Les chasseurs de mammouths
loups. Qu’est-ce
qui viendra ensuite ? Je ne suis pas un animal et je ne veux pas vivre
avec des animaux.
Il s’en fut à grandes enjambées, peu soucieux de savoir, au cas
où il les obligerait à prendre parti, si les autres occupants du Camp du Lion
lui préféreraient Ayla et ses animaux.
— Il te reste encore de ce rôti de bison, Nezzie ?
— Tu dois mourir de faim. Je vais te servir quelque chose.
— Ce n’est pas pour moi. C’est pour le petit loup.
Nezzie apporta à Ayla une tranche de viande, tout en se
demandant comment un louveteau si jeune allait pouvoir la manger. Mais Ayla se
rappelait une leçon apprise bien longtemps auparavant : les tout-petits
peuvent se nourrir comme leur mère, à condition que la nourriture soit plus
tendre, plus facile à mâcher et à avaler. Naguère, elle avait ramené dans sa
vallée un petit lion des cavernes blessé et elle l’avait nourri de viande et de
bouillon, au lieu de lait. Les loups mangeaient de la viande eux aussi. Du
temps où elle les observait, afin de tout apprendre d’eux, elle avait vu, elle
s’en souvenait, des loups plus âgés mastiquer de la viande et l’avaler, pour la
rapporter à la tanière et la déglutir au profit des louveteaux. Elle-même n’avait
pas besoin de la mastiquer, elle avait des mains, un couteau affilé, elle
pouvait la hacher.
Après avoir fait de la tranche de bison une sorte de pulpe, Ayla
la mit dans une coupe, y ajouta de l’eau tiède pour amener la température à
celle du lait maternel. Le louveteau avait reniflé tout autour de la fosse à
dessiner mais, apparemment, il avait peur de s’aventurer hors de ses limites.
Ayla s’assit sur la natte, tendit la main, appela doucement le petit animal.
Elle l’avait arraché à un endroit solitaire et froid, elle lui avait apporté la
chaleur, le réconfort, et son odeur était pour lui étroitement associée à l’idée
de sécurité. D’un pas chancelant, la petite boule de fourrure s’approcha de la
main tendue.
Elle souleva d’abord le louveteau pour l’examiner de plus près.
Le petit loup était un mâle, encore très jeune : sans doute ne s’était-il
pas écoulé plus d’un cycle lunaire depuis sa naissance. Elle se demandait s’il
avait des frères et sœurs, et, si tel était le cas, quand ils étaient morts.
Apparemment il était en bonne santé et ne paraissait pas mal nourri. La louve
noire pourtant, était décharnée. En songeant aux terribles difficultés contre
lesquelles la louve avait dû lutter pour maintenir en vie cet unique louveteau,
elle se rappelait ses épreuves personnelles. Sa résolution en fut encore
renforcée. Si elle le pouvait, elle garderait en vie le fils de la mère louve,
en dépit de tous les obstacles, et ni Frébec ni personne d’autre ne l’en
empêcherait.
Ayla prit le louveteau sur ses genoux, trempa un doigt dans la
viande finement hachée, le ramena sous le nez du petit loup. Il avait faim. Il
flaira la viande, y donna un petit coup de langue, avant de nettoyer
consciencieusement le doigt d’Ayla. Elle refit la même opération, et, cette
fois encore, il fit avidement disparaître la viande. Elle continua de le
nourrir ainsi. Elle sentait le petit ventre s’arrondir à mesure. Quand elle
pensa qu’il avait assez mangé, elle lui offrit un peu d’eau, mais il l’effleura
seulement du bout de la langue. Elle se leva alors, l’emporta vers le Foyer du
Mammouth.
— Tu trouveras quelques vieilles corbeilles, je crois, sur
cette banquette, là-bas, dit Mamut, qui l’avait suivie.
Elle lui sourit. Il savait très précisément ce qu’elle avait en
tête. Elle fouilla un peu, découvrit un grand panier à cuisine qui tombait en
morceaux à une extrémité. Elle le plaça sur la plate-forme, à la tête de son
lit. Mais, quand elle y plaça le louveteau, il gémit pour en sortir. Elle le
prit, regarda autour d’elle, sans bien voir ce qui l’apaiserait. Elle fut
tentée de le prendre avec elle dans son lit mais elle était déjà passée par là
avec les poulains et les lionceaux. Il était trop malaisé par la suite de les
amener à modifier leurs habitudes. D’ailleurs Jondalar, n’aurait peut-être pas
envie de partager sa couche avec un loup.
— Il n’est pas heureux dans son panier. Sans doute lui
faudrait-il sa mère ou d’autres louveteaux pour lui tenir compagnie, dit-elle à
Mamut.
— Donne-lui quelque chose qui t’appartienne, Ayla,
conseilla le vieil homme. Quelque
Weitere Kostenlose Bücher