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Les amants de Brignais

Les amants de Brignais

Titel: Les amants de Brignais Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
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concernaient son épouse ou lui-même. Oriabel, c’était le viol, évidemment ; lui, c’était le trépas dans un combat qui peut-être constituerait le second entre-mets. S’il en sortait vainqueur, ce serait l’admission formelle dans la route. Mais qui le provoquerait ? La présence apparemment courtoise de Bagerant faisait obstacle à la plupart des intentions de chicane. Thillebort le haïssait. Tout proche, Nadaillac était, lui aussi, l’aversion incarnée.
    Aymery le considérait comme un marmouset et se demandait ce qu’il valait, une épée en main. Quelque inconcevable que cela parût, Jean Doublet, qui revenait s’attabler tout près de Thillebort, paraissait lui vouer du respect. Il devait avoir vingt-cinq ans. C’était un homme à cheveux ras, au visage rond, gros et lisse, des yeux noirs, rêveurs, une bouche maussade. Son silence, parmi tous ces braillards, eût pu passer pour injurieux s’ils avaient eu plus de discernement. Il répondait par de nonchalantes inclinations de la tête au Bascot de Mauléon et au Bourg de Monsac, ses voisins – deux gros soiffeurs barbus et chevelus, le torse empêtré dans un pourpoint à bossettes de cuivre si ternies, si sales qu’elles semblaient une éruption de furoncles dont ils se fussent l’un l’autre contaminés à outrance.
    – Y aura-t-il un second entre-mets ? demanda Beruchin en suçotant un os qu’un chien n’eût pas mieux déviandé.
    – Oui, dit Aymery. Celui-là, compère, n’est pas de non invention… Je vous en préviens tous dès maintenant. C’est Baudouin III, le roi Franc de Jérusalem, qui en eut l’idée, un jour de liesse à Tabarie… ou Tibériade, pour divertir quelques croisés nouveaux venus en Terre Sainte.
    – Peut-on savoir ? demanda Béraut de Bartan, alléché.
    – Oh ! Oui… Dites-nous-en plus ! supplia Héliot, flagorneur, en cessant de découper un porcelet. Vous êtes un expert en plaisantes sémilles 79  !
    Il était, de toute évidence, favorable à une ascension dans la hideur.
    – Je ne mets pas en doute, compère Aymery, ta faculté de nous montrer des entre-mets agréables, commença le Bourg de Breteuil. Je me dis qu’il est dommage que notre compère Aymerigot Têtenoire ne soit pas des nôtres… Même en ces jours où nous eûmes le feu au cul, pourchassés par les gens de guerre, il nous en inventa qui nous égayèrent fort ! Ces filles qu’on a jetées…
    – Tais-toi ! commanda Aymery.
    Un homme ventru, à tête brune, ronde, se leva :
    – Moi, Seguin de Badefol, seigneur de Castelnau et Berbiguières, prud’homme de la Maison de Gontaut…
    – Prud’homme de mon cul ! grommela Bagerant à la seule intention de Tristan. Heureusement, il n’est que de passage.
    – Moi, Seguin, puis vous garantir moult solas (276) tels que ceux de Beauvais et Soissons, Dôle ou Besançon…
    – Non ! aboya Garcie du Châtel. Retourne d’où tu viens ! Nous sommes ce jour d’hui au mariage d’un valeureux compère ! Ayons respect pour lui et pour son épousée ! Mange et va-t’en demain retrouver tes compères !
    Seguin de Badefol se laissa retomber sur son banc et, se penchant, glissa quelques mots à l’oreille d’Arnaud de Thillebort qui les approuva d’une lippe et d’un cillement de son œil unique sans oser formuler à haute voix les objections qui dansaient dans sa tête. Puis son intérêt se concentra sur Oriabel, seule femme pour laquelle on se priverait d’un agrément de choix :
    – Cette porteuse de dards et de couillonnades est belle, pas vrai ? Aussi belle que toi, dit-il en frottant sa paupière comme pour raviver, à l’intérieur, l’image de la captive. Est-il vrai que cette Mathilde est baronnesse ?
    – Oui, dit Héliot. Oui !… Oui !
    Une vague fureur s’éleva chez ce malandrin ; pire même : un vertige de haine envers sa condition plus qu’en la convoitise d’un Thillebort ou d’un autre.
    – C’est ma prise !… Je n’y ai pas encore touché !… C’est ma prise d’il y a six jours… Je l’avais mise en sûreté et n’ai pas eu le temps de m’en occuper. Mais se soir…
    Il y eut le fracas d’un poing heurtant la table.
    – C’est du gros fretin dont tu t’es emparé, foi de Thillebort. Elle ne saurait être pour toi ! Tu n’es qu’un écuyer…
    – Elle lui appartient, déclara lentement Bagerant. Certes, il n’eut aucun mal à s’en saisir : elle courait après son chien, à la tombée du jour,

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