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Les Amazones de la République

Les Amazones de la République

Titel: Les Amazones de la République Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Renaud REVEL
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seul homme : Chirac. Du moins, l’espérait-il…
    C’est ainsi que, mois après mois, l’intéressé se vit confier la mission de gérer une foule de détails qui, d’ordinaire, ne relevaient pas des attributions d’un chauffeur de fonction. Livraison de cadeaux et de fleurs à des jeunes femmes, dont Jacques Chirac lui donnait l’adresse ; dépôt de petits mots manuscrits adressés à des journalistes, avec lesquels il entretenait des liaisons fugaces ; virées dans Paris à des heures improbables : tel était l’emploi du temps chargé d’un dirigeant politique, dont son chauffeur dut épouser les rythmes soutenus.
    C’est ainsi qu’à l’occasion des fêtes de Noël, Jean-Claude Laumond avait pour mission de faire la tournée des meilleurs traiteurs ou magasins de jouets de la capitale, afin de répondre aux exigences de Jacques Chirac et de son épouse. Du Nain Bleu à Hédiard, en passant par les magasins Fauchon, le chauffeur faisait ainsi sa tournée annuelle, transformant sa limousine en une camionnette de livraison.
    Tout semblait anodin aux yeux de notre dévoué coursier. Jusqu’au jour où, convoqué par Jacques Chirac, il s’entendit dire : « Voici la liste des adresses auxquelles vous irez aujourd’hui. » De cet instant-là, son chauffeur comprit que la vie du président était plus compliquée qu’il y paraissait. Et que les femmes qui l’entouraient « étaient bien plus nombreuses que je ne l’aurai imaginé ».
    Lorsqu’il franchit un jour le seuil du Nain Bleu, l’un des magasins de jouets les plus réputés de Paris, la directrice de cet établissement lui posa cette question, étonnée : « Mais, c’est bien vous que j’ai vu hier en compagnie de M me  Chirac ? — Oui, lui répondit-il, mais aujourd’hui je viens de la part de M. Chirac… Il y a, je crois, une autre commande. » En effet. Et celle-ci prit une destination moins familiale et plus privée.
    On l’a évoqué : les relations entre le chauffeur de Jacques Chirac et Bernadette, son épouse, furent le plus souvent orageuses. Parce que trop proche de son mari, et donc suspecté de participer de près à l’organisation de son « autre vie », ce fonctionnaire faisait l’objet d’une surveillance particulière. Un autre soir de déprime, ce dernier alla s’épancher, cette fois-ci, auprès de l’un des plus fidèles amis de l’ancien président de la République, François Pinault : « Ne vous en faites pas, Laumond, lui répondit l’industriel, quand le mauvais temps est là, prenez pour habitude d’attendre le beau temps. » Ne lui cachant pas que cette situation lui devenait insupportable, le malheureux guetta un autre conseil : « Soyez patient », termina-t-il. Avec ça… L’homme, qui allait de tempêtes en ouragans, s’en retourna à ses bonnes œuvres, convaincu que tout cela finirait mal.
    Aussi, Laumond passait le plus clair de son temps à tenter d’échapper à la vigilance de celle qui, n’acceptant plus les incartades d’un époux volage, pistait son chauffeur. Ce qu’elle fit, jusqu’aux marches de l’Élysée, où Chirac et son factotum durent faire preuve d’imagination, détalant devant la « Mère Chirac », ainsi baptisée de longue date par les plantons de la mairie de Paris.
    Comme souvent en début d’après-midi, après le déjeuner, Jacques Chirac fit appeler son chauffeur : « Allez, Laumond, on va faire un tour. » Pour l’intéressé, le message était clair : le patron partait en goguette. Or, chaque fois, le cérémonial était le même : le chauffeur avançait la berline au bas du perron de la cour d’honneur et la voiture glissait lentement en direction de la rue du faubourg Saint-Honoré, avant de s’égayer dans les rues de Paris.
    Mais où allait donc Chirac, quand il s’absentait de la sorte ? Bien évidemment, rejoindre quelques mystérieuses amazones, dont une journaliste politique émérite de TF1, qu’il rencontrait fréquemment à son domicile, l’espace d’un bref

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