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Les Dieux S'amusent

Les Dieux S'amusent

Titel: Les Dieux S'amusent Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Denis Lindon
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occupait dans la hiérarchie divine un des rangs les
plus élevés. Elle parlait d’égal à égal aux divinités majeures de l’Olympe et, si
le privilège des Grands d’Espagne eût existé à cette époque, elle aurait eu le
droit de garder son chapeau sur la tête en présence de Jupiter. Bien qu’elle
eût toujours une place réservée aux banquets de l’Olympe, elle s’y rendait
rarement, préférant avec raison le séjour solitaire mais enchanteur de son île,
baignée par une mer violette, ombragée par des forêts odorantes et rafraîchie
par des ruisseaux limpides.
    Le jour se levait lorsque Calypso découvrit Ulysse évanoui
sur le sable. À la fin de la matinée, elle l’avait ranimé, lavé, restauré. Elle
était aussi tombée amoureuse de lui.
    À quoi faut-il attribuer les succès répétés et fulgurants d’Ulysse
auprès des femmes et des déesses ? Certainement pas à sa jeunesse ni à sa
beauté, car il n’avait jamais été très beau et il y avait longtemps qu’il n’était
plus très jeune ; peut-être à l’impression de force et d’intelligence qu’il
dégageait ; plus probablement à la célébrité qu’il s’était acquise par ses
exploits. Quoi qu’il en soit, Calypso lui proposa le jour même de demeurer
quelque temps sur l’île avec elle. Comme elle était très belle, et qu’au
surplus, privé de navire et d’équipage, il n’avait guère le choix, Ulysse
accepta. Il ne se doutait pas que son séjour allait se prolonger sept ans.
    Pendant quelques mois, Ulysse et Calypso vécurent une lune
de miel. Mais, peu à peu, l’amour d’Ulysse se refroidit et il fut repris du
désir lancinant de revoir son pays et sa famille. Dès lors, il se mit à
délaisser Calypso ; pendant la journée, il passait de longues heures assis
sur un promontoire, à contempler tristement la mer dans la direction d’Ithaque ;
le soir venu, il rejoignait Calypso mais ne répondait pas à ses caresses. Constatant
sa froideur et craignant de perdre son amant, Calypso lui fit alors une
surprenante proposition :
    — Si tu acceptes de devenir mon époux, je m’engage par
le Styx à obtenir pour toi, de Jupiter, l’immortalité.
    La plupart des mythographes, aveuglés par leur admiration
pour Ulysse, prétendent qu’il refusa cette proposition « sans hésiter ».
    C’est absolument faux ; il hésita au contraire beaucoup.
Il faut dire que la proposition de Calypso était digne d’être prise en
considération. Contrairement au pari de Pascal, qui consiste à échanger la
certitude de plaisirs terrestres immédiats contre l’éventualité très
problématique d’une vie immortelle, l’offre de Calypso assurait à Ulysse la
certitude de l’immortalité immédiate et ne l’obligeait à renoncer qu’à un
espoir très hypothétique de retourner chez lui.
    Il y avait pourtant quelque chose dans cette proposition qui
inquiétait Ulysse et le faisait hésiter. Il n’aurait pu dire quelle était la
cause exacte de cette inquiétude ; c’était une réminiscence confuse, le
vague souvenir d’un exemple analogue, qu’il ne parvenait pas, malgré tous ses
efforts, à faire resurgir de son subconscient.
    « Cela me reviendra peut-être », pensa-t-il, et il
demanda à Calypso de lui laisser le temps de la réflexion.
    Alors, pour tenter de distraire Ulysse et de ranimer son
ardeur amoureuse, Calypso a recours à un autre moyen : chaque soir, comme
l’héroïne des Mille et Une Nuits, elle va lui raconter une histoire d’amour.
Ce n’est pas par hasard qu’elle choisit, comme premier récit, celui des amours
de Cupidon et de Psyché : elle veut prouver à Ulysse, par cet exemple, que
les mariages mixtes entre des mortels et des dieux peuvent être heureux.

Premier récit de Calypso : Cupidon et Psyché
    Il était une fois un roi et une reine qui avaient trois
filles. Toutes les trois étaient belles, mais la troisième, Psyché, dépassait
de loin ses sœurs en beauté. Du surcroît, elle était douce, aimable et
spirituelle. Vénus, la déesse de l’amour, qui n’aimait guère la concurrence, finit
par s’irriter des éloges constants qu’elle entendait faire de Psyché et décida
de punir l’innocente jeune fille.
    Vénus avait un fils, appelé Cupidon ou parfois aussi Éros.
    Après avoir été un charmant bébé joufflu, Cupidon était
devenu un bel adolescent. Il exerçait, dans l’Olympe, les fonctions d’adjoint
de sa mère, avec le titre de dieu de

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