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Les amours du Chico

Les amours du Chico

Titel: Les amours du Chico Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Zévaco
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était maintenu d’un côté par des charnières
puissantes. Ces charnières n’étaient pas placées contre le mur qui
soutenait le plancher. Elles étaient sous le plancher même.
C’est-à-dire que, du côté opposé à la pente, on avait posé une
forte traverse de métal.
    C’est sur cette traverse qu’étaient vissées les charnières. Si
cette traverse avait eu quelques centimètres de plus dans sa
largeur, Pardaillan eût pu à la rigueur se poser là-dessus et
attendre aussi longtemps que ses forces le lui eussent permis.
Malheureusement, la traverse était trop étroite. Mais s’il n’était
pas possible de se poser là-dessus, on pouvait du moins s’y
accrocher et s’y maintenir en se couchant à plat ventre, suspendu
par le bout des doigts. Le fou – nous ne voyons pas d’autre nom à
lui donner – avait vu cela.
    C’était, tout bonnement, une manière de prolonger son supplice
de quelques secondes. Il était évident qu’il ne pourrait se
maintenir longtemps dans cette position et même, en admettant que
le mouvement de descente s’arrêtât, la pente était déjà assez raide
pour rendre la chute inévitable.
    Le fou ne raisonna pas tant. Il vit là une chance de prolonger
son agonie et désespérément, il s’accrocha à ce rebord sauveur. Il
y gagna du moins qu’il ne vit plus les épouvantables hachoirs qui
avaient le don de l’affoler.
    Le plancher continuait sa descente. Bientôt, l’extrémité
descendante irait s’appuyer sur le sol de la pièce qui devait être
au-dessous… en admettant qu’il y eût une pièce au-dessous. Sinon la
pente se changerait insensiblement en ligne verticale et alors ce
serait la chute dans quelque mystérieux abîme.
    Maintenant, la cloison était tapissée du haut en bas et dans
toute sa largeur de faux qui continuaient immuablement leur
mouvement de hachoir et semblaient appeler la proie convoitée.
    Pardaillan, suspendu dans le vide, sentait ses forces
l’abandonner de plus en plus ; ses doigts, gonflés par
l’effort, s’engourdissaient ; la tête lui tournait et, malgré
son état, il comprenait que bientôt, dans un instant, il lâcherait
prise, et ce serait fini : il roulerait là-bas se faire hacher
par la hideuse machine, qui semblait l’appeler de son ronronnement
formidable.
    Il râlait, et cependant son désir de vivre était si
prodigieusement tenace qu’il trouvait encore, et malgré tout, la
force de crier presque sans discontinuer :
    – Arrêtez ! Arrêtez !…
    Bientôt, il fut à bout de force. Sa main gauche glissa, lâcha
prise. Il se maintint un instant de sa seule main droite. Les
doigts de cette main, à leur tour, le trahirent un à un. Deux
doigts seuls restèrent désespérément incrustés dans le métal et
supportèrent le poids de son corps un inappréciable instant.
    Alors, il ferma les yeux, un soupir atroce gonfla sa poitrine,
un cri terrible, un cri de bête qu’on égorge jaillit de ses lèvres
tuméfiées, et il roula, roula là-bas sur les hachoirs qui le
saisirent.

Chapitre 17 LE PHILTRE DU MOINE
    Or, Pardaillan n’était pas mort.
    La machine à hacher était une sinistre comédie imaginée par
Fausta, de concert avec d’Espinosa.
    La papesse et le grand inquisiteur avaient décidé de pousser
Pardaillan à la folie, non à la mort. Sur ce point, ils s’étaient
trouvés tout de suite d’accord. Quant aux raisons qui les avaient
poussés à adopter cette manière de tuer le chevalier – la folie
n’est-elle pas comme une mort anticipée ? – ces raisons que
chacun avait gardées par devers lui n’étaient pas les mêmes chez
Fausta que chez d’Espinosa.
    Fausta avait adopté ce genre de supplice parce que, ayant essayé
sans y parvenir de tuer Pardaillan par tous les moyens humainement
connus, fataliste, sombre illuminée, elle s’était persuadée que cet
homme était invulnérable et que, pour l’abattre, il fallait
chercher autre chose que la mort.
    D’Espinosa n’avait pas du tout ces idées. Grand inquisiteur
d’Espagne, il estimait que son devoir était de poursuivre sans
pitié l’hérésie et d’imposer par les moyens les plus violents ou
les plus odieux la foi en ce Dieu qu’il servait, le respect et
l’amour de ce Dieu. Offenser ce Dieu, c’était commettre un crime
pour l’expiation duquel les tortures les plus effroyables étaient
encore insuffisantes.
    Or, le roi était considéré comme un être d’une essence
exceptionnelle. Le roi, c’était le

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