Les chasseurs de mammouths
endroit.
Jondalar connaissait mal la configuration générale du terrain et
devait souvent s’en remettre à la mémoire plus fidèle d’Ayla. Quand celle-ci
avait un doute, elle faisait confiance à Whinney. Plus d’une fois, par le
passé, la jument l’avait ramenée chez elle et elle paraissait savoir où elle
allait. Parfois montés à deux sur son dos, parfois la chevauchant tour à tour
ou mettant pied à terre pour la laisser se reposer, Ayla et Jondalar
poursuivirent leur route jusqu’au moment où ils durent faire halte pour la
nuit. Ils dressèrent alors un campement rudimentaire, avec un petit feu, leur
tente faite de peaux de bêtes et leurs fourrures de couchage. Ils se
confectionnèrent une bouillie de graines sauvages, et la jeune femme prépara un
breuvage à base d’herbes.
Le lendemain matin, pour se réchauffer, ils burent une autre
tisane, tout en refaisant leurs ballots. En route une fois de plus, ils
mangèrent de petites galettes faites de viande séchée et pilée et de fruits
secs mêlés de graisse. Mis à part un lièvre, qu’ils levèrent par hasard, et qu’Ayla
tua avec sa fronde, ils ne chassaient pas. Mais ils ajoutèrent aux provisions
dont Nezzie les avait munis les pignons, nourrissants et riches en huile, des
pommes de pins recueillies au cours de leurs haltes, et qu’ils jetaient sur le
feu pour les faire ouvrir dans des claquements secs.
Le terrain, autour d’eux, changeait graduellement, devenait plus
rocheux, plus mouvementé, avec des ravins, des canyons aux parois abruptes, et
la jeune femme se sentait envahie d’un trouble croissant. Le territoire lui
semblait familier, comme le paysage qui s’étendait au sud et à l’ouest de sa
vallée. Lorsqu’elle découvrit un escarpement dont les strates diversement
colorées formaient un dessin particulier, son cœur bondit dans sa poitrine.
— Jondalar ! Regarde ! Tu vois ça ?
cria-t-elle, l’index pointé. Nous sommes presque arrivés !
Whinney elle-même semblait gagnée par son agitation : sans
y être invitée, elle pressa l’allure. Ayla guettait un autre point de repère,
un affleurement rocheux dont la forme distinctive lui rappelait une lionne
accroupie. Lorsqu’elle la découvrit, ils prirent la direction du nord jusqu’au
moment où ils parvinrent au bord d’une pente raide, jonchée de graviers et de
gros cailloux. Ils s’arrêtèrent, regardèrent devant eux. En bas, sous le
soleil, une petite rivière coulait vers l’est, et ses eaux jetaient des éclairs
en éclaboussant les rochers. Ils mirent pied à terre, descendirent
précautionneusement. Les chevaux s’engagèrent dans l’eau, s’arrêtèrent pour
boire. Ayla retrouva le gué qu’elle avait toujours utilisé : quelques
pierres qui émergeaient du courant, avec un seul espace un peu plus large qu’il
fallait sauter.
— L’eau est meilleure, ici. Regarde comme elle est
claire ! s’écria-t-elle. Pas une trace de boue. On voit le fond. Et
regarde, Jondalar, les chevaux nous ont rejoints !
Jondalar souriait tendrement de son exubérance. Lui-même, devant
la longue vallée familière, éprouvait, en moins enthousiaste peut-être, ce même
sentiment de se retrouver chez lui. Les vents cruels, le froid glacial des
steppes ne faisaient qu’effleurer ce lieu protégé, et, même dépouillé de ses
feuillages d’été, il montrait une végétation plus riche, plus abondante. En
avançant vers le fond de la vallée, à l’est, la pente abrupte qu’ils venaient
de descendre devenait une muraille rocheuse verticale. Une large frange d’arbres
et de broussailles en bordait la base, sur l’autre berge du cours d’eau, avant
de se faire plus rare, pour se transformer en un champ d’herbe dorée qui se
soulevait en vagues sous le soleil de l’après-midi. A droite, l’étendue d’herbe
haute montait par degrés jusqu’aux steppes mais elle allait en se rétrécissant,
et, vers le fond de la vallée, la pente se faisait de plus en plus raide, jusqu’à
devenir l’autre muraille d’une gorge étroite.
A mi-hauteur, un petit troupeau de chevaux des steppes avait
cessé de paître pour tourner la tête dans la direction des voyageurs. L’un d’eux
hennit. Whinney lui répondit en encensant. Le troupeau regarda approcher les
intrus jusqu’au moment où ceux-ci se trouvèrent tout près. Alors, devant l’étrange
odeur humaine qui se faisait de plus en plus forte, les chevaux, d’un même
mouvement, virèrent tous
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