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Les Fils de France

Les Fils de France

Titel: Les Fils de France Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Franck Ferrand
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d’un ordre, il faut à présent que vous me laissiez partir en paix.
    Anne éclata en sanglots, elle couvrit de larmes et de baisers le visage déjà cireux du monarque, et sa barbe, et puis ses mains ; elle se laissa glisser, comme un pantin sans vie, dans la ruelle du lit et, bientôt effondrée sur le sol, émit une longue et douloureuse plainte.
    — Non ! pleurait-elle à fendre l’âme. Oh, Seigneur !
    Dans cette femme éplorée, désespérée, qui hoquetait dans la pénombre, c’est peut-être la jeune fille privée de son adolescence qui laissait éclater son désespoir.
    — Terre, gémissait-elle, Terre, engloutis-moi !
    La porte se rouvrit franchement, cette fois, et plusieurs valets, sous la conduite de l’amiral, entrèrent pour relever la maîtresse déchue et la conduire au-dehors sous bonne escorte. Annebault s’approcha du chevet de son maître ; François avait les yeux fermés, mais il ne s’était pas assoupi.
    — Ce sont des moments bien pénibles, murmura-t-il.
    L’amiral se permit de prendre la main du roi dans les siennes. Entorse considérable aux règles, mais qui lui parut dictée par la simple humanité.
    — Sire, dit-il, monsieur le dauphin est là, dans l’antichambre.
    François soupira, sans que l’on pût savoir si c’était de lassitude ou de soulagement.
    — Qu’il entre, et que les grands officiers viennent aussi !

    Henri, visiblement impressionné, se pencha sur le lit pour embrasser son père et François, pour la première fois peut-être depuis le retour d’Espagne des petits otages, se montra tendre à son égard. Il vérifia d’un œil que les principaux conseillers étaient présents puis, de sa voix la plus claire, déclara son fils héritier unique de tous ses biens meubles et immeubles, et lui recommanda ses familiers et ses serviteurs.
    — Je confie Mme d’Étampes à votre bienveillance ! Soyez clément à son sujet.
    — Oui, sire.
    Le roi livra ses ultimes recommandations, et fit notamment promettre à son fils de fermer le Conseil aux princes lorrains.
    — Enfin vous n’avez plus qu’une sœur, dit-il en évoquant la princesse Marguerite. Prenez grand soin d’elle et tâchez donc de la marier selon son rang.
    — Je vous le promets.
    Cette fois, le dauphin ne put retenir ses larmes. Son père sourit, attendri.
    — Pourquoi pleurez-vous ? J’ai vécu ma part. Vous avez été un bon fils, et je m’en félicite. Mais je ne m’en irai point que je ne vous ai donné ma bénédiction. Souvenez-vous un peu de moi...
    À ces mots, le roi réprima lui-même un sanglot.
    — Quand à votre tour, vous en viendrez là où je suis, vous verrez que c’est un grand réconfort de pouvoir énoncer ce que je vais dire : qu’en conscience, je n’ai aucun remords quant aux actes de justice qu’on a pu rendre sous mon règne...
    Heureusement, il n’y avait dans la chambre ni réformé ni Vaudois...
    — À présent, que je vous bénisse !
    Alors même que le roi invoquait les faveurs célestes pour son fils, il commença de sombrer dans une sorte de délire qui perdura la journée et la nuit du mardi au mercredi.

    Au petit matin du 30, une embellie se fit jour. François avait repris ses esprits, plus ou moins. Aussitôt l’espoir renaquit dans son proche entourage. Et quand le dauphin, sur les coups de dix heures, traversa l’antichambre pour entrer, il aperçut, devisant avec son épouse, l’indésirable duchesse d’Étampes qui, avertie d’un mieux, était accourue aux nouvelles.
    — Ne me dites pas qu’elle est encore ici !
    C’est la rancœur qui parlait par sa bouche. La dauphine Catherine s’effaça, comme prise en faute. Henri l’ignora pour se diriger vers l’autre d’un pas nerveux.
    — J’imagine que madame la grande sénéchale aurait aimé vous donner cet ordre elle-même ; mais puisqu’elle n’est pas là, je vous le dis en son nom : quittez ces lieux ! Quittez-les avant que ma colère ne vous y retienne autrement.
    Anne de Pisseleu fixa le dauphin dans les yeux. Elle avait déjà tout perdu, et le savait ; mais il lui restait sa fierté. Se redressant, majestueuse, et adoptant le ton le plus altier, elle apporta la seule réponse possible à cette injonction.
    — Je n’obéis, monsieur, qu’aux ordres du roi.
    Henri fut parcouru d’un frisson de haine. Se contenant à grand-peine pour ne pas frapper – oui, frapper – cette créature qui, à ses yeux, était l’incarnation du diable, il éleva la

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