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Les Filles De Caleb

Titel: Les Filles De Caleb Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Arlette Cousture
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Pendant qu’ils attendaient, elle n’osa pas passer de commentaires à Ovila, craignant qu’une religieuse écoute leurs propos. Ils entendirent finalement un bruit de porte. Puis quelqu’un tira le rideau. Deux religieuses étaient assises derrière le grillage, voilées. Le regard d’Emilie alla de l’une à l’autre. Laquelle est Berthe? Elle n’attendit pas de deviner, certaine que Berthe réagirait aussitôt qu’elle parlerait. Ovila avait enlevé son chapeau et il le tourna plusieurs fois dans ses mains nerveuses, avant de le déposer sur ses genoux.
    «Bonjour, Berthe. On est tous les deux bien contents de te voir. »
    Une des deux religieuses fit un signe de tête. Comment, elle ne parlerait pas?
    «Votre amie, madame, est en période de pénitence. Durant ce temps, elle a choisi de s’isoler et de vivre seule, en silence, dans un des endroits aménagés à cet effet au fond du jardin. Vous auriez dû annoncer votre arrivée. Mais, considérant que vous veniez de si loin, notre mère prieure a permis à votre amie de venir au parloir. Toutefois, votre amie n’a pas la permission de vous parler. J’espère que vous comprendrez qu’il s’agit d’un choix qu’elle a fait et non pas d’une règle qui lui est imposée. »
    Emilie demanda à la religieuse si Berthe pouvait au moins lui faire des signes de tête. La religieuse lui dit qu’elle le pouvait. Emilie crut que Berthe, ces explications données, resterait seule avec eux. Il n’en fut rien. Emilie fouilla dans son sac à main et en sortit deux photos.
    «Il y a un photographe, Berthe, qui est passé dans le Bourdais. Ovila pis moi on en a profité pour faire faire notre portrait de mariage.» Elle rit nerveusement. «C’est pas un vrai portrait de mariage parce qu’il est passé il y a deux mois. C’est encore heureux que j’avais déjà accouché.»
    Elle appuya la photo sur le grillage pour que Berthe la voie. Emilie aurait tant voulu voir son expression.
    «On va la laisser ici dans le parloir. Tu pourras venir la chercher. On l’a apportée pour toi. »
    Berthe fît non de la tête. Émilie fronça les sourcils et regarda en direction de l’autre religieuse.
    «Votre amie a fait le vœu de ne pas s’attacher aux biens de la terre. Elle préfère ne pas avoir le portrait en sa possession.»
    Émilie rangea la photo dans son sac et en sortit une autre, celle de Rose dans les bras de son grand-père Pronovost. Berthe la regarda longuement et Émilie crut entendre un discret soupir. Pour meubler le silence, Émilie commença à décrire la photo comme si Berthe avait perdu les yeux en même temps que la langue.
    «Rose a les cheveux pas mal longs pour une p’tite de son âge. Comme tu vois, elle frise un p’tit peu. J’ai fait sa robe. C’est une p’tite robe toute blanche avec des dentelles pis des plis cousus. Elle avait des bas blancs pis des beaux p’tits souliers noirs avec une courroie pis des p’tits boutons ronds. Tu connais pas mon beau-père. C’est lui qui tient Rose. Mais on le voit mal parce qu’il y avait de l’ombre à cause de son chapeau.»
    Berthe s’approcha du grillage et regarda la photo pendant de longues minutes. Émilie aurait tant voulu être en mesure de suivre le cours de ses pensées. Puis, Berthe éloigna sa tête voilée.
    «Même celle-là tu veux pas la garder, Berthe?»
    Berthe fît non. La seconde religieuse s’agita sur sa chaise. Émilie regarda Ovila. Il semblait aussi mal à l’aise qu’elle.
    La seconde religieuse se leva, imitée par Berthe. Émilie et Ovila en firent autant.
    «Bon, Berthe, je pense que nous autres on va y aller. On reste pour la semaine, ça fait qu’on va en profiter pour visiter la ville. »
    Elle ne savait plus quoi dire. Si seulement Berthe avait répondu. Craignant d’avoir fait quelque chose d’incorrect, elle voulut se gagner l’estime de la seconde religieuse.
    «Est-ce qu’on pourrait visiter votre chapelle?»
    Ovila et Émilie passèrent deux journées extraordinaires. Ils montèrent sur le mont Royal. Allèrent voir l’impressionnant hôtel de ville et descendirent vers le port. Au passage, Ovila regarda la marchandise qu’offraient les cultivateurs, place Jacques-Cartier. Arrivés au port, ils se dirigèrent vers le quai Bonsecours. Devant le marché, d’autres cultivateurs, bien installés sous leurs toiles protectrices. Arrivés au quai, ils virent le Teirebonne et son immense roue à aubes.
    «Ça doit être quelque chose de descendre à

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