Les Amazones de la République
Mitterrand croisa dans sa vie, il y eut Ãlizabeth Teissier, cette voyante qui officiait sur lâantenne de France Inter et dont il sâéprit. Fort jolie femme, celle-ci fit la connaissance du premier des Français au détour dâune remise de médaille à lâÃlysée. Cet homme, à qui elle dessinait lâavenir, lâinvita à de nombreuses reprises dans son bureau, nuitamment. Que lui trouvait-il au-delà de sa beauté ? Quâattendait-il de cet oracle qui se mettait à lâouvrage, portes fermées ? Que lisait-elle dans les lignes de la main dâun homme qui aurait volontiers parcouru celles de son corps ? Beaucoup soupçonnèrent en effet lâancien président dâavoir eu une aventure avec cette créature, qui publiera bien plus tard un livre sur cette relation (quâelle qualifiera dâépistolaire) pour le moins exotique. Nâécartons pas totalement lâidée que François Mitterrand ait pu sâen remettre aux prédictions dâune cartomancienne quand la politique le désespérait.
Recevant, un jour de mai 1988, à lâÃlysée le dalaï-lama, en compagnie dâHubert Védrine, Mitterrand se vit remettre lâécharpe blanche traditionnelle : ceint de cette étole sacrée, symbole de longévité et de sérénité, le locataire de lâÃlysée murmura à lâoreille de son ministre des Affaires étrangères : « Jâespère que cela marcheâ¦Â »
Daniel Gamba, pour en revenir à notre Pandore, nâexistait pas. Et cette discrétion, poussée à lâextrême, convenait à Mitterrand, qui, sâagissant de sa vie privée, nâacceptait aucune interférence : un cercle de feu, dont il fallait se tenir éloigné. « François Mitterrand était dâune discrétion remarquable, écrit ainsi Gamba, les femmes, nous les voyions passer, plus ou moins longtemps, on en apercevait une entre deux portes, lâune chassant lâautre. » Devenu virtuose dans le maniement des codes non écrits de son « client », ce flic assista ainsi, toujours attentif mais en retrait, aux cavalcades amoureuses dâun homme, qui martelait ses consignes quand il allait au-devant de lâune de ses maîtresses : « Vous me déposerez quelques pas avant lâimmeuble, je marcherai un peu, il nây aura personne à côté de moi. [â¦] Il ne faut absolument pas que je sois vu. »
Ainsi soit-ilâ¦
à la nuit tombée, déserté par lâarmée de ses habitants, lâÃlysée redevenait le domaine dâun seul homme. Nombre de jeunes conseillères de François Mitterrand ont connu cette scène, devenue lâun des rituels du président. Comme ce soir de décembre 1984. Il est 23 heures, quand ce membre du cabinet du président, de garde ce soir-là , sâest retranché, pour la nuit, dans le petit appartement de fonction mis à disposition des collaborateurs du chef de lâÃtat. Mais le téléphone sonne : au bout du combiné, François Mitterrand. « Je ne vous dérange pas, Christine ? â Pas le moins du monde, monsieur le président, que puis-je pour vous ?, lui répond la jeune femme. â Sauriez-vous me dire quel est lâacte fondateur de la république de Weimar ? Jâai oubliéâ¦Â »
Déstabilisée, cette jeune conseillère se demande ce que François Mitterrand peut bien faire à cette heure-ci pour passer un tel coup de téléphone ! Est-il seul ? Et à quoi rime cette question insolite ? Cherche-t-il quelquâun pour lui faire la conversation ? Ou plus encore, une âme sÅur qui irait le border dans son bureau devenu alcôve ? « Laissez-moi quelques instants et je vous rappelle au plus vite, monsieur le président. » Lâintéressée se précipita sur une encyclopédie et fit une recherche rapide, avant de rappeler celui qui attendait quelque part dans lâune des pièces de lâÃlysée. François Mitterrand lâécouta, avant de prendre congé, sans autre explication, ni propositionâ¦
Certaines parmi ses conseillères ou membres de cabinet, qui passaient ainsi la nuit au Château, se virent, en revanche, souvent invitées à le
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