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Les Amants De Venise

Titel: Les Amants De Venise Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Zévaco
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tremblait légèrement.
    – Parce qu’il vaut mieux ne l’atteindre qu’à Rome.
    – Je ne sais si je me trompe, mais il me semble que Bembo
n’est pas parti seul de Venise. Je veux voir… »
    Ils passèrent donc la nuit dans l’auberge de Firenzuola, et
franchirent l’Apennin le lendemain ; ils passèrent ensuite par
Florence et Sierra. Puis ils contournèrent le lac de Bracciano et
parvinrent enfin à l’auberge de la Fourche le soir du onzième jour
de leur voyage.
    À la Fourche, Roland sut que Bembo ne les précédait que d’un
quart d’heure. Le soir même, ils entraient dans Rome…
    *
    * *
    « Maître, dit Scalabrino, lorsqu’ils furent installées dans
une chambre de modeste auberge, savez-vous que ce cardinal est un
rare sacripant ? »
    Roland interrogea des yeux le rude compagnon qui parlait ainsi,
avec d’étranges sonorités dans sa voix.
    « Savez-vous, reprit Scalabrino, qu’il a vraiment mérité
quelque effroyable châtiment comme on dit qu’en a imaginé pour les
damnés un poète qu’on appelle Dante ? »
    Roland sourit. Cette fois, il comprenait où son compagnon
voulait en venir. Il se croisa les bras, pencha sa belle tête
pensive sur sa poitrine et parut écouter avec une profonde
attention.
    Seulement, il murmura d’une voix sourde qui eût fait frissonner
Scalabrino s’il eut entendu.
    « Dante lui-même eût reculé d’horreur devant le supplice
que j’imagine, moi ! »
    Scalabrino arpentait la chambre à pas saccadés. Parfois un
sanglot convulsait sa figure et, à d’autres moments, il
rugissait.
    « Savez-vous, reprit-il en serrant ses poings énormes,
tandis que ses yeux s’injectaient de sang, savez-vous que cet homme
fut l’inspirateur du crime qui rendit votre père aveugle et
fou ?… »
    Roland se tut.
    « Savez-vous qu’après s’être fait le bourreau de votre
père, il infligea à votre mère la mort la plus affreuse, la mort
par la misère et la faim… et que, las de la torturer, il acheva de
l’assassiner en inventant votre mort ?… Savez-vous que, par
lui, vous avez souffert, pleuré, sangloté au fond des puits tout ce
qu’un homme peut souffrir, pleurer et sangloter ? »
    Il ne regardait pas Roland. Il parlait pour parler. Il étouffait
et écumait. Roland paraissait ne pas entendre.
    « Savez-vous qu’il s’est emparé de ma fille, reprit
Scalabrino, savez-vous qu’il l’a pourchassée comme le tigre
pourchasse une gazelle, et que cette enfant, cette pure et noble
enfant dont un seul regard eût désarmé le bourreau, cette enfant,
ma fille, maître, ma fille, mon sang, ma vie… »
    Le colosse s’assit sur un fauteuil, saisit sa tête à pleines
mains et sanglota. Roland alla à lui, et lui mit la main sur
l’épaule.
    Scalabrino redressa la tête.
    « Achève, dit froidement Roland.
    – Je voulais vous dire ceci : que cet homme, assassin
de votre père, assassin de votre mère, assassin de ma fille, je
l’ai condamné, moi ! Et que cette nuit même, les deux mains
que voilà…
    – Non ! dit nettement Roland.
    – Non ? fit Scalabrino avec une sorte de révolte. Que
voulez-vous dire ?
    – Que l’homme dont tu parles ne doit pas mourir purement et
simplement ; et qu’il faut pour le raffinement de cette âme
monstrueuse un supplice raffiné…
    – Et ce supplice ? » haleta Scalabrino.
    Roland eut un nouveau sourire livide. Cette fois Scalabrino le
vit. Et ce sourire lui fit dresser les cheveux sur la tête.
    Roland lui dit alors :
    « Attends-moi ici. Une heure, deux heures peut-être. À mon
retour, que je trouve un carrosse de voyage, prêt à partir, un
solide carrosse, tu m’entends, avec deux bons chevaux. »
    Scalabrino fit signe qu’il obéirait, et Roland, s’étant
enveloppé dans son manteau, sortit de l’auberge.

Chapitre 16 DIGNA TANTO NOMINE…
    Roland, une fois dehors, marcha droit devant lui, comme au
hasard. Il connaissait Rome pour y avoir séjourné un mois lors de
l’embuscade dont il avait été chargé par le Conseil des Dix auprès
du pape. Qu’il y avait longtemps de cela !
    Il semblait à Roland que toute une éternité le séparait de
l’heureux temps où il avait fait ce voyage, prodiguant l’or et les
folies de sa jeunesse ardente, assistant à une fête donnée au
palais Imperia. Il n’y avait guère que neuf années écoulées.
    C’était là, dans cette fête, que la célèbre courtisane l’avait
vu ! C’était là qu’elle s’était éprise de

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