L'énigme des vampires
répandu sur la
terre lorsqu’ils combattent les éléphants ( sic ).
Le Moyen Âge a répercuté cette fable et s’est rendu coupable d’une confusion supplémentaire
en prêtant à la substance médicamenteuse l’origine que Pline reconnaissait au
colorant [124] ». Au fait, toujours
d’après Pline l’Ancien, les druides ne composaient-ils pas une sorte de panacée
universelle avec le gui des chênes, ou de tout autre arbre considéré
symboliquement comme un chêne ? Or, le chêne passait, dans toute l’Antiquité,
pour être la représentation de Zeus, la divinité la plus puissante. Les druides
savaient ce qu’ils faisaient en recueillant le gui de chêne : celui-ci n’est-il
pas une plante-vampire suçant la sève de l’arbre sans lequel il ne pourrait
survivre ? Et l’on sait que la sève est l’équivalent exact du sang. Alors,
sève végétale ou sang animal, ce que boivent les vampires, c’est l’énergie divine,
ou tout au moins ce qui anime un être qui relie le monde visible au monde
invisible : le Chêne relie la Terre au Ciel ; le Christ sur la Croix
relie l’Homme au Dieu-Père ; le Dragon – ailé, et peu importe que ses
ailes soient blanches ou noires – relie l’être terrestre à sa dimension
supérieure, que celle-ci soit céleste ou infernale. Baudelaire l’avait dit :
« Enfer ou Ciel, qu’importe ? Au fond de l’inconnu pour trouver du nouveau… »
Et ce nouveau, c’est le renouvellement , la
perpétuelle survie d’un être attaché à la terre, qui ne veut pas la quitter, et
qui utilise toutes les vitalités qui l’entourent pour survivre désespérément, malgré
la malédiction dont il est l’objet.
Car il s’agit d’une lutte contre la nature, une lutte qu’on
pourrait qualifier de satanique parce qu’elle paraît contradictoire avec les
desseins de Dieu. Mais les desseins de Dieu sont impénétrables : ils sont
transmis aux êtres humains sous forme codée, sous forme d’images et de symboles.
Qui peut se vanter de les décrypter à la perfection ? Beaucoup de jeunes
gens se lancent dans une quête passionnée du Dragon afin de le tuer, de lui
prendre son sang (ou ses substituts) et de le boire. Peu d’entre eux
réussissent. Voilà pourquoi il y a tant de pieux sur lesquels sont fichées des
têtes coupées aux abords de la forteresse interdite.
Certains réussissent cependant. Dans le récit gallois de Peredur , le héros, qui est au départ un niais
inexpérimenté, se trouve confronté à des rencontres terrifiantes dont il
mésestime la portée. Quand il combat l’énigmatique addanc ,
qui a tout l’air d’être un dragon, dans sa caverne, il obtient heureusement l’aide
d’une femme qui déclare être l’Impératrice et qui lui procure une pierre d’invisibilité,
lui permettant de surprendre le monstre sans être vu par lui. En somme, l’Impératrice
du récit gallois est l’équivalent de l’Odin, cet éternel errant, qui vient
donner ses conseils à Sigurd à l’instant fatidique. Et quand Peredur se trouve
engagé dans un autre combat contre un Serpent dont la queue contient une pierre
merveilleuse, il n’hésite pas non plus : il se lance dans l’aventure. Il
parvient à tuer le monstre et à s’emparer de la pierre. Or la particularité de
cette pierre est de procurer autant d’or qu’on en veut. C’est une sorte de
Pierre philosophale. Mais c’est bien évidemment le Sang du Dragon. Cependant, Peredur
ne la garde pas pour lui : il la donne à son compagnon d’armes, manifestant
ainsi un altruisme qui n’est pas courant chez les vampires. Car, malgré tout, Peredur,
héros du Graal (mais d’un Graal païen), est un vampire qui se nourrit du sang
des autres, et comme tous les acteurs de la tragédie du Graal, il est hanté par
le sang.
Or la Vie, dans sa plénitude et sa totalité, a été perdue, selon
la Genèse , au moment où Adam et Ève, ayant
goûté au fruit de l’Arbre de la Connaissance, ont été chassés du Paradis, donc
éloignés de l’Arbre de Vie, cet arbre mystérieux qui se trouve au centre de l’Éden.
Cette notion d’Arbre de Vie a été largement répandue dans la plupart des
traditions sacrées. Au Moyen Âge, on le nomme souvent l’ Arbre Sec , et le pays merveilleux où il étend ses
ramures est le mythique Royaume du Prêtre Jean. Et cet Arbre Sec dispense tous
les baumes et tous les parfums qui procurent la guérison et l’immortalité. Mais
cet Arbre est gardé par le
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