Le Troisième Reich, T2
d’un front de 280
kilomètres, de la mer du Nord à la ligne Maginot, les troupes nazies
franchissaient les frontières des trois petits États neutres, Hollande, Belgique
et Luxembourg, et l’Allemagne violait brutalement la parole solennellement
donnée et réitérée.
LA GUERRE DE SIX SEMAINES
(10 MAI-25 JUIN 1940)
Pour la Hollande, ce fut une guerre de cinq jours. En fait, dans
ce bref laps de temps, le sort de la Belgique, de la France et du Corps
expéditionnaire anglais fut déjà décidé. Pour les Allemands, tout marcha selon
le manuel, et même mieux, sur le double plan de la stratégie et de la tactique.
Leur succès dépassa les espoirs les mieux fondés d’Hitler. Ses généraux étaient
confondus par la rapidité vertigineuse et l’étendue de leurs propres victoires.
Quant aux chefs alliés, ils furent vite paralysés par des développements qu’ils
avaient à peine soupçonnés et ne pouvaient pas – dans la confusion qui suivit –
comprendre.
Winston Churchill lui-même, nommé chef du gouvernement le
premier jour de la bataille, était sidéré. Il fut réveillé le 15 mai à
sept heures trente du matin par un appel téléphonique du président du Conseil, Paul
Reynaud, qui lui dit d’une voix émue : « Nous avons subi une défaite !
Nous sommes battus ! » Churchill refusa de le croire. La grande armée
française écrasée en une semaine ? C’était impossible. « Je ne
compris pas, écrivit-il plus tard, l’importance de la révolution produite depuis
l’autre guerre par l’incursion d’une masse rapide de blindés (6). »
Les chars – 7 divisions concentrées en un seul point, le plus
faible des défenses occidentales – c’étaient eux qui avaient fait le travail, eux
et les Stukas, bombardiers en piqué, les parachutistes et les troupes
aéroportées qui atterrirent loin derrière les lignes alliées ou sur les forts
apparemment imprenables pour bouleverser de fond en comble le dispositif allié.
Et cependant, nous qui étions à Berlin, nous nous demandions
comment cette tactique allemande avait pu être une surprise aussi totale pour
les chefs alliés. Les troupes d’Hitler n’avaient-elles pas démontré leur
efficacité dans la campagne de Pologne ? Là-bas, les grandes percées qui
avaient permis d’encercler et de détruire les armées polonaises en moins d’une
semaine avaient été effectuées en massant les blindés après que les Stukas
eurent affaibli la résistance.
Parachutistes et troupes aéroportées n’avaient pas fait de bon
travail en Pologne, même à l’échelle très limitée à laquelle ils avaient été
utilisés ; ils n’avaient pas réussi à s’emparer des ponts-clefs intacts. Mais
en Norvège, un mois avant l’assaut à l’Ouest, ils avaient été prodigieux, s’étaient
emparés d’Oslo et de tous les terrains d’aviation, avaient renforcé les petits
groupes isolés amenés par mer à Stavanger, Berger, Trondhjem et Narvik et leur
avaient permis de tenir. Les commandants alliés n’avaient-ils donc pas étudié
ces campagnes et n’en avaient-ils pas tiré la leçon ?
LA CONQUÊTE DES PAYS-BAS
Les Allemands ne pouvaient disposer que d’une seule division
blindée pour la conquête des Pays-Bas, qui fut réalisée en cinq jours, en
grande partie par des parachutistes et des troupes amenées par air à l’arrière
des régions inondées, ces verrous liquides dont beaucoup, à Berlin, avaient cru
qu’ils arrêteraient les Allemands pendant des semaines. A la Hollande stupéfiée
était réservée l’expérience de la première attaque aéroportée de grande
envergure dans l’histoire de la guerre. Si l’on considère l’impréparation des
Hollandais à une telle épreuve et leur surprise totale, ils résistèrent mieux
qu’on ne le comprit à l’époque.
Le premier objectif des Allemands était de déposer une force
importante sur les terrains près de La Haye, d’occuper la capitale tout de
suite et de s’emparer de la reine et du gouvernement, comme ils avaient essayé
de le faire un mois plus tôt en Norvège. A La Haye, comme à Oslo, le plan
échoua, mais par suite de circonstances différentes. Revenue de sa première
surprise et de son désarroi, l’infanterie hollandaise, soutenue par l’artillerie,
put chasser les Allemands – deux régiments – des terrains d’aviation autour de
La Haye dans la soirée du 10 mai. Cela sauva momentanément la capitale et
le gouvernement, mais immobilisa
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