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Les années folles

Les années folles

Titel: Les années folles Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel David
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juré que vivre sur une terre n’était plus bon que pour les vieux
incapables de s’adapter au progrès. On ne parlait plus maintenant que d’automobile,
de radio, de film, de restaurant, de musique et d’électricité. Ça, c’était le
progrès. Pourquoi peiner du matin au soir sur une terre quand on pouvait tout
obtenir facilement en ville ? Pourtant, il ne manquait pas de jeunes de la
paroisse qui étaient revenus désenchantés d’un bref séjour à Montréal.
    À les entendre, la
vie en ville n’était pas aussi rose qu’on voulait bien le laisser croire. L’entassement
dans des logis insalubres, le bruit et les journées de travail de douze à
quatorze heures pour un salaire de famine semblaient être le prix à payer pour
le progrès qui attirait tant les jeunes vers les villes.
    Ernest fit un
effort pour suivre avec plus d’attention la conversation entre son aîné et son
frère.
    – Où est-ce
que tu restes ? reprit Julien Veilleux.
    – Pas loin du
pont Jacques-Cartier. Su r Des Érables. Je suis resté en chambre pendant un an et, l’année passée, je me suis décidé à louer un petit appartement.
    – Il y a
aussi ben de la misère à Montréal, intervint sèchement Ernest Veilleux quand il
se rendit compte que Céline, Anne et Jérôme suivaient la discussion avec
attention.
    Le
jeune homme au visage poupin lissa durant un instant sa moustache avant de
répondre.
    –  Ah ça , p’ pa, on
peut pas dire que la vie est facile pour tout le monde en ville, même si c’est
pas mal moins pire depuis que la crise de 19 est finie. Il y a encore du monde
qui crève de faim parce que la Saint-Vincent-de-Paul peut pas leur donner
grand-chose. Il paraît qu’il y en a qui ont même pas assez d’argent pour s’acheter
du bois ou du charbon pour se chauffer durant l’hiver.
    – J’ai
entendu dire par un gars de Saint-Gérard qu’il y a des pères de famille qui
travaillent quatorze heures par jour et six jours par semaine pour cinq
piastres par semaine, dit l’oncle Julien. Il y aurait même des compagnies qui
engagent des enfants à quarante cennes pour dix heures d’ouvrage par jour.
    – Moi aussi, j’ai
entendu dire ça, reconnut Albert. Moi, je travaille pour le Canadien Pacifique.
Je vide les trains. J’ai une paye chaque vendredi. Mais je vois souvent des
gens qui ont l’air d’avoir faim et qui quêtent les deux cennes qu’il faut pour
se payer un ticket de petit char.
    – Tu
vois, Julien, conclut Ernest avec un contentement évident. Quand on vit sur une
terre, on est au moins sûrs de jamais manquer de manger.

Chapitre 14
Le jour de l’An
    Dès
le lendemain de Noël, les hommes retournèrent bûcher sur leur terre à bois, trop
heureux de profiter du temps doux qui persistait sur la région. Pendant ce
temps, les ménagères se remettaient à leurs fourneaux pour préparer les repas
du jour de l’ An . Pour leur part, les enfants étaient de
plus en plus énervés à la pensée des étrennes qu’ils allaient peut-être
recevoir le premier jour de l’année.
    Chez les Tremblay,
Thérèse, aidée par Claire et Aline, préparait de nombreux desserts qu’elle
avait promis d’apporter à sa sœur Louisette, qui avait exigé d’être l’hôtesse
de toute la famille au souper du jour de l’ An ,
chez elle, à Saint-Zéphirin. Hervé Durand, le benjamin de la famille vivant aux
États-Unis depuis vingt ans, avait écrit qu’il viendrait célébrer la première
journée de 1923 avec sa femme et sa fille. Yvette attendait ce moment avec une
impatience grandissante depuis que sa sœur lui avait communiqué le contenu de
la lettre qu’il lui avait fait parvenir de Boston au début du mois de décembre.
    – On a bien
assez d’une demi-douzaine de tartes au sucre et d’un gâteau au chocolat, déclara
Aline.
    – Tu vas
glacer une douzaine de beignes, lui commanda sa mère. On va être une trentaine
chez ton oncle Henri. Il est pas question qu’on manque de desserts.
    – Ça
fait combien de temps que vous avez pas vu votre frère, m’man ? demanda
Claire.
    Vingt ans. Il est
parti de la maison à vingt et un ans et on l’a pas revu depuis. Pendant toutes
ces années-là, on a juste reçu une ou deux lettres chaque année. Il paraît qu’il
est allé rester deux ans dans l’Ouest avant de décider de dé ménager aux États. J’ai bien hâte de le revoir
et surtout, de voir sa femme et sa fille.
    – Si les
chemins sont beaux, tempéra

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