Le Troisième Reich, T2
la Normandie ! » ne cessait-il de répéter à
ses généraux.
Cependant, la partie la plus importante des forces allemandes, aussi
bien en infanterie qu’en blindés, fut retenue au nord de la Seine, entre Le
Havre et Dunkerque. Rundstedt et ses généraux surveillaient davantage le Pas de
Calais que là Normandie et ils y furent encouragés par un certain nombre de
manœuvres de diversion que le haut commandement anglo-américain fit exécuter au
cours des mois d’avril et de mai, ce qui leur donna à penser que leurs calculs
étaient exacts.
La journée du 5 juin s’écoula donc dans un calme relatif, du
moins en ce qui concerne les Allemands. De sévères attaques aériennes
continuèrent à désorganiser les dépôts d’approvisionnement allemands, les
stations radar, les aires de lancement des V-l, les communications et les
transports, mais il en était ainsi nuit et jour depuis des semaines, et ces
attaques ne furent pas plus particulièrement intenses que les autres jours.
Peu après la tombée de la nuit, on apprit au quartier général de
Rundstedt que la B. B. C. de Londres émettait un nombre inhabituel de messages
secrets à l’adresse de la résistance française et que les stations radar
allemandes situées entre Cherbourg et Le Havre étaient brouillées. A vingt-deux
heures, la XVearmée interceptait un message en code de la B. B. C ;
à la résistance française qui, pensait-on, signifiait que l’invasion était sur
le point de commencer. La XVe armée fut alertée, mais Rundstedt ne crut pas
nécessaire d’alerter la VIIe armée. Or, c’est vers les côtes de la partie ouest
de ce secteur, entre Caen et Cherbourg, que les forces alliées s’approchaient à
ce moment même (vers minuit) à bord d’un millier de bâtiments.
Ce fut seulement le 6 juin, à une heure dix du matin, que
la VIIe armée, dont le commandant en chef n’était pas encore revenu d’un
exercice à Rennes, comprit ce qui arrivait. Deux divisions aéroportées
américaines et une division aéroportée anglaise avaient commencé d’atterrir au
beau milieu de son secteur. L’alerte générale fut donnée à une heure trente.
Quarante-cinq minutes plus tard, le général Max Pemsel, chef d’état-major
de la VIIe armée, obtint le général Speidel au téléphone, au quartier général
de Rommel, et lui annonça qu’à son avis il s’agissait bien d’une « opération
de grande envergure ». Speidel, encore sceptique, passa le rapport à
Rundstedt, qui se montra tout aussi hésitant. Les deux hommes croyaient que les
parachutages n’étaient qu’une feinte pour couvrir les débarquements principaux
autour de Calais. A deux heures quarante, Pemsel fut informé que Rundstedt « n’estimait
pas que ce fût une opération importante (18) ».
Et lorsque, peu après l’aube du 6 juin, des nouvelles
commencèrent à lui parvenir, annonçant que sur la côte normande entre la Vire
et l’Orne une immense flotte alliée débarquait de nombreuses troupes, sous le
couvert d’un feu meurtrier des gros canons de marine, le commandant en chef à l’Ouest
ne crut pas encore qu’il s’agissait là du véritable débarquement allié. Selon
Speidel, on ne le comprit vraiment que dans l’après-midi du 6 juin. A ce
moment, les Américains avaient pris pied sur deux plages et les Anglais sur une
troisième, et ils avaient pénétré à l’intérieur sur une profondeur de 3 à 9
kilomètres.
A six heures du matin, Speidel avait téléphoné à Rommel, chez
lui, en Allemagne, et le maréchal était reparti à vive allure sans voir Hitler.
Cependant, il ne devait parvenir au quartier général du groupe d’armées B que
tard dans l’après-midi [254] .
Entre-temps, Speidel, Rundstedt et le chef d’état-major de ce dernier, le
général Blumentritt, s’étaient entretenus au téléphone avec l’O. K. W., qui se
trouvait alors à Berchtesgaden.
Conformément à un ordre stupide donné par Hitler, le commandant
en chef des forces de l’ouest lui-même ne pouvait utiliser les réserves
blindées sans une autorisation personnelle du Führer. Quand, au début de la
matinée du 6, les trois généraux implorèrent la permission de lancer deux
divisions blindées vers la Normandie, Jodl répliqua qu’Hitler désirait tout d’abord
voir comment la situation allait se développer. Là-dessus, le Führer alla se
coucher, et les frénétiques appels des généraux de l’Ouest ne purent troubler
son repos avant
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