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Le Troisième Reich, T2

Le Troisième Reich, T2

Titel: Le Troisième Reich, T2 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: William Shirer
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quinze heures.
    Quand il se réveilla, les mauvaises nouvelles arrivées
entre-temps finirent par pousser à l’action le chef suprême de l’armée. Il
donna – trop tard – la permission d’engager la division blindée d’instruction
et la 12e Panzer S. S. Il lança également un ordre célèbre qui a été conservé
pour la postérité dans les dossiers de la VIIe armée :
    16 h 55. 6 juin 1944.
    Le chef d’état-major du commandant en chef à l’Ouest attire
l’attention sur le désir du commandement suprême de voir la tête de pont
ennemie détruite le 6 juin avant la fin du jour, en raison du risque de
nouveaux débarquements de soutien par mer et par air… La plage devra être
nettoyée cette nuit au plus tard.
    Dans l’atmosphère un peu mystérieuse des montagnes de l’Obersalzberg,
d’où Hitler tentait maintenant de diriger la bataille la plus cruciale de toute
la guerre – depuis des mois il ne cessait de dire que la destinée de l’Allemagne
se jouerait à l’Ouest – cet ordre incroyable semble avoir été rédigé avec le
plus grand sérieux, avec le concours de Jodl et de Keitel. Rommel lui-même, qui le transmit par téléphone peu avant cinq heures de l’après-midi,
soit une heure après son retour d’Allemagne, paraît l’avoir pris au sérieux, car
il ordonna à l’état-major de la VIIe armée de lancer à l’attaque « sur-le-champ,
sans se préoccuper si les renforts arrivaient ou non », la 21e Panzer, la seule division blindée allemande en position dans le
secteur.
    Cela, la division l’avait déjà fait sans attendre l’ordre de Rommel. Quand Rommel appela le quartier
général de la VIIe armée et transmit l’ordre d’Hitler, enjoignant de « détruire
avant la tombée de la nuit » la tête de pont alliée (en fait il y en avait
déjà trois), le général Pemsel, à l’autre bout de la ligne, répondit :
    « C’est impossible. »
    En moins de quelques heures, le fameux mur de l’Atlantique, tant
célébré par la propagande, avait été enfoncé. La Luftwaffe, autrefois
si vantée, avait été totalement chassée du ciel, la marine allemande de la mer,
et l’armée s’était laissé surprendre. La bataille était loin d’être terminée, mais
son issue ne faisait plus de doute. « A dater du 9 juin, dit Speidel,
l’initiative appartint aux Alliés. »
    Rundstedt et Rommel décidèrent
qu’il était temps de le dire à Hitler et de lui demander d’en accepter les
conséquences. Ils organisèrent une rencontre, le 17 juin, à Margival, au
nord de Soissons, dans le blockhaus perfectionné qui avait été construit pour
servir de poste de commandement au Führer pendant l’invasion
de la Grande-Bretagne prévue pour l’été 1940, mais n’avait jamais été utilisé. Quatre
ans plus tard, le Seigneur de la Guerre y pénétrait pour la première fois…
    Il était pâle et paraissait n’avoir pas dormi, devait écrire
plus tard Speidel, il jouait nerveusement avec ses lunettes et un assortiment
de crayons de couleur qu’il tenait entre ses doigts. II s’assit, voûté, sur un
tabouret, tandis que les maréchaux restaient debout. Son pouvoir hypnotique
paraissait s’être évanoui. Il leur adressa un salut bref et froid. Puis, d’une
voix forte, il exprima avec amertume son déplaisir devant le succès des
débarquements alliés, essayant d’en rejeter la responsabilité sur les généraux
qui commandaient sur les lieux (19).
    Mais la perspective d’une autre défaite plus terrible encore
donnait courage aux généraux, ou du moins à Rommel, auquel Rundstedt laissa le
soin de parler quand la diatribe d’Hitler à leur encontre subit une pause
momentanée : « Avec une franchise impitoyable, raconte Speidel, qui
était présent, Rommel fit observer… que la lutte était sans espoir contre la
supériorité (alliée) dans les airs, sur mer et sur terre (20) [255] . »
    Pas totalement « sans espoir » pourtant, si Hitler
voulait bien renoncer à l’idée absurde de tenir chaque pouce de terrain, pour
rejeter ensuite les Alliés à la mer. Avec l’assentiment de Rundstedt, Rommel
proposa, au contraire, de se retirer hors de portée de l’artillerie de marine
et d’éloigner les blindés du front pour les reformer en vue d’une bataille
ultérieure livrée « hors de portée des canons de la flotte », et qui
pourrait peut-être entraîner la déroute des forces alliées.
    Le Seigneur de la Guerre ne voulait pas entendre

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