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Les fiancés de Venise

Les fiancés de Venise

Titel: Les fiancés de Venise Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Nicolas Remin
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débarqué à l’improviste dans la sacristie de Santa Maria Zobenigo (elle venait juste de passer la serpillière) pour lui apprendre que le commissaire Tron désirait lui parler – sur-le-champ. Le policier lui avait accordé cinq minutes pour se changer ; elle avait absolument tenu à mettre sa robe, son manteau et ses nouvelles chaussures. Dans la gondole, le sergent (qui semblait être le bras droit du commissaire) avait parlé tout bas de mesures investigatrices non conventionnelles . Elle ignorait ce que cela signifiait, mais n’avait pas osé l’interroger.
    La gondole les avait déposés sur la riva degli Schiavoni où le commissaire l’attendait. Quand il lui eut expliqué l’objet de leur rencontre, elle avait compris pourquoi il avait choisi ce point d’observation. Il voulait discuter de leur affaire sur place – en quelque sorte, sur le théâtre du crime qu’elle commettrait le lendemain à sa demande – sur le lieu de l’action.
    — Si jamais il t’attrape (il étira le si jamais pour suggérer qu’il ne partait pas de cette hypothèse), le sergent Bossi viendra aussitôt t’arrêter. Je doute que le secrétaire insiste pour venir porter plainte au poste de police.
    Tout à coup, elle repensa à la cellule de la questure.
    — Et que va-t-il m’arriver, au poste de police ?
    Le commissaire la regarda d’un air interdit.
    — Rien ! Nous attendrons un moment avant de te laisser repartir.
    Elle était un peu fâchée que le commissaire semblât tenir cette manœuvre pour un jeu d’enfant – et, aussi, qu’il n’ait pas remarqué son manteau et ses chaussures. Elle releva son col et reprit :
    — Le problème tient au manque de temps. Je ne peux pas tout faire d’un seul coup.
    À nouveau, le policier ne comprit pas. Il fronça les sourcils.
    — Que veux-tu dire ?
    — Je dois l’approcher à deux reprises, expliqua-t-elle avec patience. Une fois pour déterminer dans quelle poche il a glissé la clé et une autre pour la lui dérober. Si je veux savoir où elle se trouve, il faut que je la voie ou que je la sente. Est-elle grande ?
    — Il s’agit d’une clé du Danieli normale, attachée par une chaîne à une petite plaque.
    — Une clé du Danieli  ? Avec le nom de l’hôtel et le numéro de la chambre ?
    Elle se demanda pourquoi il ne se procurait pas tout simplement un double, mais cela ne la regardait pas. Il se contenta de hocher la tête.
    — Dans ce cas, je pourrai sans doute voir dans quelle poche elle se trouve.
    Et, pensa-t-elle, dans laquelle elle risque de rester coincée.
    — Ensuite, poursuivit-elle, ou bien je l’aborde par-derrière, ou bien je fonce sur lui. Seulement, dans ce cas, il vérifiera peut-être ses poches et constatera la disparition.
    — À éviter à tout prix ! lâcha Tron avec une grimace.
    — Donc, je dois l’attaquer de dos, ce qui serait plus facile s’il ne marchait pas. Pouvez-vous lui parler ? Le distraire ? L’arrêter ?
    Le commissaire fit non de la tête.
    — Il ne doit surtout pas me voir ! précisa-t-il. Il ne doit même pas savoir que je traîne dans le coin. Tu t’en sens capable ?
    — Non. Pas si nous sommes seuls entre la rive et l’hôtel. Même le brouillard ne servirait à rien. Et par temps de pluie, ce n’est même pas la peine d’y penser.
    Elle se tut un instant.
    — L’idéal serait un après-midi ensoleillé où toute la rive…
    Il lui coupa la parole.
    — … grouillerait de cracheurs de feu, de marchands de frittolini et de saltimbanques.
    Elle approuva d’un geste de la tête avant de continuer :
    — S’il devait traverser la foule, il mettrait deux fois plus de temps et je serais à couvert. Avec un peu de chance, il s’arrêterait même pour regarder un numéro.
    Le commissaire sourit.
    — Une troupe de cirque, ce n’est pas un problème.
    — Dans ce cas, je peux y arriver, conclut-elle en lui rendant son sourire.
    Cette phrase sembla le soulager. Il suivit des yeux un groupe d’officiers qui venaient de sortir du Danieli dans leurs manteaux d’apparat blancs et s’étaient arrêtés, indécis, devant l’entrée de l’hôtel avant de se diriger vers le ponte della Paglia. Puis il ordonna :
    — Récapitulons le déroulement de la manœuvre. Point par point. À quelle heure dois-tu arriver ici ?
    — Trois heures.
    — Où vas-tu te cacher ?
    — Derrière la guérite où on vend les billets, sur l’embarcadère de la Lloyd. De là, je peux

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