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Les Bandits

Les Bandits

Titel: Les Bandits Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: E. J. Hobsawm
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par les
bandits dans les guerres de libération nationale, c’est un tout autre problème.
    Il est plus difficile pour les bandits de s’intégrer aux
mouvements révolutionnaires modernes qui sont sociaux et politiques et ne sont
pas dirigés avant tout contre des étrangers. Ce n’est pas que les bandits aient
plus de mal à comprendre, tout au moins en principe, les slogans de liberté, égalité,
fraternité, terre et liberté, démocratie et communisme, quand ces slogans sont
exprimés dans une langue qui leur est familière. Au contraire, ce sont là pour
eux des vérités évidentes et, ce qui les étonne, c’est que des hommes puissent
trouver les mots justes pour les décrire. « La vérité, tout le monde la
sent », déclarait le farouche cosaque Surovkov, en entendant Isaac Babel
lire un discours de Lénine dans la
Pravda
.
« Le problème, c’est de la trouver. Mais lui, il a tellement de flair qu’il
la débusque du premier coup. » Le problème, c’est que ces vérités
évidentes sont exprimées par des citadins, des gens instruits, des
gentilshommes, c’est-à-dire des gens qui s’opposent à Dieu et au tsar et
représentent des forces qui, aux yeux des paysans arriérés, sont des forces
hostiles ou incompréhensibles.
    Il arrive pourtant que les deux mondes se rejoignent. Le
grand Pancho Villa, ce formidable général des armées révolutionnaires, fut
amené à la Révolution mexicaine par des hommes de Madero. De tous les bandits
professionnels du monde occidental, c’est peut-être lui qui eut la plus belle
carrière révolutionnaire. Quand les émissaires de Madero lui rendirent visite, il
se laissa facilement convaincre. En effet, Madero était un homme riche et instruit.
Qu’il fût du côté du peuple prouvait sa générosité et la pureté de la cause. Lui-même
était un homme du peuple et un homme d’honneur ; par ailleurs, cette
invitation était un hommage à sa qualité de bandit : dès lors, comment
pouvait-il hésiter à mettre ses hommes et ses armes à la disposition de la
révolution [120]  ?
    Il a pu arriver que des bandits moins éminents adhèrent à la
cause de la révolution pour des raisons analogues. Non pas parce qu’ils
comprenaient les complexités des théories démocratique, socialiste, ou même
anarchiste (bien que cette dernière soit assez peu complexe), mais parce que
pour eux la cause du peuple et des pauvres était juste de toute évidence et que
les révolutionnaires, par leur générosité, leur esprit de sacrifice et leur
dévouement, en d’autres termes par leur
comportement
personnel
, faisaient la preuve qu’ils étaient dignes de confiance. C’est
pourquoi le service militaire et la prison, qui sont les endroits où les
bandits et les révolutionnaires modernes ont le plus de chances de se
rencontrer dans des conditions d’égalité et de confiance réciproque, ont vu
plus d’une conversion politique. On en trouve plusieurs exemples dans les
annales du banditisme moderne en Sardaigne. C’est également la raison pour
laquelle les hommes qui devinrent les chefs de brigands pro-Bourbons en 1861
étaient souvent ceux-là mêmes qui s’étaient ralliés en nombre à la bannière de
Garibaldi, lequel avait l’aspect, les paroles et le comportement d’un « véritable
libérateur du peuple ».
    Aussi, quand, sur le plan idéologique ou personnel, une
jonction peut s’opérer entre eux et les militants de la révolution moderne, il
arrive que les bandits, soit en tant que bandits, soit en tant que paysans
individuels, adhèrent à des mouvements extrêmement nouveaux comme ils auraient
adhéré à des mouvements de type ancien. Les bandits macédoniens combattirent
pour le mouvement Komitadji (organisation révolutionnaire macédonienne de l’intérieur
ou IMRO) au début du XX e siècle, et, de leur côté, les
instituteurs qui les organisèrent adoptèrent les structures militaires
traditionnelles des guérilleros
haïdoucs
.
Tout comme les brigands de Bantam se joignirent au soulèvement communiste de
1926, la plupart de ceux de Java emboîtèrent le pas au nationalisme séculaire
de Sukarno ou au socialisme séculaire du parti communiste, et les brigands
chinois suivirent Mao Tsé-toung, qui, de son côté, fut fortement influencé par
les traditions autochtones de la résistance populaire.
    Comment sauver la Chine ? À cela le jeune Mao répondit
qu’il fallait « imiter les héros de Liang Shan P’o »,

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