Les amants de Brignais
1364, le médiateur étant Arnaud Amadieu, seigneur d’Albret, entre les gouverneurs du duc de Berry et d’Auvergne, le comte de Boulogne et d’Auvergne, le dauphin d’Auvergne et Seguin de Badefol. La rançon qu’il exigeait pour se tenir tranquille était de 3 000 florins. Ils furent empruntés au cardinal de Beaufort… qui devint Pape en 1370 sous le nom de Grégoire XI.
Emerveillé par les exploits de Seguin de Badefol, Charles de Navarre le fit venir en sa Cour sous prétexte de le prendre à sa solde, mais en réalité pour s’approprier le trésor qu’il transportait toujours avec lui à dos de mules. Il l’accueillit avec des démonstrations d’amitié et lui fit servir un repas magnifique, terminé par en dessert de coings et de poires sucrés préparés par Guillemin Petit, son valet. Seguin ne tarda pas à être pris d’un violent accès de colique et mourut à Pampelune même, dans des souffrances terribles.
La mort du Mauvais fut aussi terrible. Froissart raconte qu’il avait quitté le lit d’une « belle damoiselle unie » quand il s’en retourna dans sa chambre tout frileux. Une fois couché, des tremblements violents le p rirent, de sorte qu’il demanda qu’on lui chauffât les draps avec une bassi ne d’eau ardente (de l’eau-de-vie), laquelle prit feu et qu’il fut tout ars (brûlé) jusqu’à la boudine (!), de sorte qu’il mourut au bout de quinze ours. La Chronique de Saint-Denis et Juvénal des ursins rapportent qu’il s’était enveloppé dans des draps souillés d’eau-de-vie, cousus autour de lui , et que le valet qui le cousait ainsi, pour couper le fil, approchas sur celui-ci une chandelle allumée. Tout prit feu : les draps et l’homme. Le roi vécut trois jours, « criant et brayant, en très grandes et âpres douleurs » et trépassa.
Favin, dans son Histoire de la Navarre semble toucher la vérité de plus près. Selon lui, la bassine d’airain de Froissart, qui soufflait un air volant, et ces draps mouillés sur lesquels le feu se répandit, annonçaient tout simplement que le roi de Navarre, consumé de maladies honteuses, était obligé d’employer des fumigations et des bains sulfureux, et qu’il périt du double effet d’un refroidissement accidentel et de la débauche.
Ainsi mourut, le 1 er janvier 1386 (ancien style) ou 87 (nouveau style) Charles de Navarre. Il avait 55 ans deux mois, vingt-deux jours. Et les communications entre la Navarre et Paris étaient telles que le 2 mars, deux mois après sa mort (donc sans qu’il en eût été informé), Charles VI faisait entamer son procès, comme à un vivant, par la cour des pairs.
DE SINISTRES HÉROS
On conçoit que des personnages aussi répugnants que les routiers n’aient point eu d’historiens – sauf, évidemment, l’Archiprêtre qui trouva en Aimé Cherest un hagiographe consciencieux. Voici donc quelques indications supplémentaires concernant certains héros de Brignais et leurs comparses :
Seguin de Badefol : c’était un des quatre fils légitimes de Seguin de Gontaut, sire de Badefol. Marié le 15 juin 1329 à Marguerite de Berail. Seguin de Gontaut, père du routier, eut trois autres fils : Jean, Pierre. Gaston que peut-être on avait surnommé Tenet ou Hélie, ainsi qu’une fille, Dauphine, mariée à Pierre de Cugnac, et cinq enfants naturels : deux fils et trois filles. Dans son testament, daté du 23 août 1371, il ne nomme point Seguin qui était mort empoisonné à la fin de 1365, par Charles de Navarre.
Cette maison formait deux branches : celles de Gontaut-Biron et celle de Badefol. Hélie de Gontaut-Badefol, fils de Seguin de Gontaut et frère de Seguin de Badefol, conservait encore, en 1388, plusieurs places et châteaux en Auvergne et en Rouergue provenant des « acquisitions » de ce chef de Compagnie, car il traita, le 1 er mai de cette année, pour la reddition de Turlande, près de Pierrefort, et de plusieurs autres places et jura que, durant l’année qui suivrait, il ne serait fait aucun tort, par lui et les siens, aux habitants de l’Auvergne, Rouergue, Toulousain, Carcassonnais, cela jusqu’à Beaucaire. Cet Hélie épousa, en octobre 1388, Marthe de Laye, dame de Hautefort en Périgord, et il fut substitué aux noms et armes de Hautefort. Sa postérité mâle a continué en Vivarais jusqu’au milieu du XIX e siècle. Les Gontaut-Badefol portaient : Ecartelé l’or et de gueules ; les armes de Hautefort que prit Hélie de
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