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Les fils de la liberté

Les fils de la liberté

Titel: Les fils de la liberté Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Diana Gabaldon
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instant, l’atmosphère de l’attroupement était passée de l’approbation à l’indignation et les Indiens le sentaient.
    Un officier inconnu de William s’avança, défia les Indiens d’un œil mauvais puis arracha le scalp blond de la pique. Il resta un moment sans savoir quoi en faire. Les cheveux dans sa main paraissaient vivants, les boucles s’enroulant autour de ses doigts.
    Les autres étaient enfin parvenus à séparer Jones de l’Indien et lui tapotaient le dos, essayant de le convaincre de s’éloigner. Le jeune lieutenant se tint immobile, les larmes coulant sur ses joues et gouttant sous son menton. « Jane », articula-t-il en silence. Il tendit la main d’un air implorant, la paume vers le ciel, et l’officier y déposa délicatement le macabre trophée.

15
    Les captifs
    Le lieutenant Stactoe était tombé en arrêt devant l’un des cadavres. Il s’accroupit très lentement, le regard rivé sur quelque chose, puis, comme par réflexe, posa une main sur sa bouche.
    Je ne voulais pas regarder.
    Il avait entendu mes pas et se retourna. La transpiration formait des rigoles le long de son cou et le col de sa chemise était trempé. D’une voix parfaitement neutre, il me demanda :
    — A votre avis, il était encore en vie quand ils lui ont fait ça ?
    A contrecœur, je regardai par-dessus son épaule.
    — Oui.
    — Ah.
    Il se releva, contempla le corps encore un moment puis fit quelques pas sur le côté et vomit.
    Je lui pris le bras et lui dis doucement :
    — Peu importe. Il est mort à présent. Venez m’aider.
    Un bon nombre d’embarcations s’étaient égarées et avaient été capturées avant d’atteindre l’autre rive du lac. Beaucoup d’autres fuyards avaient été surpris par les soldats britanniques au point de portage. Notre canoë et quelques autres étaient parvenus à s’échapper. Nous avions marché dans la forêt pendant un jour, une nuit et le plus clair d’un autre jour avant de rejoindre le gros des troupes ayant fui le fort par voie de terre. Je commençais à penser que ceux qui avaient été faits prisonniers étaient chanceux.
    J’ignorais depuis combien de temps le petit groupe que nous venions de découvrir avait été massacré par les Indiens. Les cadavres n’étaient pas frais.
     
    Des sentinelles étaient postées la nuit. Ceux qui n’étaient pas de garde dormaient comme s’ils avaient été assommés à coups de gourdin, épuisés par la retraite, si l’on pouvait user d’un tel euphémisme pour une fuite en avant aussi pénible que douloureuse. Je me réveillai en sursaut à l’aurore après avoir rêvé d’arbres couverts de neige. Jamie était agenouillé près de moi, une main sur mon bras.
    — Tu ferais bien de venir, a nighean .
    Mme Raven s’était tranché la gorge avec un canif.
    Nous n’avions pas le temps de lui creuser une tombe. Je lui fermai les yeux et nous empilâmes des pierres et des branches sur son corps avant de repartir d’un pas mal assuré vers l’ornière qui faisait office de route à travers la nature sauvage.
     
    Nous commençâmes à les entendre alors que les ténèbres descendaient entre les arbres. De longs hululements aigus. On aurait dit une meute de loups.
    — Avancez ! Avancez ! Les Indiens ! aboya l’un des miliciens.
    Comme invoqué par son ordre, un cri aigu à vous glacer le sang transperça la pénombre et la colonne de fuyards fut prise de panique, les hommes lâchant leurs balluchons et se bousculant pour passer en tête. Les réfugiés s’étaient mis à hurler à leur tour mais leurs cris furent rapidement étouffés.
    Jamie poussait les plus lents vers le sous-bois.
    — Il faut sortir de la route. Ils ne savent peut-être pas encore où nous sommes.
    Je n’en étais pas convaincue.
    — Tu as préparé ton chant de mort, mon oncle ? chuchota Ian.
    Il nous avait rattrapés la veille et Jamie et lui m’encadraient. Nous étions tapis derrière un énorme tronc couché.
    — Tu vas voir le chant de mort que je vais leur chanter ! marmotta Jamie.
    — Tu ne sais pas chanter.
    Je n’avais pas voulu plaisanter. J’étais si terrifiée que cela m’était venu machinalement. De fait, cela ne le fit pas rire. Il était en train d’amorcer un de ses pistolets qu’il glissa à nouveau sous sa ceinture.
    — C’est vrai, dit-il. Mais ne t’inquiète pas, a nighean , je ne les laisserai pas te prendre. Pas vivante.
    Je me tournai vers lui puis baissai les yeux vers son arme.

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