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Les Conjurés De Pierre

Les Conjurés De Pierre

Titel: Les Conjurés De Pierre Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Philipp Vandenberg
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témoins affirmant avoir observé des comportements anormaux chez la personne soupçonnée.
    En ce temps-là, des cheveux roux ou une robe de velours constituaient déjà de sérieux indices.
    Lorsqu’Ulrich von Ensingen eut vent de l’affaire, il se rendit chez Afra qui ne sortait désormais plus de chez elle. Il était déjà tard dans la nuit.
    Bernward et sa femme conjurèrent par tous les saints maître Ulrich de ne pas les compromettre. Si on apprenait qu’il leur avait rendu visite, on pourrait leur reprocher d’avoir encouragé une relation adultérine. Ulrich insista pour entrer.
    Afra devinait que cette visite tardive ne présageait rien d’heureux. Elle se jeta dans ses bras en sanglotant. Ulrich la regarda d’un air grave et lui dit sans détour :
    — Afra, mon aimée, ce que j’ai à te dire me brise le cœur ; mais crois-moi, la situation est grave, je n’ai que cette solution à te proposer pour nous sortir de ce mauvais pas.
    — Je sais ce que tu vas me dire, s’écria Afra dans son emportement en secouant violemment la tête. Tu souhaites que je quitte la ville discrètement, comme si j’étais une criminelle recherchée. Mais dis-moi, quel crime ai-je commis ? Suis-je coupable de m’être défendue contre ce monstre qui voulait abuser de moi ? Suis-je coupable de t’aimer ? Suis-je encore coupable d’être plus jolie que n’importe quelle fille de bourgeois ? Dis-le-moi !
    — Tu n’as commis aucune faute…, lui répondit calmement Ulrich… vraiment aucune. C’est un malheureux concours de circonstances qui nous accule à prendre cette décision. Je n’imagine pas une seconde me séparer de toi, mais cela ne sera que provisoire. Si tu ne quittes pas la ville sur-le-champ, nous serons…
    Les mots lui manquèrent. Ulrich était incapable de dire ce qu’il ressentait.
    — Tu sais ce qu’il advient des femmes accusées de sorcellerie. Je peux t’assurer que mon épouse sera la première à te calomnier. Fuis, si tu m’aimes ! Ta vie est en danger !
    Afra avait écouté en silence sans cesser de secouer la tête, elle sentait la colère et la peur s’emparer d’elle. Dans quel monde vivait-elle ? Les mains jointes sur sa poitrine, comme pour prier, elle gardait ses yeux rivés sur le sol. La jeune femme se tut un long moment, puis regarda Ulrich droit dans les yeux :
    — Je ne pars qu’à la seule condition que tu viennes avec moi.
    Ulrich hocha la tête comme s’il s’attendait à cette réponse.
    — J’y ai songé moi aussi. Je pourrais bien entendu me faire à l’idée d’abandonner la construction de la cathédrale, je pourrais aller chercher du travail à Strasbourg, à Cologne ou ailleurs. Mais tu oublies que j’ai une femme. Je ne peux pas l’abandonner ainsi, même s’il n’y a plus d’amour entre nous. De surcroît, cela fait déjà longtemps que sa santé laisse à désirer. Le mal qui la ronge fera tôt ou tard, comme elle le dit, exploser sa tête. Rien, pas même les prières qu’elle récite à haute voix toutes les nuits, n’adoucit ses souffrances. Je ne peux partir avec toi. Il faut que tu comprennes !
    Afra s’effondra en sanglots. Puis, sans dire un mot, elle haussa les épaules et détourna les yeux.
    Pendant un instant, ils n’osèrent se regarder. Elle se dirigea d’un air résolu vers le coffre de sa chambre et retira de dessous son linge un étui de cuir élimé enveloppé dans un sac de toile grossière, qu’elle tendit à Ulrich.
    — Qu’est-ce ? demanda-t-il intrigué.
    — Mon père est mort alors que je n’avais pas encore douze ans. Étant l’aînée de ses cinq filles, il me légua cet étui avec une lettre. Je n’ai jamais véritablement compris la lettre et encore moins ce que pouvait contenir cet étui. Les aléas de la vie ont fait que j’ai perdu la lettre. Rien que d’y penser, je m’en veux encore. Mais j’ai veillé sur l’étui et sur son contenu comme sur la prunelle de mes yeux.
    — Tu m’intrigues vraiment.
    Ulrich s’apprêtait à ouvrir le petit étui lorsque Afra posa sa main à plat sur la sienne :
    — Mon père m’a dit qu’il contenait quelque chose de très précieux, dont je ne devais me servir qu’en tout dernier recours, d’autant qu’il était fort possible que le contenu de cet étui cause le malheur des hommes.
    — Cela semble assez mystérieux. As-tu déjà regardé ce qu’il y avait dedans ?
    — Non, pour une raison que j’ignore, je n’ai jamais

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