Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Les fiancés de Venise

Les fiancés de Venise

Titel: Les fiancés de Venise Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Nicolas Remin
Vom Netzwerk:
calme, mais elle remarqua que ses lèvres se crispèrent un instant.
    — Vous arrive-t-il de parler de ses enquêtes ?
    Il la fixa avec attention. Le briquet de soldat qu’il avait sorti pour allumer une nouvelle cigarette resta suspendu dans l’air, tel un point d’interrogation.
    Elle secoua la tête.
    — Nous discutons de milliers d’autres choses. Pourquoi me demandes-tu cela ?
    — Parce que tes projets de mariage m’ont surpris. J’aurais imaginé que tu épouserais de nouveau un homme dans le genre du prince.
    Il s’approcha de la fenêtre pour allumer le petit poêle en fonte. Il souleva le couvercle, posa du papier journal et des copeaux sur la grille et tendit son briquet. Il attendit que les flammes s’élèvent pour y poser des bûchettes et refermer, puis il se retourna et s’assit en face d’elle.
    — À vrai dire, je ne pensais pas que tu te remarierais.
    — Moi non plus ! s’exclama-t-elle en riant.
    — Tu me rends curieux !
    — Il faudrait que tu fasses sa connaissance, proposa-t-elle avec spontanéité.
    Il fronça les sourcils.
    — Pour te dire que tu commets une erreur ?
    Elle remua la tête.
    — Non, cela me regarde. Je crois que tu l’apprécieras.
    Il l’observa pendant un certain temps.
    — Quel genre d’homme est-ce, ton commissaire ?
    Elle fut de nouveau obligée de rire. Il lui avait posé exactement la même question quatre ans auparavant, dans le salon de la duchesse de Berry, lorsqu’elle lui avait raconté qu’elle s’était mariée. « Quel genre d’homme est-ce, ton prince ? » Il souhaitait une phrase concise, qui aille droit à l’essentiel. À l’époque, elle n’avait eu aucun mal à décrire son époux. La taille du prince, ses larges épaules et son front impérial lui donnaient cette extraordinaire présence qui, au début, l’avait presque effrayée. Le prince était dominateur . Mais Tron ?
    Pouvait-on qualifier Tron de dominateur  ? Non, conclut-elle, certainement pas. Le comte était plutôt… anodin. Tout à coup, elle le revit dans la vieille redingote héritée de son père, avec son haut-de-forme usé à l’endroit qu’il serrait entre les doigts pour saluer avec la même politesse (elle s’en rendait soudain compte) un duc ou un domestique.
    — Tron respecte les autres, résuma-t-elle sans réfléchir.
    Du bout de son mégot, il fit une petite pyramide dans la sous-tasse qu’il utilisait comme cendrier. Quelques instants s’écoulèrent. Il demanda, le regard toujours rivé sur les résidus de cigarette :
    — Tu l’aimes ?
    Elle hocha la tête.
    — Quand allez-vous vous marier ?
    — Sans doute au printemps.
    — Je serai déjà reparti.
    La princesse se leva. Il l’imita.
    — Où vas-tu loger une fois que tu auras résolu ton problème et que tu pourras mettre fin à cette mascarade ?
    — Au Danieli .
    Elle écarquilla les yeux.
    — C’est cher ! Qui paie ?
    — Gutiérrez de Estrada, répondit-il d’une voix morose. Tu as dû le rencontrer au château de Miramar.
    Elle approuva d’un geste et dit :
    — Il ne fait aucun mystère de sa haine pour Benito Juárez.
    — Les juáristes ont confisqué ses plantations.
    — Il ne donne pourtant pas l’impression d’être pauvre.
    — Non. Il reste l’homme le plus riche du Mexique.
    — Tu n’as pas l’air de l’aimer, observa-t-elle.
    — Nous devons travailler ensemble. Mes sentiments importent peu.
    Dans l’intervalle, ils avaient atteint le vestibule. Une pâle lumière d’automne s’infiltrait par la porte entrouverte et tombait sur la poussière qui recouvrait le sol.
    — Je suppose que personne ne doit apprendre notre rencontre.
    — En effet. Sinon je ne t’aurais pas priée de venir ici.
    — Même Tron ?
    — Non, répondit-il avec un sourire en se poussant pour la laisser passer. Je suis de toute façon persuadé que nous allons bientôt faire connaissance.
    1 - Anse. ( N.d.T. )

6
    L’arrière-cour sur laquelle donnait le ramo 1 degli Veronesi ne ressemblait guère à ces puits de jour vénitiens qui enchantent les visiteurs par un escalier lumineux ou une fontaine en marbre. C’était une cage sombre et sinistre, à peine plus grande que la salle aux tapisseries du palais Tron, entourée de façades au crépi écaillé. Par paresse, on balayait les déchets dans les coins. La bruine qui avait repris et déposait sur la ville une couche visqueuse de particules de suie aggravait encore l’impression de

Weitere Kostenlose Bücher