Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Les autels de la peur

Les autels de la peur

Titel: Les autels de la peur Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Margerit
Vom Netzwerk:
tiendra à la disposition du Comité de Salut public jusqu’à concurrence de cent mille livres, pour dépenses secrètes, payées sur les ordonnances qui seront signées comme les arrêtés. Art. 5. – Il fera chaque semaine un rapport général et par écrit de ses opérations et de la situation de la République. Art. 6. – Il sera tenu un registre de toutes ses délibérations. Art. 7. – Le Comité n’est établi que pour un mois. » Un dernier article spécifiait que le nouvel organisme n’avait aucun pouvoir sur la Trésorerie, elle continuait à dépendre entièrement de la Convention.
    Séance tenante, on élut les membres. Barère fut nommé le premier, puis Claude, Delmas, Cambon, Danton, Jean de Bry, Guyton-Morveau, Treilhard et Delacroix. Jean de Bry s’étant récusé pour raison de santé, Robert Lindet le remplaça. Le lendemain même, dimanche, à midi ils se réunissaient dans l’aile du ci-devant pavillon de Flore, à présent pavillon de l’Égalité, où s’étaient tenues les dernières séances du Comité de défense générale. Un à un, des bureaux commençaient d’occuper les Tuileries que l’on aménageait depuis l’automne à l’usage de la Convention. Elle devait incessamment s’y transporter tout entière. Mais avant de quitter le vieux vaisseau du Manège, elle allait encore le faire retentir d’un des plus formidables tumultes qui l’eussent secoué.
    Depuis la trahison de Dumouriez, la Montagne et la Gironde s’en rejetaient la responsabilité l’une à l’autre, la seconde accusant la première d’avoir, par son jacobinisme et ses excès de sans-culotterie, poussé le général à la révolte, la Montagne répliquant qu’il était la créature de Brissot, de Buzot, de Roland, en un mot des girondistes. Ils pouvaient d’autant moins le nier que le jour même où Dumouriez saisissait les envoyés de la Convention, Brissot, par un coup de son génie habituel, insérait dans sa feuille un article témoignant au général toute estime et confiance. Du coup, le malheureux avait définitivement perdu la voix. Ses amis criaient, eux. Cherchant une défaite, ils ne trouvèrent rien de mieux que de se rejeter sur Danton, sur ses relations avec le traître.
    Danton venait pourtant de tenter encore une fois un rapprochement avec les Girondins. Au Comité de défense, il avait, dans la salle même, reproché de nouveau à Guadet son intolérance. « Guadet, lui avait-il dit, tu ne sais point pardonner, tu seras victime de ton opiniâtreté. La royauté renaîtra de nos discordes, insatiable de vengeances. Pitt et Cobourg nous observent. » Toujours intraitable, Guadet, s’irritant : « Il n’y a pas de pardon. La guerre, et qu’un des deux partis périsse. » Alors Danton, hochant tristement le front : « Tu veux la guerre, tu auras la mort. »
    Et cependant, même après cela il avait, Claude le savait par Fabre, dîné encore, avec les Brissotins réunis au café Procope, dans la salle du haut. Comme cinq mois plus tôt, chez Dumouriez, toutes les têtes de la Gironde étaient là : Brissot, Buzot, Vergniaud, Isnard, Pétion, Condorcet, Gensonné, Clavière, Barbaroux, Guadet, Ducos, Lasource, et avec eux, seuls Fabre et Danton.
    « Vous avez, leur dit-il, mené contre moi une campagne impitoyable qui n’a pas été sans porter des fruits. Un autre aurait succombé. Je suis toujours debout et bien vivant. Vous ne m’abattrez pas. Une dernière fois, c’est la paix que je vous apporte. Vous me traitez comme un buveur de sang. Erreur absurde ! Je suis le plus humain des hommes : bon père, bon fils, ami fidèle, bon mari. Hélas, vous savez le malheur qui m’a frappé. Mon cœur ne vaut pas moins que les vôtres. Oui, je le sais, mon aspect vous rebute. Marat est un crapaud, moi je suis un tigre, un cyclope. Mais vous, êtes-vous des femmes pour vous laisser guider par vos impressions nerveuses ? Je connais vos ressources, j’admire vos talents. Pourquoi vous obstinez-vous à me décevoir et me rebuter ? Tant pis pour vous, tant pis pour moi. Ensemble, nous aurions fait de grandes choses. Par sentiment, par politique je ne veux pas votre perte. Renoncez donc à vos malheureux préjugés. »
    Vains efforts, espoir insensé. L’entente, impossible à l’automne, l’était encore bien davantage aujourd’hui. Entre eux, après le sang de Septembre, il y avait maintenant celui du roi. Fabre ne rapporta point à Claude les propos, il lui dit

Weitere Kostenlose Bücher