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Les foulards rouges

Les foulards rouges

Titel: Les foulards rouges Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Frédéric H. Fajardie
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le comte et ses hommes, renonçant à franchir
la porte Saint-Germain, n’étaient point encore rendus en la rue Sainte-Marie
Égiptienne où ils laisseraient leurs montures et troqueraient leurs habits
contre ceux, moins remarquables, de Jésuites hongrois.
    Or donc, ils allaient au pas et ne se
pressaient point afin, également, de ne pas attirer l’attention. Ce fut là, sous
l’apparence de grande sagesse, grave erreur, mais comment eussent-ils pu le
deviner ? Comment prévoir, en effet, qu’un serviteur bien dissimulé avait,
aussitôt après leur départ, délivré de leurs liens les survivants de l’hôtel de
Tournon et qu’à présent, les six gardes qui n’étaient point morts ou blessés se
trouvaient lancés à leur poursuite ? En outre, la malchance aidant, les
gardes des princes Volterra et de Conti avaient rencontré un fort parti de
Frondeurs, soit plus d’une trentaine de cavaliers appartenant au duc d’Elbeuf
si bien qu’à présent tout ce monde donnait la chasse à Nissac et à ses hommes
assimilés aux « espions du Mazarin » qu’on traquait sans pitié en la
capitale.
    Nissac avait imaginé de longer le faubourg et
de franchir la rivière de Seine à proximité de l’inquiétante Tour de Nesle dont
les créneaux dentelés et médiévaux se détachaient sur un ciel couleur d’étain.
    Ils arrivèrent aux abords du pont Barbier.
    C’était un pont de bois réputé solide qui, partant
de la rive gauche, aboutissait sur l’autre rive à l’extrémité ouest du château
des Tuileries, côté jardins. Pont certes ancien, mais fort utile, le pont
Barbier évitait aux Parisiens de faire large détour par le Pont-Neuf où s’achevait
brutalement l’île de la Cité seulement prolongée de la statue d’Henri IV.
    Nissac, qui fermait la marche, s’engageait sur
le pont Barbier lorsque des cris et une cavalcade l’alarmèrent. Il se haussa
sur ses étriers, se retourna et découvrit avec stupeur la quarantaine de
cavaliers qui arrivaient au grand galop, l’épée à la main. Cette fois, s’ils
étaient rejoints, il n’était plus grand-chose à espérer.
    Le comte de Nissac réagit aussitôt en criant :
    — Forcez les chevaux !… Au galop !…
    Les hommes aux foulards rouges se retournèrent,
comprirent la situation en un instant et enfoncèrent leurs talons dans les
flancs de leurs montures. Veillant à tous les détails, Nissac avait choisi
chaque cheval avec le plus grand soin. Les bêtes, jusqu’ici grandement
économisées, accélérèrent immédiatement malgré le poids d’or et de joyaux qui
présentait grand désavantage.
    L’eau, furieusement, battait les gros piliers
verticaux du pont tandis que le plancher lui-même se trouvait par instants recouvert.
Le pont Barbier craquait de toutes parts en plaintes sinistres, le vent hurlait
comme un damné, la pluie fouettait les visages des cavaliers penchés sur leurs
montures et qui tentaient de pousser celles-ci le plus qu’il fut possible.
    L’allure des hommes aux foulards rouges était
soutenue bien qu’elle fût gênée par un fort vent qui les prenait par le travers
et les sacs d’or et de pierreries qui alourdissaient les courageux chevaux. Enfin,
sur des montures fourbues par la violence et la rapidité de l’effort, la petite
troupe en grande difficulté atteignit la rive côté Tuileries à l’instant où ses
poursuivants s’engageaient déjà sur le pont au grand galop et dans des gerbes d’écume.
    Nissac, qui se retournait sans cesse, comprit
que sa situation était désespérée. Il allait ordonner de mettre pied à terre et
de se préparer au combat lorsque…
    Fut-ce leur grand nombre ? Leur poids ?
Leur vitesse ? Fut-ce une soudaine montée des eaux ? Fut-ce leurs
cris de victoire qui, retentissant déjà, attentaient aux étranges desseins de
la Providence et provoquèrent l’ire de celle-ci ?
    Quoi qu’il en soit, sous les yeux des hommes
de Nissac et de quelques centaines de Parisiens passionnés par cette poursuite,
le pont Barbier sembla frissonner en un ultime sursaut, comme un gigantesque
animal touché à mort.
    Les Frondeurs, désespérément, ralentirent
leurs montures à l’exception de deux intrépides cavaliers qui, tout au
contraire, poussèrent leurs chevaux dans l’espoir de traverser le pont avant ce
qui paraissait inéluctable.
    Brutalement, le pont se cabra en son milieu, chaque
morceau se dressant en hauteur avant de retomber dans le flot furieux. Attaqué
de tous

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