Les chasseurs de mammouths
décorée, entre autres
choses, des plumes blanches de la grande grue nordique.
Les enfants eux-mêmes étaient en tenue de cérémonie. Quand Ayla
vit Latie, à la limite du groupe qui tournait autour d’elle et de Deegie, elle
lui demanda de s’approcher pour lui montrer sa tenue, ce qui était, en fait,
une invitation à se joindre à elles. Latie admira la manière dont Ayla portait
les perles et les coquillages que lui avait offerts Deegie ; elle allait
essayer d’en faire autant, dit-elle. Ayla sourit. Elle s’était contentée de les
arranger en torsade sur son front, à la manière dont elle portait sa fronde.
Latie ne tarda guère à se glisser dans le badinage général et elle eut un
sourire timide pour Wymez quand il lui dit qu’il la trouvait charmante – ce
qui, de la part de cet homme taciturne, représentait un compliment extravagant.
Tout de suite après Latie, Rydag s’approcha. Ayla le prit sur ses genoux. Sa
tunique était faite sur le modèle de celle de Talut, mais bien moins
ornementée : jamais il n’aurait pu supporter un tel poids. La tenue de
cérémonie de Talut pesait plusieurs fois autant que Rydag lui-même. Peu d’hommes
auraient été capables d’endurer ne serait-ce que sa coiffure.
Ranec tarda à faire son apparition. Ayla avait remarqué son
absence, l’avait cherché du regard, mais, lorsqu’elle le vit enfin, elle fut
prise au dépourvu. Chacun avait pris plaisir à exhiber sa tenue des grands
jours, tant elle se montrait impressionnée, ravie, sans rien cacher de son
admiration. Ranec l’avait observée de loin. Il voulait créer pour elle un effet
mémorable. Il retourna donc au Foyer du Renard pour se changer. Il se glissa
ensuite près d’elle pendant qu’elle était absorbée par la conversation. Quand
elle tourna la tête, ce fut pour le trouver brusquement à ses côtés. A son
regard stupéfait, il sut qu’il avait réussi.
La coupe et le style de sa tunique étaient insolites. La forme
en trapèze et les larges manches lui conféraient une allure différente et
trahissaient une origine étrangère. Ce n’était pas une tunique mamutoï. Il l’avait
achetée – et payée très cher – mais il avait su au tout
premier regard qu’il la lui fallait. Quelques années plus tôt, l’un des Camps
du nord avait fait une expédition de négoce vers un peuple de l’ouest, plus ou
moins apparenté aux Mamutoï. Le chef avait reçu la tunique en témoignage de
liens communs et de futures relations amicales. Il ne tenait pas à s’en
dessaisir, mais Ranec s’était montré si insistant, il en avait offert un si bon
prix que l’homme n’avait pu refuser.
La plupart des vêtements portés par les membres du Camp du Lion
avaient été teints en tons de brun, de rouge sombre ou de jaune foncé, ils
étaient abondamment ornés de perles d’ivoire, de dents, de coquillages et d’ambre,
et rehaussés de fourrures et de plumes. La tunique de Ranec était d’un ivoire
crémeux, plus doux que le blanc pur. La couleur, il le savait, faisait un
contraste frappant avec sa peau sombre. Mais plus frappante encore était la
décoration. Le devant et le dos de la tunique servaient de fond pour des images
créées à l’aide de piquants de porc-épic et de fins cordons teints de couleurs
primaires, brillantes, violentes.
On voyait sur le devant le portrait abstrait d’une femme assise,
composé de cercles concentriques dans des tons de rouge pur, d’orangé, de bleu,
de noir et de brun. Une série de cercles représentait le ventre de la femme,
deux autres évoquaient ses seins. Des arcs de cercles dans d’autres cercles
figuraient ses hanches, ses épaules, ses bras. La tête était un motif basé sur
un triangle, menton aigu et crâne plat, avec des lignes énigmatiques pour
représenter les traits du visage. Au centre du ventre et des seins, placés là
manifestement pour figurer le nombril et les mamelons, se trouvaient des
grenats brillants. Un rang de pierres de couleur – tourmalines vertes
et roses, grenats, aigues-marines [8] – avait
été fixé le long de la ligne plate de la tête. Par-derrière, la tunique
montrait la même femme vue de dos. Les cercles concentriques, les arcs
représentaient ses épaules et ses fesses. Les mêmes séries de couleurs se
retrouvaient plusieurs fois autour des manches largement évasées.
Ayla, incapable de dire un mot, se contentait d’ouvrir de grands
yeux. Jondalar lui-même était saisi de stupeur.
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