Le vatican indiscret
Conseil de la couronne, pas toujours secret, avec lequel le Pape décide, par exemple, quel sera le jour où l’on fêtera une canonisation… On votait naguère en soulevant son chapeau à large bord et galons rouge et or. Le consistoire, cérémonie très formelle, est plus rarement convoqué par le Saint-Père, lorsqu’il veut connaître l’avis du collège cardinalice avant de prendre une décision sur les sujets importants ou lors des nouvelles créations cardinalices. En sept ans, Benoît XVI a organisé cinq consistoires : en novembre 2006, novembre 2007, novembre 2010, février 2012 et enfin en novembre 2012, et créé quatre-vingt-dix cardinaux. Ce système se justifie dans la mesure où le Pape choisit surtout des hommes de confiance qui lui doivent une grande loyauté. Mais le moment le plus intense et émouvant pour un cardinal, s’il a moins de 80 ans, reste celui où il entre en conclave dans la chapelle Sixtine et vote pour le successeur de Pierre. En dehors de cette parenthèse historique, le cardinal est de nos jours une personne presque comme les autres, même si la garde suisse lui présente les honneurs quand elle le croise. Mais ne croyez pas pour autant que, lorsqu’ils se rencontrent, les cardinaux se racontent des histoires de cardinaux. Lorsqu’un archevêque d’un grand diocèse devient cardinal, cela ne signifie pas nécessairement qu’il aura plus de pouvoirs qu’auparavant. En revanche, quand un préfet d’une Congrégation romaine accède à cette haute dignité, cela lui confère sûrement davantage d’autorité, de respect, de considération, puisqu’il est censé avoir des relations plus étroites qu’auparavant avec le Saint-Père et être membre de son « état-major ». Prenez le cas original de Jean-Marie Lustiger. Il n’avait pas besoin d’être créé cardinal pour être reconnu, mais le simple fait que Jean-Paul II l’ait nommé archevêque, puis l’ait ensuite fait rapidement cardinal, marquait un signe supplémentaire de l’estime qu’il lui portait. Cette dignité, pour la majorité d’entre nous, symbolise surtout l’estime du Saint-Père pour la qualité de notre travail dans les institutions de l’Église. Une reconnaissance qui nous vaut considération, honneurs… et nous rend sans doute vaniteux… Mais comment pourrait-on objectivement y échapper ? ».
Des cardinaux, dont bon nombre étaient autrefois issus de l’aristocratie et de la haute bourgeoisie, appartiennent maintenant à la moyenne bourgeoisie voire parfois à des milieux modestes. Exception faite du cardinal autrichien Christoph Schönborn, né dans une illustre famille du Gotha, et de l’aristocratique Andrea Cordero Lanza di Montezemolo, dont on dit ici : « Che il suo nome non finiche mai ! » Traduisez : « Dont le nom ne finit jamais ! »
« Un jeune prêtre ambitieux qui n’est pas encore entré dans le saint des saints a-t-il des chances de devenir cardinal ? » ai-je demandé à l’un des principaux collaborateurs de Benoît XVI, lui-même arriviste, qui a accepté de répondre sous couvert d’anonymat. « Ce serait trop simple ! Même si certains tentent opportunément et avec audace de tracer leur voie, la route est longue et souvent semée d’embûches… » Il sait de quoi il parle ! « Les sévères membres du Sacré Collège repèrent immédiatement les carriéristes et les intrigants. Notre univers est particulier, silencieux, sévère, à certains égards impitoyable. Il faut parfois avoir le talent de se faire remarquer tout en sachant rester discret, modeste, ne pas faire de bruit… Un savant dosage qui requiert beaucoup de finesse, de subtilité, de diplomatie et d’entregent. Comme ailleurs, certains hauts prélats sont très personnels, parfois sournois, c’est humain. Mais on rencontre surtout des gens prudents, dévoués, qui s’impliquent énormément et avec peu de moyens. Un dicastère, ce sont vingt personnes autour de leur chef, et quand on demande au cardinal à sa tête combien de personnes travaillent au Vatican, il répond toujours de façon évasive et un ange passe… Je crois aussi qu’à ces niveaux-là l’expérience l’emporte largement sur les ambitions… » Comme l’explique le cardinal Barbarin : « Si, pour ma part, j’ai su dès l’âge de 15 ans que je voulais devenir prêtre, je n’ai jamais imaginé que je siégerais un jour dans la chapelle Sixtine ! Et plus tard, quand cela m’est
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