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Les Filles De Caleb

Titel: Les Filles De Caleb Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Arlette Cousture
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Trois- Rivières là-dessus», dit Émilie, béate d’admiration.
    Ovila fit un calcul rapide et demanda à Émilie de l’attendre quelques instants. Elle s’assit dans une charrette entre le bateau et les provisions de bois destinées à alimenter les chaudières du vapeur. Ovila revint une demi-heure plus tard.
    «Écoute-moi bien. Si tu veux, on peut changer d’hôtel. On pourrait prendre une chambre tout près d’ici. Il y a quatre ou cinq hôtels dans les environs qui coûtent pas mal moins cher que le Windsor. C’est pas aussi beau, c’est sûr. Mais il paraît que c’est bien convenable. Surtout le Rasco. En restant ici pour deux jours, on aurait assez d’argent pour s’en retourner en bateau. Qu’est-ce que tu en penses?» Émilie n’en pensa que du bien. Ils portèrent leurs effets jusqu’à F Auberge du Canada, le Rasco n’ayant plus de chambres disponibles. Ils passèrent deux autres journées à voir tout ce qu’ils pouvaient voir et embarquèrent finalement sur le Richelieu. Le Terrebonne avait déjà quitté le port. Ils quittèrent la ville, les yeux encore remplis de tout ce qu’ils y avaient vu. Ils regardèrent l’île Sainte-Hélène et, comme tous les autres passagers du Richelieu, firent des signes de mains à ceux du traversier qui revenaient de l’île.
    Émilie respirait l’air à pleins poumons. Elle avait l’estomac quelque part entre sa place normale et le fond de la gorge.
    «Je me sens pas bien, Ovila.»
    Ovila la regarda. Elle était verte.
    «Tu ferais mieux d’aller t’étendre.»
    Il l’accompagna jusqu’à leur cabine, dans laquelle elle demeura tout le temps du voyage. Elle ne put s’empêcher de penser à sa traversée en Europe. Jamais elle n’aurait pu se rendre... en digne fille de son père. Ils accostèrent enfin à Trois-Rivières et elle fut la première à débarquer. Ovila rit d’elle.
    «Tu parles d’une voyageuse. En tout cas, on pourra dire qu’aussitôt que tu as touché au plancher des vaches, tes couleurs sont revenues.»
    Ovila s’était gratté la tête, puis avait demandé à Émilie si elle voulait prendre le train ou la calèche pour rentrer. Émilie lui dit qu’elle voulait prendre le train jusqu’à Shawi- nigan et faire le reste en calèche. À Shawinigan, ils firent une visite surprise chez Antoinette qui était plus grosse que jamais. Ils y restèrent pendant une journée au cours de laquelle Antoinette écouta Émilie décrire son voyage à Montréal. Elle riait de voir combien son amie était encore une petite fille. Henri était arrivé quelques minutes avant leur départ. Il eut le temps d’entendre Ovila raconter combien Émilie avait le pied marin. Il regarda Émilie et sourit. Elle fit un petit haussement d’épaules, lui signifiant qu’elle savait à quoi il songeait et qu’à son avis, il l’avait échappé belle. Au grand plaisir de tous, Henri leur dit qu’il devait aller au lac aux Sables rencontrer les commissaires. Émilie et Ovila attendirent donc au lendemain pour rentrer et faire la route avec lui.
    Rose bouda sa mère pendant deux jours, lui reprochant d’un regard sombre de l’avoir abandonnée pendant si longtemps. Émilie et Ovila inventèrent toutes sortes de grimaces pour la faire sourire. Ils y parvinrent enfin, au grand soulagement d’Émilie qui commençait à se dire qu’elle ne laisserait jamais plus son enfant. Ce petit nuage vint assombrir le cœur léger d’Émilie. Mais cet ombrage ne fut rien à côté de celui qui suivit.
    Ovila avait rôdé comme s’il avait quelque chose à cacher. Émilie le sentit.
    « Qu’est-ce que c’est, Ovila, que tu veux pas dire?
    —        Monsieur Légaré aura pas besoin de moi pour les mois à venir... Ça fait que si je veux être capable d’arriver, va falloir que je descende au lac Pierre-Paul avec le père.»
    Ovila repartait... Elle l’attendrait... Encore. Des journées sans soleil. Des soirées froides. Des nuits glacées.
    «Tu m’avais dit que tu repartirais jamais, Ovila. Tu m’avais dit que tu pourrais jamais pus être loin de moi. On a la p’tite astheure, pis tu as vu comment elle s’ennuie quand on n’est pas là.
    —        Je sais tout ça, Émilie. Je sais que Rose me reconnaîtra probablement pas quand j’vas venir aux Fêtes. Mais j’ai pas grand choix. Légaré a pas d’ouvrage pis le voyage a fait un gros trou dans notre bas de laine. »
    Il essaya de la faire rire. Elle ne rit pas. Un grand froid

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