Le Tombeau De Jésus

étaient des lieux de rencontre où les familles faisaient des offrandes en hommage à leurs ancêtres. On découvre parfois des vases et des coupes, ou des épices et des parfums dans de délicats récipients romains en verre. En revanche, les juifs du I er siècle ne laissaient jamais les restes de leurs défunts se décomposer à l’extérieur du tombeau. IAA 80/500-509 était décidément plein de contradictions. La nature de l’air était elle-même un sujet d’étonnement : tour à tour très humide et très sec, et dans les deux cas oppressant. Le moindre mouvement des archéologues soulevait des particules de poussière, lesquelles, entraînées par les courants d’air, étincelaient comme des essaims de lucioles microscopiques chaque fois que les lampes les frôlaient.
    Amos Kloner n’oublia jamais cet endroit, même si, de temps à autre, dans les années qui suivirent, il a prétendu le contraire. Le curieux symbole au-dessus de la porte de l’antichambre orne d’ailleurs l’ouvrage qu’il a publié sur les tombeaux de Jérusalem 1 . Et pourtant, en 2005, face à la caméra, il a nié à trois reprises que ce tombeau ait eu une réelle importance à ses yeux. Mais ceux qui connaissent le fin mot de l’histoire ne peuvent lui en vouloir.
    En rampant sur des monticules de terra rossa d’un mètre de profondeur, les scientifiques découvrirent, dans trois des quatre murs de la salle, les entrées de six kokhim (« fours » en hébreu), ou loculi en latin, les niches destinées à recueillir les ossuaires. En tâtant le sol de sa main et en éclairant chacune des niches, Gat se rendit compte que cinq d’entre elles contenaient des ossuaires. Il en dénombra dix que les coulées successives de terra rossa avaient partiellement recouverts. Dans l’Antiquité – il était évident que personne n’était entré dans ce tombeau récemment – quelqu’un avait déplacé les pierres de scellement qui auraient dû normalement boucher les kokhim. Cela pouvait signifier que des pilleurs de tombe ou des vandales avaient pénétré dans le tombeau avant l’infiltration de la terra rossa. Pourtant, les ossuaires étaient toujours là, avec leurs couvercles intacts et parfaitement en place, comme si les intrus n’étaient venus ni pour piller ni pour saccager.
    Peu de choses dans ce tombeau étaient familières aux archéologues, à l’exception peut-être de l’architecture. Au-dessus des niches, à l’abri des coulées de terra rossa , deux arcosolia (bancs taillés dans les chambres funéraires) se trouvaient dans les murs nord et ouest. Ces bancs semblables à des autels étaient creusés dans la roche solide des collines de Jérusalem. Gat examina le travail des deux arcosolia et admira le soin apporté aux détails. « Il s’agit d’une grande tombe, sculptée avec beaucoup de soin sous la direction d’une personne qui disposait de moyens financiers conséquents, observa-t-il. Des personnages importants furent certainement enterrés ici. »
    Yoseph Gat était un homme imperturbable. Aussi n’y avait-il aucune excitation dans sa voix, alors qu’il venait sans doute de prononcer l’euphémisme le plus spectaculaire de l’histoire. Il se rapprocha des deux bancs, sortit une petite loupe de sa poche et, pointant sa lampe vers le bas, il nota que les bancs constituaient un piètre environnement pour la préservation des occupants du tombeau. Il ne restait que de petits fragments de membres. Toutefois, les ossuaires toujours ensevelis recelaient des éléments biologiques extraordinaires que la technologie de l’époque ne permettait pas encore d’étudier et qui auraient eu de quoi stupéfier Gat, Braun et Kloner. « Mettons-nous au travail », dit Gat, en distribuant blocs-notes, bêches et pelles.
    Dans un premier temps, personne ne s’intéressa à d’éventuelles inscriptions sur les ossuaires. Le principal souci de Gat était de les extraire de la boue sans les érafler. Gat et Kloner étaient trop occupés à les fixer sur des planches, puis à les hisser à travers l’étroite entrée pour songer à autre chose. En outre, les deux premiers ossuaires, à l’entrée des niches, étaient si incrustés de terra rossa qu’il était impossible de savoir s’ils portaient des épigraphes, et encore plus de les déchiffrer. Gat en apprendrait davantage sur ces coffres quand ils auraient séché au soleil. Un simple coup de brosse pourrait alors révéler d’éventuelles