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Les années folles

Les années folles

Titel: Les années folles Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel David
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l’héritage. Cette pauvre madame Fournier a tout de
même pas dû laisser mer et monde.
    – C’est pourtant
ce que raconte notre postier.
    – Ce
serait une tout autre histoire si le Germain était marié et père de famille, fit
Marthe Giguère. En passant, je pense qu’il va lui falloir une femme bien vite à
celui-là. Ça pouvait toujours aller quand sa mère était vivante et qu’elle
faisait son ordinaire, mais à cette heure qu’elle est partie, il pourra jamais
se débrouiller tout seul pour tout faire.
    Hélèna
Pouliot eut un sourire sarcastique à cette pensée.
    – Quelle
fille va bien vouloir d’un vieux garçon comme lui ? demanda la sèche
propriétaire du magasin général en se gourmant.
    – C’est vrai
qu’il doit pas être facile à vivre, cet homme-là, reconnut la femme du maire. Il
a l’air renfermé en pas pour rire et, en plus, il parle p resque pas.
    – Je
pensais pas seulement à ça, ajouta Hélèna. Pour être franche, on peut pas dire
qu’il est bien beau, le Germain. Il a la face pleine de trous et il commence à
perdre ses cheveux. En plus, il a l’air bête comme ses pieds et, comme si c’était
pas assez, il est habillé comme la chienne à Jacques. Celle qui va accepter de
se marier avec ça, ça va être une fille bien mal prise, c’est moi qui vous le
dis.
    L’entrée
d’Elphège Turcotte dans l’épicerie empêcha les deux commères de continuer à
médire. Elles le saluèrent et prirent des nouvelles de sa sœur Rose-Aimée avec
qui il demeurait dans leur petite ferme du rang Saint-Pierre.
    – Elle va
numéro un, répondit l’homme avec un grand sourire
qui laissait voir des dents brunes et ébréchées. Elle a reçu de ma tante Yvonne
une pleine boîte de livres, la semaine passée. Avec ça, elle est heureuse.
    Elphège Turcotte
quitta l’épicerie après avoir fait l’achat de deux paquets de papier à
cigarettes Zigzag et d’un paquet de tabac Player’s. Par la vitrine, Marthe
Giguère le vit s’arrêter sur le balcon, à quelques pas de la porte, et prendre
le temps de se rouler lentement une cigarette avant de se remettre en marche.
    – En
voilà un qui s’en fait pas trop avec la vie, fit remarquer la femme bien en
chair à Hélèna.
    – Ça
a pas une cenne qui l’adore, mais il fume des cigarettes, dit aigrement l’épicière.
Il pourrait fumer la pipe et prendre du tabac du pays, comme
tous les autres… Mais, non ! Il trouve que c’est trop fort pour lui. Il
aime mieux le goût fin de la cigarette.
    – Drôle
d’homme.
    – Il
est pourtant moins pire que sa sœur, laissa tomber Helèna. La Rose-Aimée, c’est
pas elle qui risque de s’éreinter à travailler. La plupart du temps, tu la vois
assise sur son balcon, en train de lire, comme une grosse madame. Elle doit
faire juste les repas. Elle a pas une fleur autou r de la
maison. Son jardin est grand comme un mouchoir et mal entretenu. Ses fenêtres
sont encrassées au point qu’ils doivent rien voir dehors. Et là, je parle p as de maison en dedans parce que j’y ai
jamais mis les pieds, mais ça doit pas être beau à voir. Je vous dis que quand
on a les deux pieds dans la même bottine…
    – Ça,
il faut dire que Rose-Aimée Turcotte est pas la femme la plus fière de
Saint-Jacques, reconnut l’épouse du maire.
    – Mais
elle est toujours la première à demander de l’aide quand elle en a besoin. Pourtant,
il paraît que le curé Lussier l’a pas mal brassée le printemps passé et qu’il
lui a dit de s’aider elle-même avant de demander aux autres de le faire. Mais j’ai
l’idée qu’elle changera jamais. Des fois, je me dis qu’elle rit de nous autres.
    – C’est
bien possible, conclut Marthe Giguère. Il faut pas être gênée pour demander de
l’aide pour faire son ordinaire quand on est même pas mariée et qu’on a pas d ’enfants.
    Ce
matin-là, Eugène Tremblay était parti avec ses trois fils nettoyer le fossé qui
longeait sa terre. Pendant ce temps, Thérèse s’occupait de peler la plupart des
pommes cueillies la veille dans les deux pommiers plantés entre la maison et le
poulailler. Claire et Aline l’aidaient.
    – Avec le
poêle qui chauffe, on dirait jamais que toutes les fenêtres de la cuisine sont
ouvertes, se plaignit Aline en passant une main sur la sueur qui perlait à son
front.
    – Si on
chauffe pas le poêle, comment penses-tu qu’on va faire la compote, toi ? lui
demanda sa sœur aînée, non sans laisser

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