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Les amants de Brignais

Les amants de Brignais

Titel: Les amants de Brignais Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
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se retourna :
    – Hé bé ! dit-il, suffoqué.
    Oriabel était nue, à peine protégée de ses bras et de ses mains. Il la considéra d’un regard descendant et, fasciné, s’approcha d’elle.
    – J’ai cru… bredouilla-t-elle. C’est bien ce que vous vouliez hier soir, et que vous voulez maintenant.
    _ Certes ! Certes ! dit-il, le souffle court.
    Elle était simple et singulière. Ce n’était pas par impudicité qu’elle avait ôté sa robe, mais pour lui complaire. Si franche, même, et si soumise à ses volontés que, mortifiant peut-être un repentir à la mesure de son audace, elle ne se dissimulait plus.
    – J’ai mal fait ? Vous avez perdu votre sourire.
    Elle lui fit un collier de ses bras. Tout ce qu’elle voulait, c’était qu’il fut heureux d’elle et par elle, et sans le moindre apprêt, la moindre réticence.
    – J’ai mal fait ?… Vous ne me prenez pas pour une…
    – Nullement.
    – Je n’ai jamais fait cela avant…
    Elle l’admirait bien trop et lui avait trop de gratitude pour qu’il eût perdu son temps à la dévêtir.
    – Mais j’en aurais eu plaisir, sais-tu ?
    – Il y a des femmes qui doivent vivre dans leurs vêtements comme des gens derrière les murailles de leur ville ou de leur châtelet… Je n’ai pas à me défendre, moi, devant vous, puisque je vous aime.
    Sa bouche offerte, demi-close. La baiser tout en caressant la cannelure de son dos et des deux mains, plus bas, la préhension des fesses dures. Souffles, salives, rosées tièdes des corps embrasés. Tout s’abolissait autour d’eux, et le silence même qu’ils créaient de toute leur ferveur enivrée les enveloppait à grands plis lourds, tandis que leurs contours se cherchaient, se pénétraient, et que leurs pas menus les poussaient vers le lit.
    Ils y tombèrent dans un frémissement de paille froissée. L’épée tinta contre le bois, et Tristan rit comme jamais il n’avait ri depuis Poitiers.
    – Bon sang !… Cette Floberge… Ces malandrins en sont cause.
    Il déboucla sa ceinture et l’arme tomba. Le pourpoint, les heuses, les chausses la recouvrirent. Oriabel roula sur le lit, auréolée, flammée de ses cheveux épars, tandis que la lumière pourtant ingrate ruisselait sur son dos, ses épaules, ses flancs, ses cuisses, transmutant leur albâtre en ambre chatoyant.
    Il n’osa la toucher de crainte d’abîmer ces délices profanes.
    – On dirait que tu te laisses emporter par un torrent.
    – Non… Je pensais à un petit havre en forêt. Vous, moi… On s’aimerait dans des draps d’herbes folles… Nous aurions le ciel au-dessus de nous, au lieu de cette voûte sombre…
    Il demeurait assis pour la mieux contempler. Il saisit la main qu’elle mettait sur l’encoche de son nombril et fut tenté de poser sa joue sur cette mousse blonde qu’une roulade lui dissimulait juste comme il se penchait.
    – Vous réprouvez ce que je fais.
    – Non, cent fois non.
    – Cinquante fois sans doute.
    Il restait décontenancé. D’où tenait-elle tant de simplicité ? Il se guérit de son inquiétude en se disant qu’elle détestait autant que lui les simagrées. Puis la peur lui revint : le prolongement heureux de ces amours de reclusoir, c’était la réussite de Tiercelet. Il n’y comptait pas, bien que sa passion pour Oriabel eût encore fortifié sa confiance envers le brèche-dent. Comme la jouvencelle exhalait un soupir qui cette fois n’était point d’aise, il pensa étouffer son angoisse sous quelques paroles enjouées :
    – Tu es belle !… Je voudrais non seulement te le dire à l’oreille, te le crier, te le chanter, mais je vou drais le hurler au faîte du donjon, sur les toits des cités, tout en haut des arbres…
    –  À quoi pensez-vous aussi ?
    –  À toutes celles qui t’entourent hormis les malheureuses de Brignais. Toutes celles de Lyon et de plus loin encore. Toutes celles de Paris, Toulouse, Carcassonne… Je me souviens d’avoir lu quelque chose sur une vierge tellement belle que les filles de Jérusalem versaient des larmes d’envie sur son passage… Attends… Comment était-ce ? Ah ! Voilà, mot pour mot : belle au milieu de ses compagnes comme le lis parmi les épines 61  !… Tu es pour moi ce lis inégalable… Pourquoi n’as-tu pas peur d’être nue devant moi ?
    – Vous l’êtes aussi… J’ai deux sœurs et deux frères… On se baignait dans le même cuvier que mon père vertoquait 62 parfois tant nous y

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