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L'enquête russe

L'enquête russe

Titel: L'enquête russe Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-François Parot
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police.
    — Par M. de Sartine.
    — Comment, par Sartine ? Que signifie cela ?
    — C’est que, dit timidement Le Noir, qui froissait un papier, il a souhaité introduire des gens à lui en ce jour décisif… pour vérifier… enfin vous comprenez.
    Nicolas se leva et se mit à arpenter le bureau, frappant ses poings l’un contre l’autre.
    — Comprendre ! Que dois-je comprendre ? Qu’on me signifie au moment où l’action s’engage, avec tous ses aléas, que le plan est modifié, qu’on y introduit sans raison des éléments incertains ? Pour quelle nouvelle alchimie ? Pour quelle douteuse comédie qui s’achèvera, je vous le prédis, en tragédie. Quelle fantaisie hors de gamme ose s’introduire dans ce jeu dangereux ? Quelle malsaine suspicion empiète 45 nos préparatifs ? Doute-t-il de l’habileté de gens qui tirent depuis vingt-trois ans les marrons du feu à son service ? Comment lui qui jamais, au grand jamais, ne goûta la cuisine de nos enquêtesse trouve-t-il bon sur ce coup-ci de s’en mêler au risque de gâter la sauce ? Et cela sans avertir ceux qui en portent la responsabilité et qui, le cas échéant, en supporteraient l’échec. Un caprice sans consultation peut tout faire échouer. Je ne sais ce qui me retient de tout abandonner et de me retirer à Ranreuil sur mes terres à faire le bonheur de mes paysans. Dès le début, j’ai jugé que cette affaire était mal engagée, car d’une action condamnable, il ne peut en justice sortir du bien et nous paierons la folle enchère 46 de cette bêtise, qu’aggrave encore ce que vous venez, monseigneur, de m’apprendre.
    Chacun baissait la tête, pétrifié par une fureur à laquelle Nicolas Le Floch, marquis de Ranreuil, n’avait guère habitué ceux qui pourtant le connaissaient depuis longtemps. Accablé, Bourdeau baissait la tête, Gremillon s’était reculé dans le recoin d’une croisée, et Le Noir torturait sa tabatière.
    — Allons, finit par dire ce dernier, je comprends votre irritation, mais enfin vous connaissez Sartine. Ce n’est pas la première fois qu’il coupe nos brisées et les piétine. Il faut le prendre et le supporter comme il est. Que n’ai-je subi moi-même, vous le savez bien ? Alors si vous ne le faites pour lui qui vient de vous manquer, de nous manquer, faites-le pour le roi et, peut-être, aussi un peu pour moi.
    Devant la bonne figure épouvantée et rouge d’émotion, la colère de Nicolas retomba.
    — Allons, vous avez raison, j’aurais dû m’y attendre. Alors cette journée, que devons-nous en apprendre encore ?
    — Euh… Le couple impérial se rendra à l’Académie pour une séance en son honneur. M. de la Harpe lira un éloge en vers du grand-duc. Retourensuite à l’Hôtel de Lévi et, après le dîner, départ pour le Théâtre français, puisque désormais c’est ainsi qu’on le nomme, afin d’assister à la matinée prévue.
    — Bien, dit Nicolas. Égrenons le chapelet de l’action. Gremillon, je vous écoute.
    — Dangeville, commença le sergent d’une voix tremblante, se fond désormais dans la foule des serviteurs de l’ambassade de Russie. Il circule sans être inquiété, connu de tous. Il a découvert, après plusieurs tentatives infructueuses, l’endroit où la broche est conservée. Il pense ne pas avoir de difficultés pour forcer le secrétaire en question. Une fois en possession du joyau, il le placera dans une bourse ouatinée, et le jettera par une croisée à l’un des nôtres, qui le transmettra à Rabouine, lequel, par les arrières des maisons, nous l’apportera. Le tout a été minuté ! Entre le début de l’opération et le bijou entre nos mains, il faudra compter vingt à trente minutes. Dangeville restera à l’hôtel pour ne pas donner l’éveil et y demeurera jusqu’au départ du comte du Nord conformément aux termes de son engagement.
    — Bien. Pour ma part je me rendrai au théâtre pour veiller au grain et, surtout, vous avertir si par hasard le couple princier devait rentrer à l’Hôtel de Lévi avant l’heure prévue. Des messagers en relais sont prévus, je pense ?
    Nicolas accepta de mauvais gré de partager, debout, le frugal dîner de poulet froid que Le Noir avait commandé dans son bureau. Chacun s’efforça de dérider le commissaire qui se cantonna pourtant dans un mutisme boudeur, inhabituel de sa part. Il reprit ensuite sa voiture pour se rendre au Théâtre français, par les quais, le Pont

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