Les derniers jours de Jules Cesar
peut pas me recevoir,
mais elle fera son possible.
— Puis-je voir sa lettre ?
— Je l’ai aussitôt détruite, mais je l’ai apprise par
cœur, elle n’était pas très longue. » Il la récita.
« Oui. Je pense que ton interprétation est la bonne,
Silius.
— Bien. Je vais avertir César. »
Antistius réfléchit pendant quelques instants, sous le regard
perplexe de l’aide de camp. Puis il déclara : « Es-tu certain que
c’est la bonne décision ?
— Oui, je n’ai pas le moindre doute.
— Que pourras-tu lui dire qu’il ignore ? Penses-tu
vraiment que ces rumeurs ne parviennent pas jusqu’à lui ? De toute évidence,
il refuse de déclencher une répression. Il ne veut pas d’effusion de sang. Pour
l’instant, tout du moins.
— Servilia est surveillée. Cette donnée ne suffit-elle
pas ?
— Non. Cela signifie juste que Brutus pourrait, je dis
bien pourrait, être impliqué dans la conjuration, en admettant quelle existe.
— Ne comprends-tu pas ses mots ? “La route se
déroule entre deux précipices.”
— C’est toi qui les interprètes ainsi. Il n’y a là rien
de clair. Imaginons que César te croie et qu’il déchaîne une répression. Que
devrait-il faire ? Capturer Brutus et l’exécuter ? En se fondant sur
quelle accusation ? Ou le faire éliminer par un tueur ? Ses opposants
lui attribueraient immédiatement cet assassinat. Ils l’exposeraient à la risée
publique comme un tyran sanguinaire qui aurait dissimulé pendant des années sa
véritable et féroce nature. Exactement ce qu’il veut éviter. Tu ne ferais que
le mettre dans l’embarras.
— Mais alors ?
— Je compte beaucoup sur Artémidore. S’il découvre
l’existence d’une conjuration et le nom des conjurés, il sera facile pour César
de leur tendre un piège, de les démasquer et de décider de leur sort. De plus,
Servilia t’a écrit qu’elle comptait agir, et je crois que son action sera
importante, la seule action capable de sauver son fils et l’homme qu’elle aime,
même si cela paraît impossible.
— Et comment ? »
Antistius traçait des arabesques sur une tablette de cire
avec la pointe d’un bistouri, comme s’il suivait des pensées complexes. Il leva
les yeux et répondit : « Par exemple en révélant à César le jour de
la conjuration. »
Chapitre XI
Ad
fundum Quintilianum, a.d. V Id. Mart., hora duodecima
Villa
Quintiliana, 11 mars, cinq heures de l’après-midi
« Tu t’es enfin réveillé ! Je croyais que tu
n’ouvrirais plus les yeux. »
Mustela se tourna dans la direction d’où provenait la voix
et croisa le regard d’un homme robuste à l’allure ferme et décidée. Sans doute
un militaire.
« Il est imprudent de ta part de révéler ton nom en
code à un domestique et, plus encore, de venir chez moi », dit ce dernier.
Mustela tenta de se redresser sur ses coudes, mais cet
effort lui arracha un gémissement, et une grimace de douleur se peignit sur son
visage. « Quelle heure est-il ?
— Laisse tomber l’heure et réponds-moi.
— Je n’avais pas le choix. Vois dans quel état je suis.
Tes gens allaient me jeter dans la fosse d’aisance. Ce n’aurait pas été une
belle mort, pas même pour un type de mon acabit.
— Il est dangereux de te garder ici. Plus tôt tu t’en
iras, mieux ce sera. Que veux-tu ? »
Mustela jeta un coup d’œil à la fenêtre. « Il est tard.
— Environ la douzième heure.
— Par les dieux, j’ai risqué ma vie pour rien. Vous
auriez dû me réveiller ! Pourquoi ne l’avez-vous pas fait ?
— Tu es fou ! Pour le cas où tu ne l’aurais pas
remarqué, mes hommes t’ont recousu avec du fil et une aiguille. À ton arrivée,
tu étais plus mort que vif.
— Écoute-moi. Deux messagers, peut-être trois ou
quatre, tentent de gagner Rome par des itinéraires différents afin d’empêcher
que justice soit faite. J’ai intercepté quelques mots dans une mutatio sur la via Aemilia et j’ai reconnu un de ces deux messagers : Publius
Sextius, dit “le Bâton”. Tu sais de qui il s’agit ?
— Et comment ! Un maudit salopard ! Un fils
de chien qui a la vie dure.
— Alors arrête-le et arrête les autres.
— En admettant que ce soit possible et que nous en
ayons encore le temps… comment arrêter les autres ? Tu ne connais ni leur
nombre ni leur nom. C’est un prodige que tu me demandes ! »
Mustela parvint enfin à s’asseoir au bord du
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