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Les dîners de Calpurnia

Les dîners de Calpurnia

Titel: Les dîners de Calpurnia Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean Diwo
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retranchait derriére l'autorité de la maîtresse des lieux.
    - C'est la fille du grand Sevurus et la veuve de ce malheureux Celer qui, sans combattre, a été la premiére victime de l'amphithé‚tre ? s'enquit un jour Lucius.
    - Oui, c'est une femme de caractére qui assume de grandes responsabilités dans l'atelier.
    - J'aimerais un jour faire sa connaissance, ajouta le financier, croyez-vous que cela soit possible ?
    Rabirius avait transmis la demande à Calpurnia, laquelle n'avait pas paru enchantée.
    - On verra cela plus tard, lorsque tu le connaîtras mieux. Sevurus nous disait toujours, à Celer et à moi, que pour être heureux il fallait vivre cachés et que les artistes n'avaient rien à gagner à fréquenter leurs clients, surtout s'ils étaient familiers du palais. Il est vrai qu'à
    l'époque il craignait que Néron ne m'attir‚t à ses orgies ! Enfin, je vois mal ton Lucius prendre part à l'un de nos dîners. Sa présence nous contraindrait à une réserve difficilement imaginable quand on connaît notre bande de bavards ! Si nous devons l'inviter un jour, il viendra seul !
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    - Tu as raison. Mais, tu sais, Lucius me parle franchement de l'Empereur et, par lui, j'apprends beaucoup de choses. Ainsi, à propos des ouvertures prévues dans les appartements privés, il m'a dit que Domitien avait peur et que je devais en tenir compte. Comme Néron, il vit dans la hantise de se faire assassiner et, comme lui, il a tendance à devenir soupçonneux et cruel.
    - Alors, comme lui, il tombera un jour sous le poignard de ses ennemis.
    Terentia, qui avait grandi en même temps que l'amphithé‚tre, devenait une jeune fille de plus en plus attirante à mesure que la construction de la Domus avançait, et Calpurnia éprouvait pour elle l'inquiétude qui avait jadis tourmenté son oncle et Celer. Terentia était sérieuse mais elle voulait, comme elle autrefois, mordre à la vie, partager les plaisirs des jeunes Romaines de son temps.
    Calpurnia supportait mal le désir de sa fille d'échapper à la vie de la maison dont elle go˚tait, c'était évident, de moins en moins les attraits.
    Ne lui avait-elle pas dit un jour que Martial et Juvénal, qu'elle avait toujours connus, ne l'amusaient plus, que Tacite et Pline lui paraissaient vieux avant l'‚ge, déjà imbus de leur titre et de leur classe ? Elle leur préférait Rabirius. Lui au moins conservait sa fraîcheur de manuel ; bien qu'il f˚t capable de calculer la résistance d'une vo˚te et d'inventer les formes d'un palais, il continuait de prendre du plaisir à toucher la pierre, à caresser de sa paume un peu rugueuse le velouté d'un marbre.
    Terentia, elle, jugeait sa situation inconfortable et trouvait que sa mére aurait d˚ se décider depuis longtemps à l'épouser. Un jour d'hiver o˘ elle l'avait rejointe dans la cuisine prés du grand poêle de brique, seul lieu de la maison o˘ l'on ne se sentait pas transi de froid, elle s'était serrée contre sa mére et lui avait parlé avec la brutalité de la jeunesse :

    - Maman, pourquoi n'épouses-tu pas Rabirius ? Vous avez eu le temps d'apprendre à vous connaître ! Je crois que vous vous aimez, lui en tout cas t'adore. Il a sauvé la
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    maison. Sans lui, l'architecte impérial n'habiterait plus au Vélabre et l'atelier qui a vu naître tant de projets et o˘ se sont réalisés tant de rêves servirait à ranger les outils du jardinier. Je t'en prie, si tu hésites à prendre un mari, donne-moi un pére ! J'en ai assez de vivre auprés de cet homme merveilleux, le seul que l'on puisse comparer à papa, dont on ignore s'il est ton employé, ton amant ou ton esclave ! Et puis, fais attention... que ferais-tu si un jour il te disait qu'il s'en va ?
    Calpurnia, stupéfaite, regarda sa fille, ne sachant si elle devait rire ou pleurer, la serrer dans ses bras ou 1# traiter d'insolente. Finalement elle ne fit rien de tout cela, prit simplement les mains de sa fille, si fines, si douces, qu'elle enduisait comme elle à son ‚ge d'huile de rosé ou d'onguent à la myrrhe, et lui dit en la regardant avec toute sa tendresse de mére :
    - quelle véhémence ! quelle passion ! Tu es bien ma fille, Terentia chérie ! Je me retrouve vingt ans auparavant, éprise d'absolu. Tu as bien fait de me parler. J'avais peut-être besoin qu'on me révéle mon égoÔsme car, si j'ai bien compris, c'est un certain égoÔsme que tu me reproches. Je devrais selon toi être plus attentive aux préoccupations de Rabirius.

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