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Les fils de Bélial

Les fils de Bélial

Titel: Les fils de Bélial Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
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Dans la coupe abandonnée du mariage, le philtre de l’amour s’était éventé. Rien d’autre ne subsistait qu’un breuvage dont il craignait de n’éprouver aucun plaisir gustuel si par bonheur, en recouvrant la liberté, il s’empressait, heureux d’y étancher sa soif.
    « Aliénor », songea-t-il.
    Celle-là devrait payer pour la mort d’Oriabel.
    Il y avait eu, ensuite, la folle dame de Montaigny, puis la fille de maître Goussot, l’armurier, singulièrement offerte. Puis Luciane… Et Francisca la Sévillane… Elle l’avait empateliné d’un coup. Il ne se reprochait point cette liaison : c’était grâce à elle qu’il avait pu lutter contre l’influence des précédentes et l’obsession de leurs sourires, de leurs étreintes, de leurs postures… Lu ciane, parmi elles, tel un diamant serti d’intentions rien moins que voluptueuses. On ne pouvait façonner à son goût un diamant qu’avec la poudre des autres… Et maintenant plus rien sinon cette évidence : l’envie de vivre n’avait point, fatalement, le désir d’aimer pour conséquence. Et pourquoi songeait-il froidement à l’amour alors qu’il n’était entouré que de haine ?
    –  Sommes-nous seuls, Robert ?
    –  Presque.
    –  Il va falloir nous évader.
    –  Certes, messire. Levez-vous. Il n’est pas bon de jouer au gisant.
    Paindorge savait qu’un simple mouvement pouvait disperser les pensées les plus lourdes sinon les plus   détestables. Sans même l’en remercier, Tristan se dépêtra du bourbier des passions mortes et redevint un guerrier aussi impotent dans sa peau que dans son armure.
    –  Tous se lèvent. On amène les roncins… On aide Édouard à enjamber le sien.
    –  Pauvre bête !… Quel fardeau !
    Tristan se leva enfin. Sans aide. Pèdre allait chevaucher entre don Sanche, inquiet, et le Maître de Calatrava 352 . Derrière viendrait le prince de Galles entre Guichard d’Angle et Étienne de Cousenton 353 .
    –  Où vont-ils ? demanda Paindorge à Northbury.
    –  À Nâjera pour ouïr la messe, puis à Burgos.
    –  Et nous ?
    Tristan désignait d’un mouvement circulaire les quelque cinquante prud’hommes qu’entouraient autant de vougiers et de picquenaires et dix ou douze archers et cranequiniers dont nul ne doutait, parmi les vaincus, qu’ils ne fussent prompts et infaillibles.
    –  Vous, messires, clama Northbury afin d’être entendu de tous, vous allez nous suivre sous bonne garde.
    –  À pied ? interrogea Tristan, l’index dirigé vers la blessure de Paindorge.
    –  À cheval. Les montures céans ne nous font point défaut.
    –  Et la nourriture ? s’inquiéta Audrehem.
    –  Vous en serez pourvus : le prince y a pensé. Il y aura une distribution à Santo Domingo de la Calzada.
    C’était loin, mais il fallait se soumettre aux vainqueurs.
    –  Ne nous plaignons pas, dit Audrehem qui recouvrait sa hautaineté. Ils ont confiance en nous, sans quoi nous aurions été privés de nos épées.
    –  Combien sont-ils ? demanda Paindorge une fois juché sur un genet noir nerveux et docile.
    –  Cinq cents, Robert. Ta jambe te fait-elle souffrir ?
    –  Point trop.
    Que dire de plus ? À cheval sur un roncin pommelé, Tristan n’était aucunement tenté de regarder ce pays qu’il avait parcouru dans le sillage de don Henri. Il était beau, pourtant, avec ses montagnes lointaines, ses collines rudes, verdoyantes, déployées sans trêve jusqu’à l’infini, follement garnies d’herbes fières d’avoir survécu à l’hiver où çà et là un arbre s’étirait comme un homme après un sommeil lourd. Lemosquet et Lebaudy étaient-ils sains et saufs ? Ils avaient fui, c’était certain, entraînant avec eux Alcazar, Malaquin, Tachebrun et Carbonelle. Droit devant, entre Chandos et le captal de Buch, Guesclin chevauchait un coursier noir digne d’un prince. Le Breton avait bien dormi, bien mangé, bien bu. Sans qu’on lui prodiguât des égards extraordinaires, on prenait soin de sa personne alors qu’Audrehem, maréchal de France, montait un miroutte 354 assez jeune dont une sagette avait écorché une cuisse. Neuville, son fidèle neveu, suivait sur un rouan cavecé de noir. Il courbait l’échine. Contrairement à son tayon 355 , il n’avait jamais envisagé la défaite. Ses certitudes aux conseils, assorties de paroles corrosives à l’encontre d’Édouard plus encore que de Pèdre, se réduisaient désormais à des grognements sans

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