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Les années folles

Les années folles

Titel: Les années folles Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel David
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Je viens d’en
apprendre une bonne, dit-elle tout bas à son mari.
    – Quoi ?
    – Notre
Clément, effronté comme un « beu », est allé veiller avec Céline Veilleux.
    – Où ça ?
demanda Eugène en finissant de retirer son pantalon.
    – Chez les
Veilleux.
    – Ah ben, baptême !
jura Eugène. Il y a pas assez de filles dans la paroisse pour lui. Il fallait
qu’il aille veiller avec la fille de ce maudit caractère de cochon là !
    – On dirait. Mais
il a quand même presque vingt et un ans et…
    – Laisse
faire, l’interrompit son mari. Je sais quel âge il a.
    Eugène
souffla la lampe et se glissa dans le lit. Un instant plus tard, Thérèse sentit
le matelas bouger comme si son compagnon était en proie à des mouvements convulsifs.
    – Qu’est-ce
que t’as ? lui demanda-t-elle en se tournant vers lui dans le noir.
    – Il y a, fit
son mari en riant tout bas, que j’aurais donné cher pour voir la tête de
Veilleux quand notre garçon s’est présenté à sa porte. Avec tout le monde qui devait
être derrière lui dans la maison, ça devait valoir le coup d’œil.
    – Au lieu de
rire, Eugène Tremblay, tu devrais bien plus penser à faire la paix avec le
voisin. Vous êtes deux vieux têtus. C’est à celui qui pliera le dernier.
    – Laisse
faire. Dors, fit Eugène en reprenant son sérieux.

Chapitre 15
Les grandes manœuvres
    La
vie quotidienne reprit presque son cours normal dès le lendemain du jour de l’ An . Il ne restait à célébrer que la fête
des Rois, à la fin de la semaine, une fête qui ne donnait lieu à aucune réunion
de famille et qui annonçait surtout le retour à l’école des plus jeunes, le
lendemain matin.
    Chaussés de leurs
raquettes et chargés de leur hache et de leur godendart, les hommes avaient
repris le chemin de la forêt située à l’extrémité de leur terre. Ils s’étaient
remis à bûcher et à scier, tout heureux de profiter du temps doux qui se
maintenait depuis près de deux semaines.
    Trois jours plus
tard, le ciel se couvrit au milieu de l’après-midi et une petite pluie froide
se mit à tomber.
    – On arrête
ça là, dit Ernest Veilleux à son fils Jérôme. Ça, c’est une température pour
attraper la grippe. On rentre.
    L’adolescent
ne se fit pas prier. Le retour à la maison fut pénible. Les raquettes
enfonçaient profondément dans la neige mouillée et les deux hommes peinèrent à
avancer sous une pluie de plus en plus forte. Ce soir-là, le père prédit, avant
de se mettre au lit :
    – Vous allez
voir ça, demain matin. Si le vent se lève du nord, ça va geler partout et on va
avoir de la misère à se tenir debout dehors.
    Le
lendemain matin, la pluie avait cessé et le mercure avait chuté à - 20 degrés. Lorsque Yvette se leva pour
rejoindre son mari en train d’allumer le poêle, dans la cuisine, elle frissonna
violemment.
    – Mais il
fait donc bien froid ici-dedans.
    – Le poêle s’est
éteint. J’ai oublié de me lever vers quatre heures, s’excusa Ernest en
tisonnant les rondins.
    – Ça
pas l’air d’être chaud dehors. Il y a de la glace dans les vitres.
    Le
cultivateur ne se donna pas la peine de répondre. Il s’assit pour chausser ses bottes avant d’endosser son manteau. Jérôme et
ses jeunes frères descendirent l’escalier au moment où leur père sortait de la
maison après avoir allumé un fanal pour se rendre à l’étable.
    – Grouillez-vous
de venir me rejoindre à l’étable, leur dit-il avant de refermer la porte
derrière lui.
    Lorsque
le jour se leva un peu après sept heures, Yvette regarda à l’extérieur et découvrit
avec stupeur un véritable champ de glace.
    – Sainte
bénite ! Mais il y a de la glace partout ! s’exclama-t-elle.
    Ses
filles se précipitèrent vers les fenêtres de la cuisine pour constater par elles-mêmes
le phénomène annoncé par leur mère. Devant leurs yeux, à perte de vue, tout
miroitait sous les premiers rayons de soleil de ce 5 janvier. La pluie de la veille s’était
transformée durant la nuit en un épais verglas qui recouvrait tout. La glace semblait
couvrir aussi bien la route que les champs environnants.
    – Ça doit
être glissant sans bon sens, gémit Yvette.
    – Le déjeuner
est presque prêt, déclara Céline. Je m’habille et je vais aller casser la glace
avec une pelle, sur les marches et sur le balcon au moins, sinon on va se
casser un membre en sortant de la maison.
    – Je vais y
aller moi

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