Les Frères Sisters
dâici. Dis-moi sâil te plaît, comment je dois faire  ?â Il a posé ses deux mains sur mes épaules, et a répondu, âSi tu veux partir, tu devrais tourner les talons et poursuivre ta route. Parce que tu sais, Hermann, tu ne fais pas vraiment partie de lâarmée.â Il sâavère que je ne mâétais jamais formellement engagé  ; je nâavais jamais rien signé de mon nom. Cette nuit-là , ils ont fait une fête en mon honneur. Je suis parti le lendemain matin et ai installé un petit laboratoire non loin de là . Jâai tâtonné pendant près dâun an avant dâobtenir les résultats voulus. Je suis dâabord parvenu à illuminer lâor, mais seulement pendant un court instant. Lorsque jâai compris comment faire durer le scintillement, quelque chose dans la solution sâest mis à ternir lâor. à un moment donné, jâai mis le feu accidentellement à mon refuge, qui a été partiellement détruit. Ce que jâessaie de dire, câest que ça nâa pas été de tout repos. Quand jâai enfin été satisfait du résultat, la ruée vers lâor a explosé en Californie, et je suis parti vers lâouest en suivant la piste de lâOregon. Câest comme ça que jâai atterri à Oregon City, et que jâai rencontré votre homme, le Commodore. à partir de là , je crois que vous connaissez la suite.
â Plus ou moins.  »
Warm se gratta les mains et les jambes. Il leva les yeux vers le ciel et lança à la cantonade, «  Quâen dis-tu, Morris  ? Le ciel est-il assez noir pour toi  ?  »
La voix de Morris répondit, «  Encore une minute, Hermann. Le nigaud sâest fait coincer, et je suis sur le point de lâachever.
â On va voir ça  », riposta Charlie.
Ils étaient en train de jouer aux cartes sous la tente.
Â
Quatre hommes en train dâenlever leurs pantalons au bord dâune rivière en pleine nuit. Le feu flambait derrière nous, et nous avions bu trois verres de whisky chacun, ayant décidé que câétait la juste dose dont nous avions besoin pour accomplir la tâche qui nous attendait, cela nous ferait oublier la froideur de lâeau, sans pour autant nous empêcher de nous concentrer sur le travail, et, par la suite, de nous en souvenir. Le castor en chef trônait au sommet du barrage et nous examinait en se grattant avec ses pattes arrière, à la manière dâun chien  ; la solution avait également fait des ravages sur sa peau. Mais où étaient ses camarades  ? Apparemment, ils se cachaient ou bien se reposaient. Lorsque mes pieds touchèrent lâeau je fus pris dâun rire nerveux mais je mâinterrompis aussitôt, craignant quâune joie excessive ne fût déplacée, voire irrespectueuse  ; envers quoi ou envers qui, je ne saurais le dire, mais jâavais le sentiment que nous retenions tous notre souffle, de façon identique et pour dâidentiques et obscures raisons.
Nous avions roulé lâune des barriques au bord de lâeau, et lâavions ouverte en attendant de la déverser dans la rivière. Jâinhalai lâodeur de la solution et une chaleur brûlante et instantanée pénétra ma poitrine. Morris se tenait sur la rive, et considérait lâeau avec effroi.
«  Comment vont vos jambes, Morris  ?  » mâenquis-je.
Il regarda ses tibias et secoua la tête. «  Pas bien  », fut sa réponse.
Warm dit, «  Jâai mis une marmite dâeau à chauffer sur le feu et jâai posé du savon à côté pour que nous puissions nous laver après. Morris et moi nâavons pas pensé à le faire la dernière fois, et câest pourquoi nous avons des problèmes maintenant.  » Il se tourna vers Morris et demanda, «  Tu crois que tu peux tenir encore une nuit  ?
â Allons-y et nâen parlons plus  », grommela-t-il. à présent, ses jambes étaient irritées jusquâaux cuisses  ; sa peau était à vif et couverte de grosses cloques purulentes dâoù sâéchappait un épais liquide brunâtre. Il avait du mal à se tenir droit, et lorsque je le vis boitiller jusquâau bord de lâeau je me dis,
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