Les Dieux S'amusent
le cadavre de Patrocle à son
char, pour l’emporter à Troie. Ménélas et Ajax tentent désespérément de l’en
empêcher. Une mêlée furieuse et indécise s’engage autour du corps de Patrocle, que
les uns tirent par les bras et les autres par les jambes. Achille, cependant, a
vu revenir Automédon, seul dans son char. Il devine ce qui s’est passé, court à
la palissade, voit la lutte qui se déroule autour du corps de son ami. Il brûle
du désir de s’élancer au combat, mais comment pourrait-il le faire, sans
cuirasse, sans casque et sans armes ? Il pousse alors trois cris de rage
et de désespoir, si puissants et si terrifiants que le sang des Troyens se
glace dans leurs veines et qu’ils s’enfuient vers leurs remparts, abandonnant à
Ménélas et Ajax la dépouille mortelle de Patrocle.
Achille est alors pris d’une crise de nerfs. Il se roule par
terre en sanglotant, et ses compagnons doivent le soutenir pour le ramener à sa
baraque. Sa mère, la déesse Thétis, vient l’y rejoindre. Elle le supplie de
renoncer définitivement à cette guerre et de retourner chez lui. Mais Achille
est résolu à venger Patrocle et à tuer Hector, dût-il périr lui aussi.
— Tout ce que je te demande, dit-il à sa mère, c’est de
m’apporter de nouvelles armes, pour remplacer celles que m’a prises Hector.
Thétis finit par accéder à sa demande et repart vers l’Olympe.
Pendant toute la nuit suivante, Achille veille sur la
dépouille mortelle de Patrocle, pleurant de douleur et de rage. Le matin, Thétis
est de retour, avec les armes nouvelles qu’elle a fait forger par Vulcain. Elles
sont plus belles encore que les précédentes : la surface polie de l’airain
est décorée d’incrustations en or, représentant, sur la cuirasse, une tête de
lion rugissant et, sur le casque, un soleil flamboyant. Achille s’en revêt, prend
ses armes, monte dans son char avec Automédon et se rend chez Agamemnon. Il y
est acclamé par les rois et les troupes grecques qui s’y sont rassemblés. Agamemnon,
pour sa part, le remercie d’être revenu au combat, lui renouvelle ses excuses
et lui rend Briseis, qui se jette dans ses bras en pleurant de joie. Mais
Achille n’a pas la tête aux effusions. Il est impatient de se venger et demande
à Agamemnon de donner immédiatement le signal de l’attaque.
Ulysse s’y oppose :
— Il est presque midi, dit-il, et il serait imprudent
de partir au combat le ventre creux. Prenons d’abord un repas léger.
Les autres rois grecs se rangent à son avis, malgré les
protestations d’Achille, qui assure qu’il ne pourra rien avaler.
— Tu prendras bien une petite côtelette d’agneau, insiste
Ulysse ; cela se mange sans faim.
Achille se laisse finalement convaincre et se restaure avec
les autres. Mais, la dernière bouchée avalée, il fait ranger l’armée en ordre
de bataille et, à sa tête, franchit le fossé.
Pendant ce temps, à l’abri des remparts, les chefs troyens
étaient eux aussi réunis. Hector les exhorte au combat :
— Le moment suprême est arrivé, dit-il. Aujourd’hui, il
nous faut vaincre ou mourir.
Priam cherche à le dissuader de sortir des remparts :
— Tu es notre seul soutien, lui dit-il, et tu ne dois
pas t’exposer.
Cassandre, sœur d’Hector, qui a reçu des dieux le don de prévoir
l’avenir, mais qui est condamnée à n’être jamais écoutée, supplie aussi Hector
de ne pas affronter Achille :
— Si tu sors aujourd’hui de Troie, Hector, tu ne nous
reverras jamais plus, lui annonce-t-elle.
Mais Hector reste sourd aux supplications des siens. Grisé
par ses succès de la veille, fier de porter le casque et la cuirasse d’Achille,
qu’il a arrachés au cadavre de Patrocle, il se croit invincible et brûle d’en
découdre avec Achille. Il ordonne à ses troupes de se tenir prêtes à sortir des
remparts aussitôt après le déjeuner.
En attendant, armé et casqué, il retourne à ses appartements
pour prendre congé de sa femme Andromaque et de son fils Astyanax.
Andromaque, à son tour, cherche à le retenir.
— Tu es tout pour moi, lui dit-elle : un père, une
mère, un frère, en même temps qu’un époux. Ne m’abandonne pas.
Avec douceur, Hector lui fait comprendre qu’il doit
accomplir son devoir. Il embrasse sa femme et veut prendre son fils dans ses
bras. Mais Astyanax, qui n’a que trois ans, semble effrayé, s’enfuit et se
réfugie dans les jupes de sa mère.
— C’est
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