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Les Frères Sisters

Les Frères Sisters

Titel: Les Frères Sisters Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Patrick deWitt
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décidé que l’or était un trésor suffisant.
    Â«   Warm est mort, dis-je à Charlie.
    â€” Je vais dormir   », dit-il.
    Et vous savez quoi   ? C’est exactement ce qu’il fit.

 
    J’enterrai Warm le lendemain matin, sans l’aide de Charlie, même si une fois encore il me gratifia de sa présence irascible au moment de mettre le corps en terre. L’unique sac de Warm était rempli de journaux et de papiers, et je les parcourus à la recherche de la recette de la solution, mais ne pus quasiment rien comprendre à ce qu’il avait griffonné, non parce que j’ignorais la science et la chimie, mais parce que l’écriture de l’homme était illisible. Je finis par abandonner, et posai le tout sur sa poitrine avant de recouvrir le cadavre de sable et de terre. Je m’abstins de faire un discours cette fois, et décidai de ne pas mettre de croix sur les deux tombes qui étaient côte à côte, ce que j’ai depuis regretté de ne pas avoir fait pour que demeure une sorte de trace de l’amitié qui les avait unis aussi bien que de ce qu’ils avaient accompli sur le site de la rivière. Mais je me sentais mélancolique, obscurément maudit par le sort et prisonnier, et je ne voulais qu’une seule chose   : quitter cet endroit   ; ainsi, dès que j’eus fini d’enterrer Warm, Charlie et moi montâmes à cheval et partîmes, abandonnant la tente et le feu encore allumé derrière nous. Je me retournai pour regarder le campement et songeai, Jamais je ne serai un meneur d’hommes, et je n’ai aucune envie de l’être   ; mais je ne souhaite pas non plus être mené. Je veux rester maître de moi-même. Afin qu’ils ne meurent pas de faim, j’avais détaché le cheval de Warm et les mulets. Le cheval ne bougea pas mais les mulets se mirent à nous suivre. Je tirai en l’air pour les disperser, et ils s’enfuirent vers la rivière. Ils ne portaient rien sur le dos et n’avaient aucun marquage, et leurs jambes courtaudes s’agitaient d’avant en arrière à une telle vitesse que je fus traversé d’une impression d’irréalité.
    Nous prîmes la direction du nord-ouest et arrivâmes à Mayfield trois jours plus tard. Au cours du voyage, Charlie et moi échangeâmes peu de mots, même si, lorsque nous parlions, nous restions courtois et aimables l’un envers l’autre. Je crois qu’il se demandait qui il allait devenir   ; et, d’une certaine manière, je me posais la même question. En repensant aux jours qui venaient de passer, je songeai, Si je dois effectivement m’arrêter de travailler pour le Commodore, autant tirer ma révérence à l’occasion de cette affaire ô combien spectaculaire. Je décidai de rendre visite à ma mère dès que je le pourrais, si elle était toujours en vie   ; et je connus avec elle de nombreuses réconciliations imaginaires, qui, toutes, s’achevaient sur le geste de son bras tordu venant ceindre mon cou pour m’embrasser, juste sous l’œil, à la limite de la barbe. Ces pensées m’apaisèrent, et le voyage jusqu’à Mayfield, malgré nos récentes difficultés, fut aussi agréable que possible. À mi-chemin, je dis à Charlie, «   De toute façon, ta main gauche est plus rapide que la main droite de la plupart des hommes.
    â€” La plupart, mais pas tous   », répondit-il, et le silence retomba.
    Je me sentais partagé par rapport aux Indiens qui avaient volé notre or. Il semblait normal, en quelque sorte, que nous ne possédions plus ces richesses. N’avais-je pas éprouvé une pointe de remords lorsque j’avais soulevé ce seau   ? Mais je ne crois pas que j’aurais été capable de philosopher avec un tel détachement si un autre tas d’or ne nous avait pas attendus sous le poêle à Mayfield, une somme qui représentait pour moi la possibilité de changer tout ce que je désirais dans ma vie. C’est pourquoi, lorsque je sentis une odeur de fumée alors que nous étions à deux ou trois kilomètres de la ville, je fus pris d’une terrible appréhension. Tandis que Charlie et moi nous approchions de l’hôtel, je passai de l’inquiétude à la colère, pour

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