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Les fleurs d'acier

Les fleurs d'acier

Titel: Les fleurs d'acier Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
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d’indifférence le courrouça :
    — Dame, j’y mets du mien… Pas vous !
    Jouant des reins, il s’évertua à la soustraire à sa passivité, ébranlant cette léthargie de grands ahans coupés d’immobilités vaines. La crainte d’une faillite échauffant ses entrailles, il devint nerveux et farouche.
    — Si tu…
    — Si je quoi , dame ?
    Éclair de chair, un bras le ceintura ; puis l’autre. Membres chauds et nerveux, de plus en plus serrés.
    « Allons, elle s’éveille ! »
    Il s’en voulait de cette surveillance : elle gâtait un plaisir déjà bien compromis. Il y avait en lui, maintenant, le grand besoin de subjuguer cette inconnue avant que de se satisfaire. Mais y parviendrait-il ?… Il y avait en elle ces torsions et turbulences préludant aux délits [272] extrêmes. Et comme, éblouie en ses tréfonds par l’apparition de félicités éteintes, elle gémissait et s’élançait à leur conquête, il la laissa s’époumoner, l’oreille envahie de ce halètement rauque, qui s’avivait.
    Ils formaient un seul corps, soupirant et moite, entraîné furieusement dans un abîme où leurs ardeurs s’affrontaient, plutôt que de s’allier. Des ongles s’enfonçaient dans les reins d’Ogier ; une bouche mordait ses lèvres, ranimant leur douleur endormie ; et bien que l’inconnue atteignît à la béatitude, il lisait dans son œil, près du sien, une sorte de peur sinon de désespoir.
    — Fais-moi un gars de ton espèce.
    Ils s’enlisèrent dans le même spasme effréné, achevé par la femme en plainte fugitive – comme si elle réprouvait son plaisir – ; après quoi tout en eux fut indolence.
    Le temps s’écoula, qu’Ogier ne sut évaluer. La dame-du-donjon le serrait contre elle, nullement par amour, tendresse ou reconnaissance mais afin que leur accouplement plus ardent qu’elle ne s’y était attendue, devînt fécond.
    — Dame… Vous voulez un enfant… On ne veut ou ne peut vous le faire ?
    Nulle réponse. Était-elle mariée ? Bien sûr. Arguant de sa stérilité, son époux menaçait-il de la répudier ?… Qu’avait donc dit ou voulu dire Isabelle concernant Morthemer et son oncle ? Croyant comprendre, Ogier se sentit plein de compassion :
    — Dame, il vous faut partir… Peut-on vous savoir là ?
    Elle le repoussa doucement et demeura étendue, immobile, les jambes croisées, fermée sur cette semence dont son bonheur, son honneur et son avenir dépendaient. Craignant d’être rabroué, Ogier n’osa toucher ce corps d’évanouie ; et pourtant, il en avait envie. Étayé sur un coude et penché sur le visage blafard, toujours aussi peu distinct, il demanda :
    — Qui êtes-vous ?
    — À quoi bon !… Moi, je sais qui tu es… J’étais dans le clotet quand tu es arrivé… L’œil de l’unicorne sur la tapisserie, est vide… Je t’ai vu par ce trou… et je t’ai voulu.
    Quelque chose perla sur sa joue. Effaçant cette larme du doigt, Ogier fut tenté de sourire en demandant : « Agissez-vous ainsi avec tous les passants ? » Il y renonça : c’eût été d’une cruauté immonde. Elle chuchota :
    — Ne me prends pas pour une ribaude… Comprends-moi : il me faut un enfant… un mâle, si Dieu le permet… Tu es beau, bien fait : cela m’a décidée. Je ne suis pas bréhaigne ainsi qu’il le prétend, car j’ai déjà été prise… Mais le petit est mort. Tu ne peux pas savoir…
    — Savoir quoi ?
    Petit bruit de gorge : l’émoi, le désespoir étouffaient l’inconnue. Ogier devina qu’elle joignait ses mains sur son ventre. Touchant un sein rafraîchi d’une sueur furtive, il dit aussi tendrement que possible :
    — Dame, ne tremblez plus. Je peux vous le dire : j’ai fait un enfant à une fille que j’aimais… Les Goddons nous ont en quelque sorte séparés…
    Il se tut, désenchanté. Anne ! Quelle étrangeté d’y penser maintenant.
    La femme remua. Le chagrin ou l’espérance gonfla ce cœur qu’Ogier sentait palpiter sous sa paume.
    — Tu as peut-être eu tort…
    C’était le début d’une mise en défiance interrompu par un soupir.
    — Parlez !… Dites-moi en quoi j’ai eu tort… Quelle faute ai-je donc commise ?
    Il l’avait saisie aux épaules : il fallait qu’elle s’exprimât sans détour. Soudain, la voix devenant acerbe, il reconnut le ton de la jalousie :
    — Tu croyais recevoir Isabelle.
    — Au début, oui.
    — Prends garde à Raoul de Leignes. Il

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