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Les Conjurés De Pierre

Les Conjurés De Pierre

Titel: Les Conjurés De Pierre Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Philipp Vandenberg
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l’extérieur.
    Afra respira profondément. Cette entrevue avec Werinher l’avait complètement déstabilisée. Elle ne savait plus que croire.
    Ulrich von Ensingen jouait-il un double jeu ? Pourquoi avait-elle subitement plus confiance en maître Werinher qu’en Ulrich ? Elle était si troublée qu’elle commençait à douter d’elle-même : le laquais qui était venu chercher Werinher n’était pas le même que celui qui l’avait amené – pourtant, il portait la même livrée. Elle en était sûre. Quelle conclusion en tirer ? Afra avait perdu tous ses repères. Serait-elle devenue sans s’en apercevoir l’instrument des forces maléfiques qu’elle était précisément en train de combattre ?
    Tandis qu’elle s’empêtrait dans ses réflexions plus qu’elle ne les clarifiait, elle entendit la porte s’ouvrir. Ulrich entra. Il titubait plus qu’il ne marchait et faisait pitié à voir avec ses cheveux ébouriffés tombant sur le front. Il s’avança vers Afra s’efforçant de faire bonne figure. Il portait encore l’habit sombre qu’il avait sur lui la veille au soir pendant l’orgie de l’évêque mais, compte tenu de l’état du vêtement, on aurait pu croire qu’il s’était roulé dans un champ de blé après la moisson.
    À sa vue, Afra piqua une colère noire. Et comme il se taisait, elle lui lança :
    — Je me réjouis de constater que tu te souviens malgré tout de ce que tu fais dans la vie !
    L’architecte hocha la tête. Il promena des yeux effarés autour de lui. Le désordre ambiant ne semblait pas le déranger énormément.
    — Quel jour sommes-nous aujourd’hui ? demanda-t-il sur un ton indifférent.
    — Vendredi.
    — Vendredi ? Et, dis-moi, quand a eu lieu la fête de l’évêque ?
    — Hier. Depuis, une nuit et une journée entière se sont écoulées !
    — Je comprends mieux.
    Afra enrageait de plus belle.
    — Quant à moi, je ne comprends pas ! hurla-t-elle au comble de l’exaspération. Je te prenais pour un honnête homme. Mais en fait, tu ne résistes pas au premier jupon qui passe. Qu’est-ce que cette traînée de sicilienne a de plus que moi ? Dis-moi un peu ! Qu’au moins, je le sache !
    Ulrich, penaud comme un petit voleur qu’on vient de surprendre en flagrant délit, se laissa enguirlander sans broncher. Il alla s’asseoir sur une chaise, étendit les jambes devant lui et regarda ses pieds.
    Ses chaussures étaient dépareillées. La différence sauta immédiatement aux yeux d’Afra.
    — Dans l’empressement, tu as enfilé une des chaussures de l’évêque ? remarqua-t-elle sur un ton sarcastique.
    — Je suis désolé, répliqua Ulrich hébété, je suis vraiment désolé.
    — Fi donc ! s’exclama Afra en rejetant la tête en arrière. Elle se sentait profondément humiliée. Sais-tu au moins ce qui s’est passé pendant que tu prenais du bon temps avec cette Sicilienne venue d’on ne sait où ? Toute la ville est en émoi. Des hommes vêtus de manteaux noirs à capuche ont saccagé la cathédrale.
    —  D’où toute cette agitation, ponctua Ulrich avec un air toujours aussi absent.
    Afra observait l’architecte les yeux mi-clos. Il n’était vraiment pas dans son état normal. Il semblait indifférent, presque apathique, comme si cela ne le concernait pas.
    — Je ne me suis aperçu de rien, d’absolument rien, dit-il doucement.
    — Il semble que ta nuit avec cette pute ait été épuisante !
    Afra fit une pause puis poursuivit le visage grave :
    — Je n’aurais jamais cru cela de toi, Ulrich ! dit-elle au bord des larmes.
    — Pardon ?
    Afra s’emporta à nouveau :
    — Il ne manquerait plus désormais que tu me dises que tu n’as fait que prier l’ange du Seigneur avec cette roulure – et ce faisant, elle pointa son doigt en direction du palais de l’évêque – ou que vous avez récité des Je vous salue Marie et des Notre père. Tu me fais rire !
    — Excuse-moi. Je n’en sais absolument rien. Je ne me souviens de rien.
    Afra s’approcha d’Ulrich.
    — Tu n’as rien trouvé de mieux comme excuse. Cette explication n’est pas digne de quelqu’un comme toi. Tu devrais avoir honte, répliqua-t-elle sans desserrer les mâchoires.
    Ulrich sembla soudain sortir de sa léthargie. Il se redressa sur sa chaise et rétorqua avec fermeté :
    — Ce que je te dis est la vérité. Je ne me souviens que du banquet de l’évêque. On doit avoir versé dans mon vin je ne sais quelle

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