Les Aveux: Nouvelle Traduction Des Confessions
toi, les uns et les autres
ont appris que tu es l’auteur de tout ça.
J’ai entendu une autre de tes paroles : ne cours pas après tes désirs et
refrène tes appétits.
Et par ta bienveillance, j’en ai entendu encore une autre que j’ai
beaucoup aimée : manger ne nous comble pas, et ne pas manger ne
nous fait pas manquer.
Ce qui revient à dire que je ne serai ni repu ni éprouvé.
J’en ai entendu encore une autre : moi, j’ai appris à me contenter de
ce que j’ai. Je sais vivre dans l’abondance et je sais supporter le manque.
Je peux tout en celui qui me rend fort.
Soldat du camp céleste et non poussière que nous sommes. Mais
rappelle-toi, Seigneur, que cette poussière, c’est nous et que de cette
poussière tu as fait l’humanité. Elle était perdue. Elle est retrouvée.
Paul lui-même ne pouvait rien, fait de la même poussière que nous, et
j’ai aimé qu’il dise sous le souffle de ton inspiration : je peux tout en
celui qui me rend fort.
Rends-moi fort. Je pourrai tout. Donne de quoi suivre tes ordres et
ordonne ce que tu veux. Lui avoue ce qu’il a reçu et ce dont il se félicite, il s’en félicite dans le Seigneur.
J’en ai entendu un autre supplier : arrache de moi l’appétit du sexe.
Clairement, mon Dieu saint, c’est toi qui donnes de quoi faire ce que
tu commandes de faire.
46.
Tu me l’as enseigné, père de bonté : tout est pur pour les purs, mais
il est mal, pour un homme, de manger pour offenser. Et toutes tes créatures sont bonnes, rien n’est à rejeter, pris en action de grâces. Et un aliment ne nous rapprochera pas de Dieu. Que personne ne nous juge sur
la nourriture ou sur la boisson. Que celui qui mange ne méprise pas
celui qui ne mange pas, et que celui qui ne mange pas ne juge pas celui
qui mange 5 . C’est ce que j’ai appris.
Merci à toi, loué sois-tu, mon Dieu, mon maître, qui frappes mes
oreilles, qui éclaires mon cœur. Arrache-moi à toute tentation. Je ne
crains pas l’impureté de la nourriture mais l’impureté du désir. Je sais
que Noé fut autorisé à manger de toute espèce de viande comestible 6 .
Qu’Élie reprit des forces en mangeant de la viande 7 . Que Jean, dans
son abstinence étonnante, n’eut rien à craindre des animaux, des sauterelles dont il fit sa nourriture 8 . Je sais aussi qu’Esaü a été abusé par son
envie de lentilles 9 , et David s’est reproché d’avoir désiré de l’eau 10 , que
notre roi a été tenté non par de la viande mais par du pain 11 . Voilà
pourquoi aussi le peuple dans le désert a mérité la critique non pour
avoir désiré de la viande mais pour avoir murmuré contre le Seigneur
quand il était affamé 12 .
47.
Mis à l’épreuve, je dois lutter chaque jour contre le désir de boire et
de manger. Je ne peux pas décider une bonne fois pour toutes de neplus y toucher, comme j’ai abandonné toute relation sexuelle. Il faut
donc refréner son gosier en l’ouvrant et en le serrant avec modération.
Mais qui, Seigneur, ne passe jamais les bornes de la nécessité ? S’il
existe, il est grand. Qu’il chante la grandeur de ton nom. Ce n’est pas
moi. Je suis un homme fautif. Mais je chante aussi la grandeur de ton
nom. Celui qui a vaincu le monde intercède auprès de toi pour mes
fautes. Il me compte parmi les membres infirmes de son corps. Parce
que tes yeux ont vu son imperfection. Et que tout le monde sera inscrit
dans ton livre 13 .
48.
Les plaisirs olfactifs n’ont jamais été ma passion. Je ne les recherche
pas mais je ne les rejette pas non plus. Je pourrais très bien m’en passer
définitivement. Je me vois comme ça, mais je peux aussi me tromper.
Une obscurité criminelle cache à mes yeux ce dont je suis capable. Mon
esprit s’interroge sur ses propres forces sans trop oser se faire confiance.
Son potentiel reste la plupart du temps dissimulé s’il ne se manifeste pas
dans l’expérience. Personne ne doit se sentir en sécurité durant cette
vie, provocation d’un bout à l’autre. Celui qui a pu de pire devenir
meilleur pourrait aussi de meilleur devenir pire.
Un seul espoir, une seule assurance, une seule promesse : ton amour.
49.
J’ai davantage été captivé et subjugué par les plaisirs de l’ouïe. Mais
tu m’en as délivré et libéré. Maintenant, je le reconnais, quand j’entends
des chants vibrant de tes paroles, d’une voix suave et exercée, j’éprouve
une certaine attirance mais pas au point
Weitere Kostenlose Bücher