Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Les cochons d'argent

Les cochons d'argent

Titel: Les cochons d'argent Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Lindsey Davis
Vom Netzwerk:
remplissait devant les filons. Du fourneau s’élevait un grondement incessant, agrémenté à certains moments du sifflement soutenu des soufflets s’activant autour des fours à coupellation.
    Il m’arrive aujourd’hui de sourire quand je me rappelle la suite des événements.
    Un jour, un poney se présenta, tirant, je crois, une jolie carriole, accompagné d’un bon nombre de cavaliers qui n’avaient pas l’air d’amateurs. Ils dépassèrent les mines et vinrent s’arrêter non loin de ma cellule. On annonça le procureur Flavius, d’une voix martiale. Quelqu’un émit un grognement. Puis une autre voix, cinglante comme une herminette sur du bois :
    — … celui que vous appelez « pinson ».
    Je ne devais vraiment pas être au mieux. Ce n’était pas encore l’agonie, mais je délirais ferme : je croyais entendre la fille du sénateur. Au début, je ne parvins même pas à me rappeler son nom, avant d’aller le repêcher Dieu sait où : Helena…
    — Lequel était-ce… Mort, j’en ai peur…
    — Alors je souhaite voir le cadavre. S’il est enterré, déterrez-le !
    Belle dame ! Acceptez que mes serviteurs vous offrent un peu de vin dans une coupe en argent !
    La porte s’ouvrit, grinçant sur son unique charnière, et l’éclat d’une torche vint me surprendre.
    — Mais oui, c’est bien lui. Notre cher fuyard.
    J’étais presque trop crevé pour l’insulter, mais j’y parvins.
    Cornix se tenait derrière elle, l’air soumis et piteux.
    Après un coup d’œil dégoûté à ma cellule, elle lança, acerbe :
    — Je vois qu’on l’a mis au repos et aux petits soins !
    J’eus un peu de peine pour Cornix. Elle le provoquait. Et avec une pareille escorte militaire, il n’avait qu’à filer doux !
    Il m’attrapa sur ma paillasse de fougères puantes et m’étendit aux pieds d’Helena, dehors dans la boue. Je fermai les yeux, ébloui par la lumière qui transperçait les épais nuages. Je conservais l’image d’une jeune femme au profil imposant, drapée dans plusieurs épaisseurs d’une étoffe bleu foncé… et aussi la frange en laine toute froissée de sa robe, son visage pâle au front plissé et quelques mèches d’une douce chevelure…
    Je faillis perdre connaissance.
    — Marcus ! lança Helena Justina, avec ce ton méprisant bien compréhensible face à un esclave disgracié.
    Mon visage reposait dans une flaque, à quelques centimètres de ses pieds.
    Belle paire de chaussures ! Un cuir gris ardoise, avec une multitude de trous minuscules disposés en spirale. Elle ne méritait pas d’aussi gracieuses chevilles…
    — On peut te féliciter ! Et dire qu’oncle Gaïus avait confiance en toi. Regardez-moi ça !
    À quoi s’attendait-elle ? Un esclave en fuite emmenait rarement une tunique de rechange et une éponge pour sa toilette… Je m’efforçais de garder pied en m’accrochant à ce visage maquillé, agressif comme à son habitude.
    — Vraiment, Marcus ! Regarde-moi ton état : une jambe cassée, les côtes fêlées, des engelures, les cheveux teigneux… et quelle saleté !
    Elle regarda toute cette crasse avec un air dégoûté. Elle me fit baigner dans les bains réservés aux officiels, de peur que je ne salisse l’élégant cabriolet de sa tante. Un soldat qui connaissait sans doute ma véritable identité me confectionna une nouvelle attelle, mais il s’en sortit mal tant il avait honte.
     
    Récuré de la tête aux pieds et débarrassé de mes haillons – j’héritai de la tunique usagée d’un autre dont l’odeur, mille fois meilleure, m’indisposa pourtant –, je me retrouvai dans la carriole. Cornix s’était éclipsé pour un de ses après-midi de torture et de fornication dans les cabanes. Je grelottais ; mademoiselle me balança une couverture de voyage avec un sifflement agacé. Je me sentais toujours humide. J’avais réussi à me laver grossièrement ; mais il ne semblait pas conseillé, devant Cornix et un soldat, de perdre trop de temps à sécher chaque doigt de pied un par un.
    La tête me grattait follement tant j’avais perdu l’habitude d’être propre. Ma peau entière m’avait l’air vivante. Le moindre souffle écorchait mon visage.
    Helena Justina sortit un manteau que je me rappelai vaguement avoir possédé dans une vie antérieure. Un assez joli vêtement vert fermé par un solide bouton en argent : j’avais été un garçon raffiné, du meilleur goût. Je parvins à me hisser

Weitere Kostenlose Bücher