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L'Église de Satan

L'Église de Satan

Titel: L'Église de Satan Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Arnaud Delalande
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guerre semble bien d’ordre
eschatologique. Il n’y aurait rien d’étonnant à ce qu’il ait suscité tant de
morts, en rencontrant ces esprits encore pétris des visions de l’An Mil et de
celles de saint Jean. Comme si l’Église avait eu connaissance de ce secret, qui
prenait pour elle le visage absolu du Dragon, causant un schisme sans précédent,
qui aurait à la fois constitué, soudé et débordé les Églises cathares d’Europe.
Un secret arrivé d’Orient, un secret diabolique, inadmissible aux yeux de Rome
et déposé à Montségur…
    Mais sa nature exacte reste incompréhensible.
    Les hérétiques, fils de Satan…
    Je me demande à présent : quel est
le lien entre tout cela ?
    Bien à toi, Antoine. »

10 Louve ________________________ 1210-1213
    « Ainsi fus-je moi-même jeté parmi les loups
    Et pour ma Louve drapé comme l’agneau.
    Je pris le bâton, la bible et le méreau
    Pour marcher vers le ciel. »
    ESCARTILLE DE PUIVERT,
    Chanson albigeoise, « le Livre de Vie ».
    Le départ de Carcassonne signifia pour Escartille
le début d’une longue errance au milieu de toutes les atrocités.
    Montfort ! Désormais, ce nom errait
sur toutes les bouches. Depuis la défaite de Trencavel, le titre de vicomte de
Béziers et de Carcassonne était vacant. Un titre dont les grands barons de
France ne voulaient pas, conscients que l’entreprise engagée en Occitanie
violait le droit féodal au profit de l’Église, et que le contrôle de ces domaines
serait plus que jamais difficile. Une commission composée de deux évêques et de
quatre chevaliers avait donc désigné Simon de Montfort, qui venait d’accepter
la tâche impossible de conforter l’autorité catholique en Occitanie, à la
condition de pouvoir recourir à tout instant au bras des croisés. L’ost
français, en effet, n’était composé que de soldats de passage ; sitôt
achevée la quarantaine, ils plieraient bagage. Il faudrait renouveler les
effectifs. Montfort, en terre de conquête, ne pouvait compter que sur la force
pour faire valoir ses positions. Toulouse demeurait, et si Raymond VI avait
perdu des pièces maîtresses, Montfort savait que le cadeau qu’on venait de lui
faire avait tout de la récompense empoisonnée. L’homme qui, quelque temps plus
tôt, n’avait pour fief que ses terres d’Île-de-France s’empressa de s’arroger
le soutien des moines de Cîteaux, leva un cens de trois deniers par feu pour en
faire hommage au pape, arpenta ses domaines en triomphateur et obtint à son
tour l’hommage des consuls et des vicomtes depuis Béziers jusqu’à Castres et à
Limoux.
    Escartille n’avait guère eu de mal à se
trouver un nouveau destrier au milieu de la débâcle de Carcassonne. Proie
facile sur ces routes dangereuses, il se rendait d’un bourg à un autre, d’une
cité à l’autre ; il avait d’abord voulu se rendre à Toulouse, dans l’espoir
d’y retrouver Aimery et Léonie. Mais plusieurs personnes lui avaient indiqué qu’après
la prise de Carcassonne, les routes principales vers la ville comtale avaient
été coupées. Le troubadour était sans cesse contraint à maints détours ; et
sitôt qu’il parvenait à une destination, il devait caracoler vers une autre. C’était
comme si Léonie elle-même s’évertuait à brouiller les pistes. Arrivé non loin
de Mirepoix, il récolta plusieurs nouvelles, de la bouche d’un ancien bourgeois
émigré de la ville des Trencavel, qui connaissait Léonie. Il disait l’avoir
aperçue se dirigeant avec ses sœurs, non vers Toulouse, mais vers le château de
Lavaur. Escartille décida donc de faire un premier crochet dans cette direction.
Il priait à chaque instant pour que tout se passe bien et qu’il retrouve Aimery
sain et sauf. Une autre information, enfin, avait achevé de le jeter dans une
profonde tristesse : Puivert, le beau et doux château de Puivert, celui
des amants et de la poésie, était tombé aux mains de Montfort.
    Alors qu’il chevauchait, Escartille pensait
aux paroles que Trencavel lui avait soufflées sous le pavillon ennemi : Par
Dieu, que ce crime odieux ne reste pas impuni. Va prévenir mon oncle, le comte
de Toulouse, et raconte-lui ce qui s’est passé. C’est sur vous que repose
désormais le destin de l’Occitanie ! Sans doute, aujourd’hui, Raymond VI
savait-il ce qui était réellement advenu. On murmurait qu’il continuait de
correspondre activement avec le roi d’Aragon et que, peut-être,

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