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Les Bandits

Les Bandits

Titel: Les Bandits Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: E. J. Hobsawm
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groupes d’opposition n’avaient
d’autre solution que le recours aux armes, ce qui, dans les cas extrêmes, voulait
dire qu’ils se transformaient en chefs de bande. Les exemples sont innombrables.
Sleeman, dans son
Journey through the
Kingdom of Oude in 1849-1850
[106] ,
en donne toute une liste, qui inclut Imam Buksh, lequel conserva sa bande et
poursuivit ses pillages « bien qu’il eût reconquis son domaine aux
conditions qu’il avait lui-même fixées ». Ce genre de pratique était
également ordinaire, sinon inévitable, à Java.
    Un bon exemple de ce genre de situation est offert par le département
de Cajamarca, au Pérou, qui, au début du XX e siècle,
vit apparaître un certain nombre de bandits d’« opposition », en
particulier Eleodoro Benel Zulœta, contre qui de sérieuses campagnes militaires
furent organisées au milieu des années 1920 [107] .
En 1914, Benel, propriétaire terrien, avait loué l’
hacienda
Llaucán, se rendant ainsi assez impopulaire
auprès de la paysannerie indienne locale, dont le mécontentement était canalisé
contre lui par les frères Ramos, qui avaient déjà sous-loué ce domaine. Benel
fit appel aux autorités, qui massacrèrent les Indiens comme on le faisait
couramment à l’époque, ce qui eut pour résultat de renforcer leur hostilité. Les
Ramos, pensant que la situation leur permettait d’en finir avec Benel, s’arrangèrent
pour tuer son fils. « Malheureusement, la justice ne bougea pas et le
crime resta impuni », comme le note avec tact un historien qui ajoute que
les assassins bénéficiaient du soutien de quelques autres ennemis personnels de
Benel, par exemple Alvarado de Santa Cruz. Là-dessus Benel réalisa ses biens
pour financer une « formidable légion dont les membres (
trabajadores
) étaient prêts à risquer
leur vie au service de leur chef », et partit en guerre contre Alvarado et
les Ramos. Cette fois, la justice se mit en branle, mais Benel, qui avait
fortifié sa propre
hacienda
, la
défia, ce qui bien entendu contribua à « lui fournir de nouveaux
sympathisants, auxquels il donna tout ce qu’il fallait pour vivre ».
    Il n’était en fait que le plus redoutable des nombreux chefs
de bande dont l’apparition coïncida avec le quasi-effondrement de l’autorité
gouvernementale, et dont les motivations étaient un mélange complexe de
rivalités personnelles et politiques, de vengeance, d’ambitions politiques et
économiques et de rébellion sociale. Comme le dit un militaire qui s’est fait l’historien
de cette campagne :
    « Dans ces régions, les paysans étaient humbles, apathiques
et incapables de réagir contre les tyrans locaux. Cependant, se sentir vivant, c’est
aussi se sentir fou de rage contre l’injustice. C’est pourquoi certains
potentats locaux et les autorités qui n’étaient pas intellectuellement
préparées à la difficulté de leur tâche arrivèrent à unir contre eux des gens
qui gagnaient en audace et en détermination. L’histoire de tous les peuples
montre que, dans ce genre de situation, on voit se former des bandes. »
    À Chota, elles marchaient avec Benel, à Cuteno avec les
Vasquez [108] et d’autres. Ces hommes appliquaient leur propre justice, punissaient les
usurpateurs, conféraient de la pompe aux mariages, poursuivaient les criminels,
et imposaient l’ordre aux tyrans locaux.
    En période d’élections, les députés se servaient de ces
combattants, qu’ils armaient et lançaient contre leurs adversaires politiques. Les
bandes armées se renforcèrent, et le banditisme en arriva à semer la panique
chez les citoyens paisibles [109] .
    Benel prospéra jusqu’en 1923, date à laquelle il commit l’erreur
de s’allier à quelques potentats locaux qui projetaient de renverser le
redoutable président Leguia. D’où un grand déploiement de forces, à la suite
duquel – mais non sans mal – la situation à Cajamarca finit par se clarifier ;
Benel fut tué en 1927, et les Ramos et Alvarado, ainsi que d’autres chefs de
bande, disparurent également de la scène. Ces rivalités locales sont inséparables
du banditisme.
    Autre cas exemplaire, celui du clan McGregor du XVI e au XVIII e siècle, et en
particulier de son membre le plus célèbre, c’est-à-dire Rob Roy. En effet, les
McGregor demeurèrent un clan de voleurs parce que leurs ennemis ne leur laissèrent
pas d’autre solution que celle de l’extermination. (Le clan fut officiellement
dissous et son

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