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Les Amazones de la République

Les Amazones de la République

Titel: Les Amazones de la République Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Renaud REVEL
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siège d’une journaliste, dont le plateau est une tribune et la grand-messe du 20 Heures, une machine de guerre politique implacable. Calme affecté, empathie à géométrie variable, selon ses interlocuteurs et leurs rangs – dans l’échelle sociale ou du métier –, colères froides, selon les circonstances : Laurence Ferrari bondieusa, ainsi, à la tête du JT le plus convoité et le puissant du pays. Et, à ce titre, comme l’ensemble de ses prédécesseurs, elle fut l’hôte d’honneur du locataire de l’Élysée, qui multiplia à son égard les attentions et les sollicitudes…
    Mais il nous faut maintenant regagner la terre ferme. Et rappeler que Nicolas Sarkozy cumula deux « jobs », entre 2007 et 2012 : ceux de président de la République et de DRH de TF1. PPDA le sait, que l’ancien locataire de l’Élysée expédia sous les plombs, sans sommation, l’arrachant de son logis et d’un piédestal – auquel il était vissé depuis un sacré bail, vingt et une années. Après que Martin Bouygues eut prononcé sa déchéance, sur l’insistance de son copain de président, un ami de trente ans. Laurence Ferrari, qui piétinait à la porte, hérita du sceptre tant convoité, laissant « Poivre » sur le bord du chemin, livide de colère et de désolation.
    A-t-on idée, aussi, de s’imaginer éternel ! Et propriétaire d’un journal de 20 heures comme d’une charge de notaire ! De passage à Paris, des pèlerins venus de la BBC ou de Fox News interrogèrent à l’époque le vicaire du CSA, Dominique Baudis : « Chez vous, l’évêque de TF1 est propriétaire de son église ? — Oui, répondit notre homme, il ouvre quand ça lui plaît. »
    C’est en juin 2007, au lendemain de son élection à la présidence de la République, que Nicolas Sarkozy accueillit au fort de Brégançon son ami Martin Bouygues. On sabla le champagne et on évoqua longuement les épisodes de cette campagne victorieuse. Cuvée parfaite, année royale : ce cru 2007 s’annonçait sous les meilleurs auspices, malgré l’absence douloureuse de Cécilia, dont la silhouette commençait à s’estomper. Les femmes attendraient : pour ne pas s’abîmer dans la déprime, il lui fallait tourner cette page. Notre démiurge de la politique décida de prendre la France pour maîtresse.
    Et « Poivre » pour os à ronger ! Titiller, cureter, vriller l’échine de l’icône cathodique d’une pointe au curare soulagea ses nerfs. Pour Nicolas Sarkozy, il n’était pas question que ce journaliste, qu’il avait pris en grippe, reste à son poste. Comme il allait également de soi que Laurence Ferrari le remplacerait au plus vite : à Martin Bouygues de signer l’acte de départ et au P-DG de TF1, Nonce Paolini, d’exécuter la sentence. Après moult conciliabules, on se mit d’accord sur un calendrier : pour ne pas déclencher une polémique inévitable, il fut décidé que la décapitation de PPDA interviendrait à froid et en son temps. Soit un an plus tard, le 18 juin 2008.
    En rage contenue, d’amant dupé, le journaliste fit ses adieux un soir, en direct : une longue éducation de l’œil et des pratiques et mimiques poivriennes fut nécessaire, ce jour-là, pour déceler, derrière la vitre de notre téléviseur, le regard au scalpel d’un homme où se lisait une férocité sublimée par l’échec. Et qui se jurait, dans son for intérieur, de prononcer une fatwa à l’encontre de celle qui s’apprêtait à lui voler son trône.
    Mais Nicolas Sarkozy veilla au grain. Celui à qui l’on prête d’avoir œuvré en coulisse, afin de faciliter le transfert de l’ancienne vedette du 20 Heures de TF1 sur D8 – en intervenant, notamment, auprès du patron de Canal + France, dont cette chaîne est une cousine, Rodolphe Belmer –, ne quitta pas des yeux celle dont il salua en privé la témérité, après qu’elle eut habillé ses émotions d’une camisole. Sarkozy et Belmer se connaissaient bien depuis que le

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