l’enveloppa d’un linceul blanc et le déposa dans un sépulcre neuf qu’il s’était fait tailler dans le roc. Puis il roula une grande pierre à l’entrée du sépulcre, et il s’en alla » (Matthieu 27,57-60).
    Dans la Guerre des Juifs, source non biblique, l’historien Flavius Josèphe raconte comment les juifs crucifiés par les Romains étaient descendus de la croix par leurs coreligionnaires, afin de leur éviter l’indignité de l’absence d’inhumation.
    Selon la coutume, les ossements et le linceul de Jésus devaient être retirés du tombeau environ un an après la crucifixion et l’enterrement. Ensuite, ils devaient être placés dans un ossuaire glissé dans une niche du tombeau de Joseph d’Arimathie, ou bien transférés dans une autre grotte funéraire des collines de Jérusalem.