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Les conquérants de l'île verte

Les conquérants de l'île verte

Titel: Les conquérants de l'île verte Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean Markale
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m’épouser ? demanda-t-il. –
Qui es-tu donc ? – Je suis Éochaid Airem, roi suprême d’Irlande, et je
suis venu jusqu’à toi pour te demander en mariage. – Ce n’est pas à moi de te
répondre, dit-elle, mais à mon père. »
    Le roi se hâta d’aller trouver Étar, et celui-ci consentit à
lui accorder sa fille si le roi voulait bien lui donner un douaire convenable. Éochaid
lui donna sept filles esclaves et un magnifique troupeau de vaches blanches. Et
il emmena Étaine à Tara.
    Les hommes d’Irlande, ayant appris que le roi avait
maintenant une épouse, vinrent au festin de Tara. Ils arrivèrent quinze jours
avant Samain et restèrent quinze jours après. Ils
admirèrent tous la beauté et la noblesse d’Étaine et répétaient entre eux que
jamais roi d’Irlande n’avait eu de femme aussi merveilleuse.
    Cependant, Éochaid Airem avait un frère qui se nommait
Ailill Anglonnach. Et lorsque celui-ci vit Étaine pour la première fois,
pendant le festin de Tara, il en devint immédiatement amoureux. Il ne cessait
de la regarder et de soupirer, tant et si bien qu’à la fin sa femme lui
dit : « Que regardes-tu ainsi, ô Ailill ? Ce sont certainement
des marques d’amour que ces longs regards et ces soupirs-là ! »
    Ailill, tout honteux, se fit en lui-même de grands
reproches. Et il évita désormais de regarder du côté d’Étaine. Mais, quand les
hommes d’Irlande se furent séparés après le festin de Tara, Ailill ne les
suivit pas. Pénétré de douleur, de jalousie, d’envie, il tomba dans une maladie
de langueur. Éochaid Airem, son frère, s’inquiéta de son état et fit venir son
médecin, Fachtna. Le médecin posa la main sur la poitrine d’Ailill, et celui-ci
poussa un grand soupir. « Je ne crois pas que tu sois malade, dit Fachtna.
Tu es atteint de quelque chose qui ressemble à de la jalousie. »
    Tout éperdu de honte qu’il fût en entendant ces paroles, Ailill
se garda bien de révéler au médecin ce qui le tourmentait. Aussi, Fachtna le
quitta-t-il sans avoir pu le guérir. Or, Éochaid Airem devait partir pour
accomplir son circuit royal à travers les provinces d’Irlande. Mais la santé de
son frère l’alarmait si fort qu’il dit à Étaine :
    « Femme, occupe-toi de mon frère Ailill et soigne-le du
mieux que tu pourras, car je le crois bien malade. Et si, par malheur, il
meurt, creuse sa tombe toi-même et fais écrire son nom en ogham sur le pilier que tu ordonneras d’ériger à cet emplacement. »
    Une fois qu’Étaine eut promis de s’occuper d’Ailill, Éochaid
partit donc visiter chacune des provinces d’Irlande. Alors, Étaine vint chaque
jour au chevet d’Ailill pour lui laver la tête et lui couper sa part de nourriture.
Mais Ailill dépérissait de plus en plus, et Étaine craignit de le voir
succomber. « Écoute, lui dit-elle un soir, je me doute que ta maladie
résulte d’une pensée que tu n’oses pas avouer. Je suis sûre que, si tu m’en
parlais, je pourrais faire quelque chose pour te guérir. – Oh ! oui,
femme ! répondit Ailill, tu pourrais faire quelque chose pour me guérir,
mais je n’ose révéler la cause de mon mal. – Dis-moi le fond de ta pensée. – Je
ne te dirai rien », s’obstina Ailill.
    Pourtant, au bout de quelques jours durant lesquels elle
n’avait cessé de le harceler à chacune de ses visites, il se décida à parler.
« Si tu veux savoir la cause de mon mal, dit-il, je vais te la
révéler : c’est toi. Dès l’instant où je t’ai vue pour la première fois, plus
aucune mélodie n’est venue sur ma harpe, et j’ai cessé d’être maître de mon
cœur comme de mes sens. C’est une bien triste situation, ô femme du roi, car
mon corps et mon esprit sont malades, et rien ne pourrait les guérir, hormis le
remède que tu m’apporterais toi-même. Sache-le, mon amour est un chardon
piquant, c’est un désir de force et de violence, il est aussi vaste que les
quatre parties de la terre, aussi infini que le ciel. C’est la brisure du cou,
c’est une noyade dans l’eau de la mer, c’est une bataille contre une ombre,
c’est une course vers le ciel, c’est une course aventureuse sous la mer, c’est
un amour pour une ombre qui s’enfuit sans cesse et qui revient chaque fois me
hanter. »
    Ainsi s’exprima Ailill Anglonnach, fils de Finn, frère du
roi suprême d’Irlande, Éochaid Airem. Et, après avoir parlé, il se cacha le
visage, tant l’emplissait de honte le

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