Les Amazones de la République
seul homme : Chirac. Du moins, lâespérait-ilâ¦
Câest ainsi que, mois après mois, lâintéressé se vit confier la mission de gérer une foule de détails qui, dâordinaire, ne relevaient pas des attributions dâun chauffeur de fonction. Livraison de cadeaux et de fleurs à des jeunes femmes, dont Jacques Chirac lui donnait lâadresse ; dépôt de petits mots manuscrits adressés à des journalistes, avec lesquels il entretenait des liaisons fugaces ; virées dans Paris à des heures improbables : tel était lâemploi du temps chargé dâun dirigeant politique, dont son chauffeur dut épouser les rythmes soutenus.
Câest ainsi quâà lâoccasion des fêtes de Noël, Jean-Claude Laumond avait pour mission de faire la tournée des meilleurs traiteurs ou magasins de jouets de la capitale, afin de répondre aux exigences de Jacques Chirac et de son épouse. Du Nain Bleu à Hédiard, en passant par les magasins Fauchon, le chauffeur faisait ainsi sa tournée annuelle, transformant sa limousine en une camionnette de livraison.
Tout semblait anodin aux yeux de notre dévoué coursier. Jusquâau jour où, convoqué par Jacques Chirac, il sâentendit dire : « Voici la liste des adresses auxquelles vous irez aujourdâhui. » De cet instant-là , son chauffeur comprit que la vie du président était plus compliquée quâil y paraissait. Et que les femmes qui lâentouraient « étaient bien plus nombreuses que je ne lâaurai imaginé ».
Lorsquâil franchit un jour le seuil du Nain Bleu, lâun des magasins de jouets les plus réputés de Paris, la directrice de cet établissement lui posa cette question, étonnée : « Mais, câest bien vous que jâai vu hier en compagnie de M me  Chirac ? â Oui, lui répondit-il, mais aujourdâhui je viens de la part de M. Chirac⦠Il y a, je crois, une autre commande. » En effet. Et celle-ci prit une destination moins familiale et plus privée.
On lâa évoqué : les relations entre le chauffeur de Jacques Chirac et Bernadette, son épouse, furent le plus souvent orageuses. Parce que trop proche de son mari, et donc suspecté de participer de près à lâorganisation de son « autre vie », ce fonctionnaire faisait lâobjet dâune surveillance particulière. Un autre soir de déprime, ce dernier alla sâépancher, cette fois-ci, auprès de lâun des plus fidèles amis de lâancien président de la République, François Pinault : « Ne vous en faites pas, Laumond, lui répondit lâindustriel, quand le mauvais temps est là , prenez pour habitude dâattendre le beau temps. » Ne lui cachant pas que cette situation lui devenait insupportable, le malheureux guetta un autre conseil : « Soyez patient », termina-t-il. Avec ça⦠Lâhomme, qui allait de tempêtes en ouragans, sâen retourna à ses bonnes Åuvres, convaincu que tout cela finirait mal.
Aussi, Laumond passait le plus clair de son temps à tenter dâéchapper à la vigilance de celle qui, nâacceptant plus les incartades dâun époux volage, pistait son chauffeur. Ce quâelle fit, jusquâaux marches de lâÃlysée, où Chirac et son factotum durent faire preuve dâimagination, détalant devant la « Mère Chirac », ainsi baptisée de longue date par les plantons de la mairie de Paris.
Comme souvent en début dâaprès-midi, après le déjeuner, Jacques Chirac fit appeler son chauffeur : « Allez, Laumond, on va faire un tour. » Pour lâintéressé, le message était clair : le patron partait en goguette. Or, chaque fois, le cérémonial était le même : le chauffeur avançait la berline au bas du perron de la cour dâhonneur et la voiture glissait lentement en direction de la rue du faubourg Saint-Honoré, avant de sâégayer dans les rues de Paris.
Mais où allait donc Chirac, quand il sâabsentait de la sorte ? Bien évidemment, rejoindre quelques mystérieuses amazones, dont une journaliste politique émérite de TF1, quâil rencontrait fréquemment à son domicile, lâespace dâun bref
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