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L'énigme des vampires

L'énigme des vampires

Titel: L'énigme des vampires Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean Markale
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traditionnelle, développe ce thème
dans la tonalité la plus romantique qui soit. L’ Homme
errant est condamné à ne jamais trouver le repos à cause d’une faute inexpiable
qu’il a commise autrefois. Mais, comme c’est le cas dans la Fin de Satan de Victor Hugo, un espoir subsiste
et l’Esprit des Ténèbres peut se réconcilier avec l’Esprit de Lumière : Melmoth
peut être sauvé par l’amour pur et désintéressé d’une femme. Il en est de même
dans le Vaisseau fantôme de Richard Wagner. En
fait, cette problématique de la réconciliation finale des extrêmes est héritée
du manichéisme antique et se réfère bien souvent à des notions métaphysiques en
honneur chez les Cathares. Les Romantiques, épris d’absolu, ne pouvaient pas ne
pas être sensibles à cette spéculation optimiste. On a vu que, dans le Dracula de Stoker, tout vampire, fût-il le plus
monstrueux, peut retrouver la paix éternelle et lumineuse lorsqu’on accomplit
sur lui l’exorcisme qui le libère de sa malédiction. Quand, sur l’invitation de
van Helsing, Arthur Holmwood perce, avec un pieu, le cœur de sa fiancée Lucy, ce
n’est même plus un exorcisme, c’est un acte d’amour, et le plus beau qui soit, puisqu’il
procure à l’être aimé le bonheur éternel. Et, au fond, quand on y réfléchit, l’exorcisme
de Dracula peut lui aussi être considéré comme un acte d’amour et de salvation
en même temps qu’un geste de défense contre les forces obscures. Dans les
légendes populaires, il suffit toujours qu’un humain accomplisse un geste de
charité totalement désintéressé pour sauver une âme en peine. C’est l’aspect blanc du Romantisme.
    Mais ce même Romantisme revêt aussi un aspect noir, particulièrement
net dans toute l’œuvre d’Edgar Allan Poe, un Américain qui a conservé la
mémoire ancestrale de l’Écosse et de l’Irlande, mais qui est peut-être
incapable de réaliser l’équilibre dans le combat séculaire qui oppose l’Archange
au Dragon. Et c’est surtout dans deux de ses Histoires
extraordinaires qu’apparaît le thème du vampirisme : le Portrait ovale et Morella .
Dans le second de ces récits, le narrateur décrit une femme, Morella, qu’il
aime passionnément bien qu’elle soit fort étrange : « L’érudition de
Morella était profonde… ses talents n’étaient pas d’un ordre secondaire ; la
puissance de son esprit était gigantesque. » Mais l’attirance que le
narrateur a envers Morella, devenue sa femme, est un véritable envoûtement.
« Je devins son écolier, dit-il ; je m’abandonnai aveuglément à la
direction de ma femme, et j’entrai avec un cœur imperturbé dans le labyrinthe
de ses études. Et alors, – quand, me plongeant dans des pages maudites, je
sentais un esprit maudit qui s’allumait en moi, – Morella venait, posant sa main
froide sur la mienne et ramassant dans les cendres d’une philosophie morte
quelques graves et singulières paroles qui, par leur sens bizarre, s’incrustaient
dans ma mémoire. Et alors, pendant des heures, je m’étendais, rêveur, à son
côté, et je me plongeais dans la musique de sa voix – jusqu’à ce que cette
mélodie à la longue s’infectât de terreur. » On ne peut mieux décrire un
état de vampirisme passif… La crise parvient à son point extrême : « Le
temps était maintenant arrivé où le mystère de la nature de ma femme m’oppressait
comme un charme. Je ne pouvais plus supporter l’attouchement de ses doigts
pâles, ni le timbre profond de sa parole musicale, ni l’éclat de ses yeux
mélancoliques. » Et Morella va d’ailleurs mourir en donnant naissance à
une fille. Mourir ? Peut-être pas : « Je vais mourir, dit-elle, cependant je vivrai . » Et le narrateur élève l’enfant.
« Elle grandit étrangement en taille et en intelligence, et devint la
parfaite ressemblance de celle qui était partie. » Mais le narrateur n’a
donné aucun nom à sa fille. Or, un jour, il est obligé de lui en choisir un.
« Qui m’inspira alors d’agiter le souvenir de la morte enterrée ? »
Car c’est finalement le nom de Morella qu’il donne à sa fille. Et lorsqu’il
prononce le nom, la fille meurt immédiatement. « De mes propres mains, je
la portai à sa tombe, et je ris d’un amer et long rire quand, dans le caveau où
je déposai la seconde, je ne découvris aucune trace de la première – Morella. »
    Cette histoire se passe de tout commentaire. Dans

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