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L'énigme des vampires

L'énigme des vampires

Titel: L'énigme des vampires Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean Markale
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sorcière qui hante le sabbat et qui est soumise au dieu
des Ténèbres, Satan, dont elle doit subir l’étreinte vampirique. Et en vertu de
cette étreinte, elle est vouée à répandre le « mal » autour d’elle :
elle « noue les aiguillettes », c’est-à-dire qu’elle rend impuissants
les hommes ; elle rend stériles les femmes et les femelles d’animaux ;
elle dessèche les gens, les bêtes et les végétaux jusqu’à dépérissement et mort.
Le thème vampirique est toujours présent, puisqu’elle est censée agir au nom de
l’Ennemi, lequel ne peut survivre qu’en absorbant le sang du monde, l’énergie
dont Dieu l’a privée au moment de sa chute. Dans cette optique, il faut
considérer le Diable comme le seul et unique vampire, les maudits et les
sorcières n’étant que ses esclaves dévoués. Le comte Dracula de Stoker serait
donc une incarnation du Diable, régnant sur un domaine marginal, dérisoire, négatif,
au milieu de son harem du château des Carpates, mais prêt à une action d’envergure
pour peupler son « enfer » à lui des créatures qu’il subjugue et dont
il fait ses esclaves, de préférence des femmes, puisque la relation
hétérosexuelle s’opère dans de meilleures conditions que la relation homosexuelle,
condamnée à la fois par la nature et par la société.
    La sorcière est donc une mante religieuse dont la polarité sacrée
– toujours existante, puisque le sacré est ambivalent – a été inversée. Faire le mal n’est pas tellement différent de faire le bien  : les méthodes et les rituels
sont les mêmes, et ce qu’on appelle une « messe noire » n’est qu’une
messe habituelle, célébrée par un prêtre authentique, mais à rebours pour bien montrer que le sens qu’on lui
donne est entièrement inversé. L’humanité, depuis que le monde est monde, a
toujours été prise entre ces deux directions, le symbole de l’Arbre de la
Science du Bien et du Mal en étant une incontestable preuve, malgré les
nombreuses divergences d’interprétation qu’il provoque. Mais le mot « sorcière »
peut avoir tous les sens, du plus péjoratif au plus exaltant, et la femme
classée ainsi n’est pas forcément laide, boiteuse, difforme et vieille : le
très beau film du Danois Carl Dreyer, Jour de colère ,
en est un éclatant exemple. Dépréciée, inféodée aux puissances diaboliques, elle
est toujours « maîtresse des sorts », sorte de Destin qui puise dans
les êtres le sang symbolique qui permet toutes les métamorphoses. En Inde, Kâli
la Noire, aux lèvres sanglantes, et qui réclame constamment des victimes – et
dont la comtesse Bathory peut constituer une incarnation dans le temps –, n’est
que l’aspect inversé de la Vierge de Lumière, celle qui, dans le Christianisme,
deviendra la Théotokos .
    À cet égard, un épisode du cycle arthurien peu connu, qui
est intégré dans l’un des manuscrits les plus tardifs (XV e  siècle) du Roman de
Tristan en prose, est tout à fait significatif. En fait, il ne s’agit
pas d’une aventure arthurienne, mais d’un conte sans doute d’origine populaire
qui, comme de nombreux récits de ce genre, a été réuni à la rédaction
définitive (si tant est qu’elle puisse être définitive !) du schéma
primitif de l’épopée. C’est l’épisode dit de la Bête
glatissante [83] . Le personnage
principal est la fille d’un roi, une « demoiselle bien instruite et bien
élevée. À vingt ans, elle devint si savante et si érudite qu’elle répondait à
toutes les questions qu’on lui posait. Aucune science, cependant, ne lui
plaisait autant que la magie noire ».
    Voici donc une aimable sorcière. Le malheur, tout au moins
pour le rédacteur du texte, c’est qu’elle tombe amoureuse de son frère et que
celui-ci, au lieu de succomber à ses charmes, se retranche derrière le vœu de
virginité qu’il a prononcé. Quelque peu honteuse, la jeune fille ne parvient
pas néanmoins à se guérir de son violent amour, sentant probablement en elle
que l’inceste absolu, qui est celui du frère et de la sœur, est l’aboutissement
logique de la recherche de l’androgynat primitif auquel tentent d’accéder, sur
des plans différents, la magie et l’alchimie. C’est alors qu’un « beau
ténébreux » vient la trouver, en qui on reconnaît facilement le Diable. Comme
la jeune fille était sur le point de se tuer, il lui rachète en somme sa vie, lui
promettant que son frère

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