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Les foulards rouges

Les foulards rouges

Titel: Les foulards rouges Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Frédéric H. Fajardie
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le comte de Nissac et
le baron de Fervac arrivèrent les premiers au marché aux chevaux, désertés
depuis que la province ne pouvait plus fournir Paris.
    Désert, point tout à fait car en ce vaste
espace se voyait petite silhouette toute de noir vêtue.
    Descendant de cheval, le comte, surpris, apostropha
son ami Jérôme de Galand :
    — Ainsi, vous qui savez tout, saviez même
cela !
    Le policier eut un pâle sourire.
    — Eh bien oui, car tel est mon devoir. Mais
j’eusse préféré ne rien savoir, au moins pour cette fois, tant ce duel m’attriste.
Vous connaissez mon grand attachement à la baronne Mathilde de Santheuil mais
de vous à moi, cette petite duchesse de Luègue est admirable de courage et de
ténacité, même à considérer que sa cause, la Fronde, n’est point juste.
    Il se tut un instant, observa Mathilde qui, pour
se mieux préparer, croisait le fer avec le baron de Fervac, et reprit :
    — Cher ami, ne dites point que je sais
tout. Pas vous !… Certes, je sais ce qui relève des affaires de police en
la ville de Paris, mais des grandes questions, que sais-je ?… Que sais-je
du destin des hommes de demain, nous qui pourtant travaillons à changer les
choses ?… Que sais-je de ces sociétés secrètes dont je rêve, dont la philanthropie
serait un des moyens d’action et dont les membres se pourraient reconnaître à
des signes ou des emblèmes, tels que jadis les bâtisseurs de cathédrales ?…
Que sais-je du bonheur ?… Que sais-je de l’injustice quand certains
naissent fortunés et d’autres pauvres, beaux et belles, et d’autres laides et
disgracieux alors qu’à mon avis, tout homme et toute femme ont pareillement
droit au bonheur ?
    Le comte de Nissac ne répondit point sur l’instant,
méditant les paroles de Jérôme de Galand qui faisaient diversion à la grande
angoisse qui le prenait en songeant au prochain duel. Il se décida enfin :
    — Soit, la nature est injuste qui fait
tel beau ou point, le sort relève du hasard qui vous fait naître fortuné ou
point mais au moins, la vie de chaque jour pourrait relever du gouvernement des
hommes selon les principes de justice et d’égalité ; la part faite au
malheur serait alors moins importante.
    Galand hocha la tête.
    — C’est bien cela, mais comment y
parvenir ?… Peut-être ne suis-je pas policier en vain mais j’ai grande
méfiance des mouvements de rues. Je crois davantage à l’éducation, qui sera
fort long travail. C’est la raison pour laquelle nous ne verrons pas nos idées
gouverner le monde de notre vivant… Tant mieux pour le cardinal, qui aura su
tenir les féodaux à distance et en cela, travailla à notre cause. Tant mieux
pour ce jeune roi qui fut tant humilié, ne l’oubliera point, et resserrera le
pouvoir de l’État, travaillant lui aussi indirectement à nos idées… Que le
grand changement arrive au temps de leurs successeurs.
    — J’éprouve pareil sentiment. Nous nous
sommes trop attachés à eux en luttant à leurs côtés pour les souhaiter voir
défaits, eux, justement eux, par le peuple. Mais travailler à l’avenir ne les
concerne point, et n’est pas trahison.
    Ils se sentirent complices même en ce souhait
que cette République qu’ils chérissaient n’arrivât point au temps du cardinal
et du jeune roi pour lesquels ils avaient si souvent tiré l’épée. L’honneur, chez
de tels hommes, est un chemin difficile qui amène souvent au renoncement de soi.
    Mathilde de Santheuil vint à eux. Déjà, une
légère transpiration perlait à son front tandis que les mouvements à l’épée
donnaient à ses joues belle coloration toute de roseur.
    Elle s’entretint à l’écart, durant quelques
minutes, avec le comte puis Charlotte de La Ferté-Sheffair, duchesse de Luègue,
arriva sur une jolie pouliche blanche.
    La duchesse portait habit d’homme et fit
savoir qu’elle refusait toute conciliation, souhaitant se battre au plus vite.
    Ainsi en fut-il, le temps que Mathilde de
Santheuil noue un foulard rouge autour de son cou.
    Les deux femmes se battaient avec grâce, l’une
en haut-de-chausses, l’autre en jupe, les chevelures brune ou blonde
virevoltantes, toutes deux bottées, toutes deux très belles.
    La duchesse attaquait vivement, pour tuer, et
la baronne, surprise par la violence des attaques, se contentait de parer si
bien que le duel n’était point décisif, la connaissance de l’attaque de l’une
se heurtant à l’art de la parade de

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